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On a rencontré deux cheffes très rares en Suisse

La perfection dans la haute gastronomie a un prix: il est souvent difficile de concilier vie professionnelle et vie familiale.
La perfection dans la haute gastronomie a un prix: il est souvent difficile de concilier vie professionnelle et vie familiale.Image: Getty

On a rencontré deux cheffes très rares en Suisse

En Suisse, la dernière attribution des étoiles du guide Michelin n'a consacré que des hommes. Qu'en disent les cheffes de grandes tables en Suisse? Elles racontent.
24.10.2025, 16:4524.10.2025, 16:45
Deborah Stoffel / ch media

Au moment où le Guide Michelin a décerné ses prestigieuses étoiles, les femmes sont restées sur la touche. En tout, 18 chefs ont été récompensés en Suisse. Tous des hommes.

Michelin assure pourtant s’efforcer de promouvoir la diversité. Mais, comme dans la haute gastronomie très peu de femmes parviennent à des postes de cheffes, celles-ci restent rares à pouvoir prétendre à une étoile.

Une vie professionnelle dure à concilier

Le guide insiste néanmoins sur le fait que le talent féminin ne manque pas. Ce sont les conditions de travail qui posent problème. Les horaires sont interminables, les cadences éprouvantes, et la vie familiale difficilement conciliable avec les exigences du métier.

Ces réalités seraient, selon le Michelin, «souvent incompatibles avec la planification familiale ou les attentes sociales à l’égard des femmes». Même constat pour Urs Heller, rédacteur en chef du guide GaultMillau. Selon lui:

«Il n’y aura jamais beaucoup de femmes dans la haute gastronomie, car les horaires ne sont pas compatibles avec la vie de famille»

En revanche, il se félicite que «le ton dans les cuisines se soit heureusement beaucoup adouci ces dernières années».

Une grande cheffe raconte

Mais que disent celles qui ont réussi à gravir les sommets de la gastronomie suisse? Pour Tanja Grandits, cheffe étoilée du restaurant Stucki à Bâle, la question des femmes en cuisine l’accompagne depuis le début de sa carrière. Autrefois, elle préférait l’éviter. Elle se confie:

«Je ne voulais pas être réduite à cela»

Aujourd’hui, elle assume pleinement son rôle de modèle et le prend très au sérieux. Le week-end prochain, elle se rendra avec ses apprenties à la Female Kitchen Party de Bad Ragaz. Tanja Grandits explique:

«J’en suis ravie, c’est important de se montrer, de prendre sa place»
Tanja Grandits a été élue «Cuisinière de l'année» en 2014 et 2020. Le «GaultMillau» et le «Guide Michelin» ont attribué 19 points et deux étoiles à son restaurant.
Tanja Grandits a été élue «Cuisinière de l'année» en 2014 et 2020. Le GaultMillau et le Guide Michelin ont attribué 19 points et deux étoiles à son restaurant.Image: Keystone

Tanja Grandits explique qu’elle a eu de bonnes conditions pour réussir:

«Je n’ai jamais eu à m’imposer particulièrement, je n’ai pas été désavantagée»

Ce qui a fait la différence, selon elle, c’est «une grande confiance en soi, solide et saine». Mère d’une fille aujourd’hui adulte, la cuisinière reconnaît que la maternité et la gastronomie sont difficiles à concilier. Il n’y a, selon elle, que deux solutions, soit le partenaire prend les responsabilités domestiques, soit on se met à son compte.

Travailler à temps partiel comme cheffe dans un grand hôtel est presque impossible, dit-elle. En revanche, gérer son propre établissement offre plus de liberté pour s’organiser. Elle explique s’être «créé son petit univers» et raconte:

«Au début, j’emmenais ma fille dans la cuisine, puis j’ai engagé une jeune fille au pair»

Cette dernière est aujourd’hui son assistante. Plusieurs employés ont aussi endossé des rôles que d’ordinaire rempliraient des membres de la famille. Ils accompagnaient sa fille à des concours d’équitation ou lui ont appris à conduire. Elle se réfère à une expression familière:

«C’est ce fameux village qu’il faut pour élever un enfant»

Des enfants partout

Pour Silvia Manser, cheffe et propriétaire du restaurant Truube à Gais (AR), c’est là encore la combinaison entre indépendance et confiance en soi qui a rendu possible l’équilibre entre carrière et maternité. Elle explique:

«J’ai toujours voulu que ce que je faisais ait du sens pour moi. Ce que les autres en pensent m’importait peu. Excepté les clients. Eux, ils doivent repartir heureux.»

La cheffe a trois enfants, aujourd’hui âgés de 24, 22 et 17 ans. Elle raconte:

«Ils étaient toujours avec nous en cuisine, dans leur siège auto ou leur transat, au milieu du passage»
Le restaurant «Truube» de Silvia Manser à Gais (Appenzell Rhodes-Extérieures) a été récompensé par 17 points et une étoile au «GaultMillau» et au «Guide Michelin».
Le restaurant Truube de Silvia Manser à Gais (Appenzell Rhodes-Extérieures) a été récompensé par 17 points et une étoile au GaultMillau et au Guide Michelin.Image: Valeriano Di Domenico

Quand le service commençait, les enfants montaient à l’étage pour jouer.

«On allait jeter un œil quand on pouvait, et souvent, on restait sans voix devant le désordre qu’ils avaient mis»

Elle admet qu’en tant que femme, on a souvent le sentiment de manquer de temps pour tout, que rien n’est jamais assez.

«J’ai dû apprendre à laisser tomber ces doutes»
Silvia Manser

En contrepartie, elle a savouré chaque moment passé avec ses enfants. Ce qui l’a aidée, c’est la proximité de ses parents, et une certaine continuité entre les générations. Elle confie:

«Mes deux parents travaillaient dans le restaurant et la boucherie familiale. On a grandi dans cet univers, où le travail et la vie de famille se mêlaient naturellement.»

Le travail et la vie de famille ne faisaient qu’un.

«Après l'école primaire, les enfants descendaient en cuisine pour me raconter leur journée»

Des apprenties «formidables»

Du point de vue des perspectives, «il n’y a certainement pas d'avantages pour les femmes», estime Silvia Manser. «On est plutôt moins remarquées maintenant». Selon elle, il faut toutefois du courage, de la persévérance et une vraie présence pour s’imposer. Tanja Grandits, elle, parle des nombreux talents qu’elle a rencontrés au fil des ans:

«J’ai toujours parmi mes apprentis de jeunes femmes extraordinaires, et aussi des hommes»

L’année dernière, deux de ses apprenties ont obtenu les meilleurs résultats du canton. Elle raconte:

«Des femmes formidables, pleines de vie et de créativité. L’une est devenue directement sous-cheffe, l’autre a traversé l’Eurasie par voie terrestre et cuisine aujourd’hui dans un monastère au Japon.»

Traduit de l'allemand par Joel Espi

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