Le ministre, le maire, le conseiller aux Etats. Trois élus jurassiens unissent leurs forces pour sauver la ligne ferroviaire Bienne-Belfort TGV. Ils poseront les bases de leur action commune jeudi matin à Porrentruy, en Ajoie, a appris watson. David Eray, ministre de l’environnement, en charge des transports, Philippe Eggertswyler, maire de Porrentruy, et Charles Juillard, membre de la Chambre haute à Berne, vont tenter d’empêcher la disparition de cette liaison transfrontalière chère au canton du Jura.
Début août, la région Bourgogne-Franche-Comté provoquait la consternation en annonçant qu'à partir de décembre 2025, le train CFF qui relie le chef-lieu seelandais à la gare TGV de Belfort, en passant par Delémont et Porrentruy, n'irait pas plus loin que Delle, petite localité située à la frontière française.
Inaugurée en 2018 après 26 ans de fermeture, la réouverture de cette ligne (du tronçon manquant entre Delle et Belfort) avait été accueillie avec joie par les Jurassiens, jamais aussi proches de Paris. Economiquement, tout un canton, l’Ajoie, surtout, le district jurassien le plus éloigné du Plateau suisse, entendait tirer profit de ce raccordement au réseau européen des trains à grande vitesse.
En décidant unilatéralement de stopper le Bienne-Belfort à Delle, la partie française ôte à cette liaison tout son intérêt. A l’avenir, il faudra changer de train à la frontière française pour atteindre Belfort TGV, mais encore faudra-t-il qu'il y ait des correspondances.
Joint mi-août par watson, Michel Neugnot, en charge des mobilités à la région Bourgogne-Franche-Comté, faisait valoir un prêté pour un rendu: la partie suisse a en effet décidé qu’à compter de fin 2025 également, toutes les liaisons partant de Bienne pour le Jura auraient Bâle pour destination, obligeant les voyageurs biennois en route pour Belfort TGV à changer de train à Delémont, le chef-lieu jurassien. Par ailleurs, Michel Neugnot se disait déçu du nombre réduit de voyageurs suisses empruntant le Bienne-Belfort TGV sur le tronçon français et semblait à présent plus attiré par l’intermodalité, soit la combinaison du train, du bus et du covoiturage.
C'est un fait: le succès n'est pas au rendez-vous sur la partie française. Là-dessus, Suisses et Français sont d’accord. Sauf que les premiers avaient un plan pour y remédier, appelé Convergence 2026, rejeté par la région Bourgogne-Franche-Comté.
Le Jura ne veut pas croire que tout est fini.
Conscient des insuffisances de l’offre actuelle, le maire ajoulot aimerait que les CFF introduisent des directs entre Delémont et Porrentruy, qui poursuivraient ensuite leur route vers la gare TGV belfortaine. Actuellement, tous les Bienne-Belfort TGV sont omnibus à partir de Delémont, rallongeant le temps de trajet. «Des directs rendraient l'offre internationale plus attractive», estime Philippe Eggertswyler.
«C’est une piste qu'il faut étudier», admet le conseiller aux Etats Charles Juillard. Le canton du Jura privilégie pour l’heure l’horaire cadencé à la demi-heure, avec des trains qui s’arrêtent à toutes les gares. Le ministre David Eray n’en est pas moins attaché au maintien de la liaison CFF jusqu’à Belfort TGV. C’est David Asseo, le délégué cantonal aux transports, qui le représentera à la réunion préparatoire de jeudi dans le chef-lieu ajoulot.
Charles Juillard révèle:
Le sénateur jurassien, pour qui la décision prise par la région Bourgogne-Franche-Comté contrevient probablement à l'accord international qui avait été signé, espère pouvoir gagner à sa cause le maire de Belfort, Damien Meslot. Il a déjà avec lui le sénateur du Territoire de Belfort, Cédric Perrin, du parti Les Républicains, qui avait travaillé avec le ministre jurassien David Eray à la réouverture de la ligne franco-suisse.
Le sénateur du Territoire de Belfort l'assure:
C’est tout un lobbying pour le sauvetage de la ligne Bienne-Belfort qui devrait prochainement se mettre en place. L'idéal serait que la cause parvienne aux oreilles d’Emmanuel Macron, qui sera en visite officielle en Suisse les 15 et 16 novembre. «Pourquoi pas, mais d’ici là, il faudra que nous ayons quelque chose de concret à proposer», prévient Charles Juillard, qui, ce peut être un atout, préside la délégation des Chambres fédérales pour les relations avec le parlement français. De son côté, le sénateur Cédric Perrin compte bien se faire élire, en septembre, président du groupe d’amitié France-Suisse du Sénat.
L’alignement des rails, ça compte.