Nemo représenté sur une image à côté du terroriste afghan qui a tué un policier et blessé cinq autres personnes vendredi dernier à Mannheim. Ce montage est l’œuvre des jeunes UDC de Suisse alémanique. La juxtaposition entre l'artiste et un islamiste meurtrier scandalise outre-Sarine.
A l’origine, il s’agit d’une campagne lancée début mai par la jeunesse UDC alémanique pour dénoncer «l’antisémitisme islamiste et woke».
Les Jeunes UDC avaient l'intention de placarder des affiches représentant des personnages typés terroristes ou wokes à proximité des universités. La Ville de Bâle a refusé cet affichage, jugé «discriminatoire», sur son territoire. Sur ce, les jeunes UDC ont conçu un visuel destiné à leurs réseaux sociaux. Un visuel qui réunit donc le tueur de Mannheim et l'artiste ayant remporté l’Eurovision – Nemo, qui se définit comme non-binaire, souhaite l'inscription dans la loi d'un troisième sexe, ou troisième genre, une revendication combattue par l'UDC.
Est-on bien sûr de comprendre l'image décriée? Le meurtrier, couteau en main, veut-il tuer Nemo? Non, ce qu’il faut comprendre, c’est que Nemo «le woke», comme l’islamiste armé, menacent «notre liberté», clame la jeunesse UDC, dans la veine des campagnes trash du parti lors des élections fédérales de l’année dernière.👇
Sur X (ex-Twitter), le communicant suisse alémanique Marko Kovic ne cache pas son dégoût:
Die Junge SVP setzt Nemo mit einem islamistischen Terroristen gleich. Beide seien ein "Angriff auf unsere Freiheit".
— Marko Kovic (@marko_kovic) June 1, 2024
Irgendwann muss es doch einfach genug sein. Gibt es in dieser Gruppierungen wirklich absolut niemanden mit einem Minimum an Anstand und Menschlichkeit? pic.twitter.com/o17g9tssZz
Le mot «antisémitisme» ne figure pas sur le visuel montrant Nemo dans son habit de scène, mais il s’inscrit dans la continuité de la campagne de la jeunesse UDC contre l’«antisémitisme» initiée début mai. Joint par watson, un ancien président des Jeunes UDC alémaniques ne souhaite pas s’exprimer sur cette stigmatisation, manifeste, de Nemo. Il dit soutenir le droit à la liberté d’expression, mais on le sent mal à l’aise. Cette femme, membre de l'UDC alémanique, est plus loquace. Elle ne cautionne pas la démarche des Jeunes UDC:
Nemo «antisémite»? «Selon des médias, à Malmö, lors de l'Eurovision, Nemo n'a pas voulu entrer en contact avec la chanteuse qui représentait Israël. Nous espérons sincèrement que cela n'a pas été le cas et que si cela a été le cas, ce n'est pas pour des raisons politiques», répond Naemi Dimmeler, la présidente des Jeunes UDC zurichois.
La jeunesse socialiste est scandalisée. Joint par watson, son vice-secrétaire central, Lucien Schwed réagit:
Il poursuit: «L’engagement de Nemo est pour la liberté et les valeurs démocratiques. Ce qu’ont fait là les jeunes UDC est grave et mérite toute l’attention.»
La Jeunesse socialiste pourrait-elle dénoncer pénalement le cas? «Il est regrettable que la majorité du Parlement n’ait pas voulu inscrire les discriminations de genre dans la loi punissant le racisme et l’homophobie», répond Lucien Schwed. «Nous appelons les partis bourgeois à prendre leurs distances avec l’UDC qui tolère les liens de sa branche jeunesse avec la pire extrême droite», ajoute le vice-secrétaire central des Jeunes socialistes suisses.
Plus que toute discrimination liée au genre, c’est peut-être l’honneur de Nemo qui est en cause dans ce visuel. Cela se punit en droit.
Les Jeunes UDC, eux, restent droit dans leurs bottes:
C'est avec beaucoup de sagesse que le père de Nemo, Markus Mettler, joint par watson, réagit à cette polémique: