Le Conseil fédéral veut que vous travailliez plus longtemps
La situation financière de l’AVS doit être stabilisée pour les années 2030 à 2040. Les mesures envisagées doivent rendre le système plus équitable en comblant des lacunes de cotisation et de favoriser le maintien d’une activité lucrative jusqu’à et après l’âge de référence, a indiqué mercredi le Conseil fédéral.
Pour ce faire, il encourage la poursuite de l'activité professionnelle jusqu'à l'âge de référence ou au-delà. Le montant à partir duquel les cotisations AVS sont prélevées sera relevé à 21 800 francs (contre 16 800 actuellement).
Âge maximal au-delà de 70 ans
Le Conseil fédéral renonce à relever l'âge de référence pour la retraite. Mais il entend toutefois créer les bases pour le flexibiliser. Des modèles alternatifs, qui prennent par exemple en considération la pénibilité du travail, la profession ou le niveau de formation, devront être étudiés.
La réforme prévoit aussi de supprimer l’âge maximal dans l’AVS (70 ans). Au-delà de cet âge, il n’est aujourd’hui pas possible d’améliorer sa rente alors que le travailleur doit continuer à payer des cotisations au-delà de 70 ans.
Les bonifications pour tâches éducatives et d’assistance seront attribuées individuellement et plus en fonction de l’état civil.
Failles de cotisation
Le système actuel présente des failles qui peuvent entraîner des lacunes de cotisation et une baisse des rentes. Ces lacunes doivent ensuite être compensées par d’autres institutions sociales, par exemple les prestations complémentaires.
Les mesures envisagées par le Conseil fédéral dans le domaine des cotisations visent à rendre le prélèvement des cotisations plus équitable, à éviter les lacunes de cotisation et à améliorer la protection sociale des personnes âgées. Ainsi, le taux de cotisation des indépendants doit être aligné sur celui des salariés.
Par ailleurs, les indemnités journalières en cas de maladie et d’accident ne seront plus exemptées de cotisations AVS. Cela est déjà le cas pour les indemnités journalières de l’assurance chômage, de l’assurance perte de gain fédérale, de l’assurance-invalidité ou de l’assurance militaire. Les personnes malades ou accidentées ne devront plus payer elles-mêmes leurs cotisations AVS. Leurs droits aux prestations seront donc également améliorés.
Dividendes aux salariés actionnaires
Le Conseil fédéral s'attaque également aux dividendes inhabituellement élevés versés par certaines entreprises à leurs salariés actionnaires. Ceux-ci seront soumis aux cotisations AVS afin d'éviter de privilégier les dividendes au salaire. Avec cette mesure, le Conseil fédéral entend lutter contre les abus et rendre le système plus équitable entre les salariés actionnaires et les autres salariés.
Ces mesures devraient générer des recettes supplémentaires pour l’AVS d’environ 700 millions de francs d’ici 2040.
La question du financement
Le besoin de financement de l’AVS pour la période 2030-2040 dépend du financement de la 13e rente de vieillesse. Si le Parlement opte pour un financement durable, aucune mesure supplémentaire ne sera nécessaire pour AVS2030. Mais si le Parlement décide d'un financement temporaire, le Conseil fédéral propose une augmentation de la TVA de 0,7 point.
Si aucun financement additionnel ne devait être décidé par le Parlement et à condition que les mesures présentées dans le domaine des cotisations et des prestations soient poursuivies, une augmentation de 0,7 point de TVA combinée à 0,2 point de cotisation ou une augmentation de 0,9 point de TVA serait nécessaire pour garantir la stabilité financière de l’AVS.
Le Conseil fédéral envisage également l’introduction d’un mécanisme d’intervention politique pour stabiliser l’AVS si la situation du fonds devait se détériorer et qu’une baisse à long terme du niveau du fonds en dessous de 90% se profilait. Le Département fédéral de l’intérieur (DFI) devra présenter un avant-projet d’ici au printemps 2026.
La gauche satisfaite, «mais»...
Les réactions politiques ne se sont pas faites attendre. L'Union syndicale suisse (USS) salue le fait que le Conseil fédéral renonce à augmenter l'âge de la retraite, respectant ainsi le «clair rejet» par les trois quarts de la population du relèvement de l'âge de la retraite à 66 ans en mars 2024. Elle déplore cependant que la réforme mette l'accent sur les incitations à travailler au-delà de l'âge de la retraite.
Et d'avertir que l'USS s'opposera à toute mesure visant à rendre encore plus difficile l'accès à la retraite anticipée, en particulier pour les personnes ayant une longue carrière et des conditions de travail difficiles. Elle salue en revanche la proposition visant à combler les lacunes en matière de cotisations du côté du financement et à soumettre les indemnités journalières de maladie et d'accident à l'obligation de cotiser à l'AVS, tout comme les versements excessifs de dividendes.
Le PS salue également la «volonté claire» de combler certaines lacunes et d'instaurer davantage d'équité. Et d'ajouter qu'il continuera de s'engager pour une AVS forte, financée durablement, y compris la 13e rente, et contre une réduction des prestations et toute tentative d'augmenter l'âge de la retraite.
Le PLR critique
Le PLR dénonce lui une «soi-disant réforme» qui ne comprend aucune mesure structurelle, mais ne fait qu'alourdir les charges pour les entreprises et les indépendants. Avec la réforme présentée, «les entreprises sont définitivement condamnées à devenir la vache à lait», écrit le parti dans un communiqué. Et d'avertir qu'il combattra par référendum toute réforme de l'AVS qui mise exclusivement sur une augmentation des recettes au détriment de la classe moyenne et des PME.
Pour le PLR, le seul point positif est le nouveau mécanisme d'intervention proposé en cas de détérioration de la situation financière de l'AVS. «Il est grand temps d'introduire un tel frein à l'endettement dans l'AVS», estime le PLR, qui regrette toutefois que les mesures d'assainissement ne soient pas précisées. Il plaide pour un «ajustement modéré» de l'âge de la retraite.
L'Union patronale suisse (UPS) dénonce elle aussi une «politique symbolique» et déplore des charges supplémentaires au lieu de réformes structurelles. Et de plaider pour un relèvement de l'âge de référence. Elle salue toutefois les mesures prévues pour inciter à continuer à travailler après l'âge de la retraite et la suppression de l'âge maximal pour l'AVS, qui contribueront à pallier la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée, mais ne résoudront pas les défis démographiques.
(ats/acu)
