Le conseiller national saint-gallois Markus Ritter est candidat pour le siège de Viola Amherd au Conseil fédéral. Le président de la puissante Union suisse des paysans (USP) fait partie de l'aile droite du Centre. Mais qu'est-ce que ça veut dire, en fait? Ritter serait-il l'équivalent d'un PLR moyen ou d'un UDC modéré? C’est un peu plus compliqué que ça.
Gauche et droite, au final, qu'est-ce que ça veut dire? Un politicien sera toujours (à deux exceptions près) toujours à gauche de l'un et à droite de l'autre. Pour arriver à évaluer la manière dont les partis et leurs membres se distinguent les uns des autres, il convient de les comparer entre eux.
Pour ce faire, nous avons passé au crible tous les votes au Parlement depuis 2004 et les avons répartis via une méthode d'échelle. Nous pouvons ainsi classer tous les partis ainsi que les hommes et femmes politiques dans un schéma gauche-droite. Notre analyse permet de mettre en valeur les positions des parlementaires les uns par rapport aux autres durant une durée déterminée.
Voici l'évolution de la dispersion des partis du Conseil national chaque année, de 2004 à 2024. Elles permettent de voir, entre deux pôles (gauche et droite) à quel point les membres de partis et leurs votes sont dispersés par rapport à leur base.
Répartition des partis en fonction des votes au Parlement de 11 (à gauche) à -11 (à droite) de 2004 à 2024
Les Verts
PS
Vert’libéraux
Le Centre
PLR
UDC
Graphique: watson • Source: propres calculs /
parlament.chUn bref constat s'impose: tous les partis, depuis vingt ans, se sont recentrés autour de leur base. On évoque souvent la polarisation de la politique, mais il semble aussi que les partis se sont juste rapprochés de leur ligne principale.
Et voici la répartition des parlementaires suisses en 2024. Les députés sont classés en 45 colonnes selon une note allant de 10,1 (à gauche) à -10,1 (à droite). Au sein de chaque colonne, la personne dont le comportement de vote est le plus à gauche est placée en bas de la liste.
Répartition des parlementaires en fonction des votes au Parlement, de 11 (gauche) à -11 (droite)
Links
Mitte
Rechts
Graphique: watson • Source: propres calculs /
parlament.chNote: pour une question de lisibilité, toutes les notes qui suivent dans le texte ont été arrondies à une décimale près. Pour plus de précisions, n'hésitez pas à naviguer dans le tableau.
La progression est particulièrement claire pour les partis de centre-droit. Si en 2004, les anciens PDC (Parti démocrate-chrétien) et PRD (Parti radical-démocratique) avaient tendance à se «téléscoper» avec des opinions plus variées, Le Centre se positionne désormais clairement sur la gauche du PLR, mais avec un entrelacement au milieu.
Au PLR, les positions sont moins diverses aujourd'hui qu'il y a vingt ans. Les libéraux-radicaux sont moins dispersés entre leur aile humaniste et leur aile conservatrice et se sont rencentrés. C'est cette orientation plus stricte que suivent aujourd'hui la plupart des membres du parti sous l'ère Thierry Burkart. La tendance est la même au Centre. En 2004, Gerhard Pfister, le président sur le départ du parti, était aligné sur la droite du PDC de l'époque.
A gauche, le recentrage au sein des partis a aussi eu lieu. A l'image du Parti socialiste (PS), connu pour sa ligne claire, qui s'étendait autrefois bien plus au centre, presque jusqu'au PDC. Mais cette ère a définitivement cessé en 2008: à cette époque, les socialistes ont consolidé leur position à gauche. Ils ont ainsi gardé la ligne la plus stricte au Parlement avec le positionnement le plus constant de tous les partis.
Le comportement électoral des Verts est en revanche plus volatil. Dans les années 2000, ils étaient positionnés à gauche du PS, avant de se retrouver au même niveau pendant la législature de 2011 à 2015. Depuis, ils ont pris un clair virage à gauche et s'y démarquent désormais par rapport au PS.
Quant au premier parti de Suisse, l'UDC, il a clairement pris ses distances avec les radicaux de l'époque. Dans les années 2000, les politiciens les plus modérés de ce parti rejoignaient les membres les plus conservateurs de la droite libérale.
Mais un recentrage graduel a eu lieu. Celui-ci est clair depuis la législature 2011 à 2015 et n'a cessé de s'accentuer. La double concentration de l'UDC et du PLR sur leurs lignes a marqué un fossé clair entre les deux partis, à l'inverse du Centre qui est resté proche de ce dernier.
Voyons désormais les partis en détail.
Le membre le plus à droite du Conseil national est le Bernois Erich Hess (-9,9), suivi du chef de groupe UDC, le Zougois Thomas Aeschi (-9,4). Le membre le plus modéré du parti agrarien est le Schaffhousois Thomas Hurter (-7). Son président, le Schwytzois Marcel Dettling (-9) fait partie de la ligne dure du parti. Son prédécesseur, Marco Chiesa était plus modéré.
Parmi les romands, le conseiller national UDC le plus modéré est Jacques Nicolet (-7,1) et le plus à droite Sylvain Freymond (-8,2) — tous deux vaudois. Les élus UDC romands se trouvent tous dans la moitié modérée du parti. Les deux élus MCG du Conseil national, Roger Golay (-6,9) et Daniel Sormanni (-6,3), sont les deux parlementaires les plus «à gauche» du Groupe UDC.
Ecart entre le membre le plus modéré et le plus radical de l'UDC: 2,9 points — avec le MCG: 3,6 points.
La membre la plus à gauche du Parlement est la cheffe de groupe écologiste, la Bernoise Aline Trede (10,8). Elle n'est pas loin de l'ancien président du parti Balthasar Glättli (10,5). Le plus modéré du parti est le Zurichois Bastien Girod (9,1), proche des socialistes, qui a par ailleurs quitté son poste en décembre dernier.
Les conseillers nationaux romands les plus à gauche du Parlement sont le Valaisan Christophe Clivaz et la Genevoise Delphine Klopfenstein-Broggini (tous deux à 10,5). Le plus modéré est le Vaudois Raphaël Mahaim (10). Les Verts romands sont équitablement répartis au sein du parti.
Ecart entre le membre le plus modéré et le plus radical des Verts: 1,7 point.
Le PLR se situe clairement au centre-droit du Parlement. Son membre le plus à gauche, le Vaudois Laurent Wehrli (-1,6), se trouve juste à côté du centriste le plus à droite (voir plus loin). Le libéral-radical le plus conservateur est le Bernois Christian Wasserfallen (-3,2).
Les Romands sont équitablement répartis au sein du PLR. Le plus à droite est le Valaisan Philippe Nantermod (-2,7).
Ecart entre le membre le plus à droite et le plus centriste du PLR: 1,6 point.
Le représentant le plus à gauche du Parti socialiste est le Genevois Christian Dandrès (8,7), et la plus modérée l'Argovienne Gabriela Suter (7). Il s'agit du parti dont la ligne est la mieux tenue par ses membres, par ailleurs nombreux: 40 conseillers et conseillères nationales. Les coprésidents du parti Mattea Mayer (7,6) et Cédric Wermuth (7,4) sont alignés au milieu du parti.
Les socialistes romands sont marqués sur l'aile gauche du PS. Les quatre membres du Conseil national les plus à gauche sont romands — après Christian Dandrès: Martine Docourt (8,2), Laurence Fehlmann-Rielle (8,1) et Jean Tschopp (8,1). La conseillère nationale romande la plus modérée est la Fribourgeoise Valérie Piller-Carrard (7,3), par ailleurs vice-présidente du parti.
Ecart entre le membre le plus modéré et le plus à gauche des socialistes: 1,6 point. Note intéressante: si l'on exclut les deux membres les plus excentrés, l'écart tombe même à 0,9 point, ce qui fait prendre une forme de «tour» dans notre graphique. Une petite prouesse pour le deuxième parti le mieux représenté à Berne.
Il porte bien son nom: le Centre est bel et bien le parti qui se trouve, arithmétiquement, au centre de l'échiquier politique. La majorité de ses parlementaires se trouve toutefois sur la partie droite de l'axe médian (23 membres), contre 6 membres sur la partie gauche.
Le Tessinois Giorgio Fonio se distingue: ce secrétaire syndical se positionne clairement à gauche de son parti (0,9). Le membre le plus à droite est l'Appenzellois Thomas Rechsteiner (-1,3). Le candidat au Conseil fédéral Markus Ritter est à -1,1.
Parmi les Romands, le Valaisan Sidney Kamerzin est le plus à droite (-0,9) et la Fribourgeoise Marie-France Roth Pasquier la plus à gauche (0,2). Les membres romands se répartissent équitablement dans le groupe.
La parlementaire la plus «proche du zéro» du Conseil national est la Lucernoise Priska Wismer-Felder est respectivement à 0,014. La Vaudoise Isabelle Chappuis est la conseillère nationale romande la plus au centre, à 0,029.
Ecart entre le membre le plus à droite et le plus à gauche du Centre: 2,2 points. (Et sans Giorgio Fonio: 1,5 point)
Le PVL peut être considéré comme le seul parti important de centre-gauche du Parlement. Né en 2007, il a gardé une ligne particulièrement compacte depuis lors. La Vaudoise Céline Weber (2,5), par ailleurs la seule romande à Berne, y est la plus centriste, suivie du fondateur du parti, le Zurichois Martin Bäumle (2,7). La Bernoise Kathrin Bertschy est la plus à gauche (3,5).
Ecart entre les deux membres les plus opposés des Vert'libéraux: 1 point. Le fait que le parti ne compte que dix membres à Berne facilite cependant la clarté de la ligne.