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Cet UDC ne veut plus de Lausane comme capitale vaudoise

A bus of Transport Publics Lausannois TL crosses Grand Point bridge in front of Notre-Dame cathedral in Lausanne in the canton of Vaud, Switzerland, pictured on November 27, 2007. (KEYSTONE/Laurent Gi ...
Lausanne et sa cathédrale. Lausanne, 2007.Image: KEYSTONE

Cet UDC ne veut plus de Lausanne comme capitale vaudoise

Une vingtaine de députés vaudois emmenés par l'UDC Fabrice Moscheni propose une modification de la constitution cantonale pour instaurer le principe d'une capitale itinérante. Est-ce bien sérieux? On a vérifié.
08.04.2025, 16:0008.04.2025, 18:53
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Non, ce n’est pas un poisson d’avril, même si le texte dont on va parler date du premier du mois. Le 1er avril, donc, vingt-trois députés du Grand Conseil vaudois – il en fallait au moins vingt – ont cosigné une motion rédigée par leur collègue UDC Fabrice Moscheni. Cette motion porte sur une modification de l’article 4 de la Constitution vaudoise, qui dit en l’état que «Lausanne est la capitale du canton».

Changement de capitale tous les dix ans

Les motionnaires, 11 UDC, 9 PLR et 3 Vert’libéraux, souhaitent instaurer le principe d’une capitale cantonale itinérante. La Constitution vaudoise serait modifiée comme suit:

«La Capitale est déterminée pour une durée de 10 ans qui débute le 1er janvier. Elle est le chef-lieu d’un district du territoire cantonal. Le changement de Capitale s’opère selon l’ordre alphabétique des districts vaudois (réd: le canton de Vaud compte 10 districts).»
Texte de la motion

Mais pourquoi ce changement? Le texte de la motion répond en partie à cette question.

«Afin de rendre la Capitale plus proche de la population vaudoise, cette initiative propose de permettre à chaque district de notre Canton de recevoir à tour de rôle la Capitale de notre Canton. Cela permettra non seulement de vivifier notre Canton en rapprochant le pouvoir de toutes les régions de notre Canton, mais cela donnera également l’opportunité d’avoir une grande fête populaire mettant en valeur le district accueillant la Capitale à l’occasion de chaque changement de Capitale.»
Texte de la motion

L’auteur de la motion, Fabrice Moscheni, un député de Lausanne, originaire de Sainte-Croix, région périphérique s’il en est, entend «revivifier les liens d’appartenance unissant les Vaudois en redonnant du lustre à cet actif, à ce bijou qu’est la capitale cantonale». Le député dresse un parallèle avec un événement des plus festifs:

«On se retrouve tous les vingt-cinq ans à Vevey autour de la Fête des vignerons, là, ce serait tous les dix ans, autour de la belle notion de capitale, passant d’un district à l’autre»
Fabrice Moscheni, député UDC VD

Le titre de capitale est «purement honorifique dans la Constitution vaudoise», affirme Fabrice Moscheni. «Il est indépendant de la localisation des institutions et administrations cantonales», assure-t-il.

«Il y a une défiance envers Lausanne»

Cette motion a tout du coup de pied à l’âne. Elle pourrait s’intituler: Lausanne, qu’as-tu fait de ton rang de capitale? L’appartenance partisane des signataires montre assez la lassitude – les méchantes langues diraient le seum – du camp bourgeois face à la gauche presque partout majoritaire dans les grandes villes. Devenue citadelle imprenable pour la droite, Lausanne, à gauche depuis 1990 et comme pour l’éternité, ne serait plus représentative de tous les Vaudois.

«Il y a une défiance envers Lausanne, vue comme un endroit de plus en plus détaché de l’arrière-pays. Elle n’a plus le lustre d’antan. Elle a perdu son côté unificateur. Elle travaille pour ses habitants, pour sa clientèle, en quelque sorte», estime Fabrice Moscheni.

Le député UDC enfonce le clou:

«Dans une capitale, il y a un côté primus inter pares, autour duquel la patrie se retrouve, or tout cela ne semble pas ou ne semble plus vraiment intéresser la gauche et sa vision égalitaire en tout»
Fabrice Moscheni

Lausanne n’est plus «la paysanne qui a fait ses humanités», elle a été remplacée par Lausanne la multiculturelle, notait Le Temps en 2008. Agriculteur à Granges-près-Marnand dans le district de la Broye-Vully, le député PLR Bernard Nicod, un homonyme «sans liens de famille» du célèbre promoteur immobilier, a signé la motion en faveur de la capitale tournante.

«Souvent, nous, les campagnards, on se sent peu accueillis en ville par les urbains»
Bernard Nicod, député PLR VD

Le député PLR ajoute: «Lausanne nous reproche de lui envoyer les gens qui ont des addictions et nous reproche aussi de venir en voiture, mais, selon où on habite, on n’a pas toujours accès facilement aux transports publics.»

Le nostalgie du Comptoir suisse

Bernard Nicod a comme la nostalgie du Comptoir suisse (1920-1928), qui se tenait tous les ans au Palais de Beaulieu, à Lausanne. «Etaient réunies la modernité et la tradition. C’est là qu’on venait acheter le grand électro-ménager», rappelle-t-il. Mais le député PLR n’en a pas qu’après Lausanne. Il le reconnaît :

«Les liens distendus entre les Vaudois, c’est aussi un peu de notre faute, à nous qui habitons les régions rurales. Les centres commerciaux dans nos campagnes n’ont pas fait du bien à l’activité commerciale des petites villes. Il reste heureusement les fêtes, où l’on a plaisir à se retrouver une fois par an.»
Bernard Nicod, député PLR VD

Les carnavals remplissent entre autres cet office, comme les Brandons de Payerne, dont on parle beaucoup en ce moment pour ses tags lors de la dernière édition.

«J’ai cru à un poisson d’avril»

«Quand j’ai vu cette motion, j’ai cru à un poisson d’avril», réagit le Lausannois Julien Eggenberger, député socialiste au Grand Conseil.

«Une capitale, c’est le lieu où se trouvent le gouvernement et le parlement. On ne va pas déménager ces institutions tous les dix ans, cela occasionnerait un coût considérable pour les contribuables.»
Julien Eggenberger, député PS VD

Justement, la motion ne prévoit pas de délocaliser les institutions au gré des changements de capitale. Julien Eggenberger veut bien l’entendre, mais cette motion n’en reste pas moins étrange à ses yeux.

«Une capitale, ce n'est pas quelque chose de symbolique. Une capitale s'incarne dans des institutions»
Julien Eggenberger, député PS VD

«Comme il s’agit d’une proposition de modification de la constitution, le dernier mot reviendrait au peuple le cas échéant», note encore Julien Eggenberger. Dans l’immédiat, la motion en forme de vrai-faux ou faux-vrai poisson d'avril sera peut-être traitée avant l'été encore en commission du Grand Conseil, qui décidera de lui donner ou non une suite.

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