
Témoignages d'habitants de la région au lendemain de la prise d'otages dans un train à la hauteur d'Essert-sous-Champvent.Image: keystone / watson
C'est une scène surréaliste et rarissime qui s'est déroulée dans un train jeudi soir dans le Nord vaudois. Les habitants se disent stupéfaits, certains sont effrayés à l'idée qu'un tel événement puisse se reproduire. «Une prise d'otages? On ne voit ça que dans les films!»
09.02.2024, 17:0010.02.2024, 09:25
Au lendemain de la prise d'otages dans un train reliant Sainte-Croix à Yverdon-les-Bains, c'est la consternation dans la cité thermale du Nord vaudois. Il faut dire que les prises d'otages sont rarissimes en Suisse, la stupeur en est d'autant plus grande. Sur le quai du train Travys, quelques passagers rencontrés ce vendredi à la mi-journée se disent effarés.
Une jeune utilisatrice de ce train, qui l'emprunte pour descendre à Yverdon où elle est en apprentissage, nous dit avoir été un peu moins tranquille que d'habitude en montant dans la rame ce matin.
«Je sais qu'il [le preneur d'otage] a été abattu, mais ce matin, je n'arrivais pas à somnoler avec ma musique comme je le fais normalement»
Une habituée du train
Son amie, qui vit à Vuitebœuf, acquiesce. «J'avais congé hier, tant mieux, sinon j'aurais peut-être pris ce train...»
Elles ne sont pas les seules à se dire perturbées par les récents événements. Interrogés, deux employés de la compagnie de transport rencontrés à la gare nous renvoient vers le secrétariat. L'un d'eux lâche tout de même d'un ton hésitant que «ça ne laisse pas indifférent». Les visages sont fermés, la journée est encore longue.
«Il ne faut pas se laisser avoir par la peur»
Certains passagers sont en revanche plus détendus. «C'est un cas isolé, l'histoire est terminée, l'auteur a été tué, les otages sont sains et saufs. Il ne faut pas se laisser avoir par la peur!», lâche un homme d'une cinquantaine d'années qui s'apprête à monter dans le train. «Oui, mais...», lui rétorque un autre voyageur, qui espère que ce cas isolé n'en inspirera pas d'autres.
«C'est quelque chose qu'on voit d'habitude dans les films ou à l'étranger, dans de grandes villes, pas ici! J'espère que ça ne donnera pas des idées à d'autres... En tout cas, bravo à la police et courage aux otages, quel traumatisme! Même s'ils n'ont pas été blessés physiquement, il y a aussi les blessures psychologiques...»
Un voyageur
Une trentenaire travaillant dans le tourisme dans la région s'inquiète des éventuelles conséquences pour la fréquentation du Carnaval de Sainte-Croix, qui démarre ce vendredi soir.
Elle espère que les fêtards seront tout de même au rendez-vous, mais comprend que certains pourraient ne pas se sentir aussi à l'aise que d'habitude à l'idée de devoir monter en train au vu des événements de la soirée précédente.
«Disons que ce n'est pas hyper rassurant, même si ça reste des cas isolés, ça je pense que les gens en sont conscients. C’est peut-être surtout ça qui touche les gens, de se dire que ça arrive dans un train local à mon avis...»
Une trentenaire travaillant dans le tourisme.
Elle, en tout cas, continuera d'emprunter cette ligne ferroviaire.
«Prenant ce train assez régulièrement, je ne m’y suis jamais sentie en insécurité, à n'importe quelle heure de la journée ou du soir»
Une trentenaire travaillant dans le tourisme.

Des agents de la police cantonale vaudoise surveillent le train Travys où une prise d'otages a eu lieu à la gare d'Essert-sous-Champvent au soir du jeudi 8 février 2024.Keystone
«Les otages ont attendu presque 4 heures!»
Si certains habitants du Nord vaudois rencontrés tiennent à saluer le travail de la police, qui a donné l'assaut vers 22 heures 15, d'autres critiquent la lenteur de l'intervention. Il s'est écoulé près de quatre heures d'attente entre le début de la prise d'otages, dont certains étaient ligotés, et l'assaut de la police à la hauteur de la gare d'Essert-sous-Champvent.
«Vous vous rendez compte?! La police était là, ils ont fait venir un traducteur, mais pourquoi ils ont perdu autant de temps à papoter? C'est monstrueux pour les otages, chaque seconde est une seconde de trop, ils vont garder ce traumatisme à vie!»
Une habitante de Sainte-Croix.
Les otages ont été auditionnés durant la nuit, soutenus par des psychologues. Ils étaient quatorze, ainsi que le conducteur du train. L'un des passagers a pu filmer l'assaillant, armé d'une hache et d'un couteau.
Les passagers du train n'ont pas été blessés, le preneur d'otages, un requérant d'asile iranien de 32 ans, a été touché par un tir mortel de la police. «J'espère en tout cas que cet événement ne va pas raviver la haine et la peur envers les requérants d'asile», soupire une Yverdonnoise d'une soixantaine d'années.
«On a tendance à mettre tout le monde dans le même sac. J'ai lu tellement de commentaires racistes sur les réseaux sociaux ce matin déjà, ça me désole...»
Une Yverdonnoise d'une soixantaine d'années.
Pourquoi les otages ont-ils dû attendre quatre heures avant l'intervention de la police?
C'est une question qui peut tarauder les otages et leurs familles, qui attendent dans l'angoisse d'être libérés. A ce sujet, Jean-Christophe Sauterel, chef communication et prévention à la Police cantonale vaudoise, a donné quelques explications ce vendredi matin dans La Matinale de la RTS:
«C'est une situation où la police doit prendre du temps pour intervenir, il n'y a pas de nécessité d'intervenir immédiatement tant que les otages ne sont pas en danger. Tout le dispositif était là, avec les groupes d'intervention, les tireurs d'élite, de manière à pouvoir en tout temps garantir la sécurité des otages.»
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