Lueurs crépusculaires jeudi matin dans ce bureau régional de la RTS. Les journalistes présents apprennent la nouvelle. L'un d'eux raconte sous couvert d’anonymat:
La nouvelle? L’annonce, présentée comme historique, de la suppression de 1000 postes au sein de l’audiovisuel public suisse d’ici à 2029. Une coupe de 17% dans les effectifs pour une économie de 270 millions de francs. A la manœuvre, façon tycoon d’un groupe automobile promis à la saignée, la directrice générale de la SSR, Susanne Wille, entrée en fonction il y a 21 jours seulement, en remplacement de Gilles Marchand.
«On a parlé des 1000 emplois supprimés à notre séance de travail du matin, avec fatalité, le moral dans les chaussettes», reprend le journaliste cité plus haut. «Après, on s'est ressaisis, on a fait des plaisanteries et on s’est dit qu’il vaudrait peut-être mieux se reconvertir dans la communication, vu les perspectives bien sombres côté journalisme.»
Alors que la presse papier traverse une crise sans précédent, l’audiovisuel public, comme à l’abri du besoin, faisait jusqu’ici figure de sanctuaire échappant aux assauts cruels de la conjoncture. Cette époque est révolue. Une première brèche dans la muraille fut ce plan d’économies pour 2025 à la RTS, dévoilé le 17 octobre: 46 postes équivalents plein-temps supprimés, 19 personnes licenciées.
Cet autre journaliste de la RTS donne trois raisons «poussant aux économies»:
Les économies se font d’ores et déjà sentir à la RTS, par petites touches plus ou moins douloureuses. «Deux personnes ont été licenciées à l’actu télé, il y a eu des changements de postes et des changements de pourcentage de travail, on a cessé de faire appel à tel loueur de voitures et rapatrié à la place des véhicules jusqu’ici à la disposition de bureaux romands», relate notre interlocuteur. Qu’en sera-t-il des 200 francs alloués aux journalistes en guise de soutien à la mobilité ferroviaire? Ils pourraient être biffés. A l’avenir, les journaux de la mi-journée de la radio et de la télé seront peut-être fusionnés pour rationaliser la gestion du personnel.
Notre interlocuteur reprend: «Les coups de boutoir que sont les initiatives hostiles ou méfiantes envers le service public – "No Billag", rejetée en 2018, celle sur la redevance à 200 francs, qui sera soumise au peuple en 2026 – nous ont fragilisés. Les politiques nous attaquent de plus en plus, avec le reproche d’être trop à gauche.» La RTS – pour rester chez les Romands – est devenue un punching-ball.
Le collègue du bureau régional avait voulu croire en l’exception du service public:
Cet autre journaliste basé à Genève «[s]’étonne» de l’annonce fracassante de la directrice générale de la SSR.
Le journaliste du bureau régional de la RTS compare les manœuvres de la SSR à des figures aériennes: