La diffusion d'un documentaire consacré à Raël, sorti sur Netflix le 7 février dernier, a remis le mouvement sur le devant de la scène. A travers quatre épisodes remplis de témoignages et d'images d'archive, le long-métrage retrace l'histoire du groupe de ses débuts dans les années 1970 jusqu'à aujourd'hui.
Le mouvement nait autour de Claude Vorilhon, un ancien chanteur et journaliste français qui affirme avoir rencontré les extraterrestres à plusieurs reprises. Appelés Elohim, ceux-ci lui apprennent être à l'origine de toute forme de vie sur Terre, le chargent de faire connaître leur message et de faire bâtir une ambassade destinée à les accueillir. C'est, du moins, ce que soutient le «dernier Prophète», rebaptisé Raël, dans ses livres et ses enseignements.
Sur son site internet, l'association revendique aujourd'hui quelque 100 000 partisans, répartis dans plus de 120 pays. La Suisse en fait partie.
«On estime que 1000 à 1500 individus ont reçu le baptême raëlien en Suisse», assure Antoine, porte-parole du mouvement dans notre pays. «Ceux-ci ne sont pas forcément actifs, c'est-à-dire qu'ils ne participent pas nécessairement à nos réunions», ajoute-t-il. «Les adhérents actifs sont une centaine en Suisse romande, environ 150 à l'échelle nationale.» Des nombres confirmés par le Centre intercantonal d’information sur les croyances (CIC).
Le collectif est donc beaucoup moins présent en Suisse alémanique qu'en terres romandes, où il s'est implanté très tôt: en juillet 1977, soit seulement trois ans après les débuts en France.
«Le mouvement s'est constitué comme une association à but non lucratif en plaçant son siège social à Rennaz (VD)», explique Yann Fanti, sociologue des religions auprès du CIC. «Il a également choisi Genève pour établir son siège international, mais n’a pas de lieu de culte officiel.»
«Nous nous réunissions une fois par mois dans des structures qu'on loue pour l'occasion», développe Antoine. «Cela se passe souvent à proximité de Lausanne, car c'est relativement central. Des réunions locales ont lieu un peu partout à des fréquences diverses.» Selon le porte-parole du mouvement, ses membres sont aujourd'hui «bien répartis dans toute la Suisse romande».
«Les médias font souvent référence au Valais, notamment au village de Miège, qui accueillait à une époque plusieurs Raëliens», poursuit-il. Une vigne y a même été inaugurée par Raël en 2005. Si on y trouve toujours des sympathisants, le collectif compte également des membres à Genève et Lausanne, et quelques-uns à Fribourg et Neuchâtel, «même s'ils sont un peu moins nombreux». Seule exception, le Jura n'accueille actuellement aucun membre actif, relate Antoine.
«La moyenne d'âge est d'environ 50 ans», poursuit-il. «Il y a moins de jeunes que d'anciens, même s'il y a des membres qui ont 30 ans. Globalement, je n'ai pas l'impression d'un vieillissement, la situation me semble assez stable.»
On peut se demander si la Suisse offre des conditions particulières au mouvement, qui, par le passé, a déménagé au Québec depuis la France, où il a été classé comme secte par un rapport parlementaire de 1995.
«Il est vrai que les contextes suisse et français sont très différents dans leur rapport aux questions religieuses», affirme Yann Fanti, «mais l'idée que les Raëliens soient considérés comme une secte en France est inexacte».
Quoi qu'il en soit, le mouvement estime entretenir des relations «plutôt bonnes» avec les autorités helvétiques. «Nous n'avons pas l'impression de constituer un problème à leurs yeux», complète Antoine.
«En France, plusieurs membres du mouvement ont fait l’objet d’instructions judiciaires, notamment pour des affaires d’abus sexuels, mais de tels cas n’ont pas été recensés en Suisse», décrit Yann Fanti.
Tout au long de son histoire, le mouvement a été à l'origine de quelques controverses, qui ont trouvé un certain écho en Suisse. L'une d'entre elles concernait la société Clonaid, fondée par les Raëliens aux Etats-Unis avec l'objectif de cloner des êtres humains. «Une interpellation a été déposée au Grand Conseil genevois en 1997 pour alerter sur le fait que les Raëliens se faisaient le relais international de Clonaid en Suisse», explique Yann Fanti.
Le mouvement a ensuite affirmé qu'il s'agissait d'une opération visant à attirer l'attention des médias.
Les autres affaires en Suisse étaient moins polémiques. «Par le passé, nous avons parfois connu certaines difficultés à obtenir des autorisations concernant l'affichage ou l'usage de la voie publique», se remémore Antoine. Cela s'est produit notamment à Neuchâtel et Fribourg, complète Yann Fanti, «dans un contexte où le mouvement connaissait des controverses autour de sa promotion de la géniocratie (l’idée d’une organisation sociale hiérarchisée en fonction du coefficient intellectuel des individus) et des pratiques de méditation sensuelle».
Antoine conteste ce dernier point et indique que «les Raëliens ne font pas activement la promotion de la géniocratie, laissant cela à ceux qui voudraient faire de la politique». Quant à la méditation sensuelle, le porte-parole fait état d'une «méconnaissance» du sujet. Il d'ajoute:
Plus récemment, fin 2023, le groupe a refait parler de lui suite à une campagne d'affichage dans les gares de Lausanne et Genève.
Dans tous les cas, la population ne semble pas trop s'inquiéter. «Le CIC a recensé une centaine de demandes liées à la question des Raëliens en Suisse depuis sa création en 2002, ce qui représente, en définitive, un nombre relativement faible comparé à d’autres tendances», explique Yann Fanti. La plupart des signalements datent de la période 2002-2015. «Entre 2016 et mi-2023, il n'y a eu que deux signalements. Nous observons cependant un regain d'intérêt, principalement dû au documentaire Netflix.»
De son côté, Antoine se veut rassurant: «Notre objectif n'a jamais été de convertir ou convaincre la population ni d'augmenter le nombre de nos effectifs, au contraire. C'est le cas depuis le début et on s'y tient». Et le porte-parole du mouvement en Suisse de conclure: