Publiés ce mardi, les principaux chiffres clés de la nouvelle statistique de l'AVS sont trompeurs, car l'organe de prévoyance affiche en réalité un résultat positif. En 2024, l'AVS a enregistré un bénéfice de 5,6 milliards de francs, battant ainsi le résultat de l'année précédente, où elle avait réalisé un bénéfice de 2,9 milliards de francs.
Ce résultat positif a été possible uniquement grâce à des rentrées supplémentaires dans les caisses. Les cotisations salariales et la TVA ont été augmentées en 2020, ce qui fait que l'AVS a encaissé au total 53,7 milliards de francs l'année dernière.
Les recettes ont ainsi dépassé les dépenses, soit 50,9 milliards de francs. L'année boursière positive a permis à l'AVS de réaliser des bénéfices sur des placements, à hauteur de 2,8 milliards de francs.
En Suisse, presque trois millions de personnes touchaient une rente de l'AVS en 2024. Comme le révèlent les statistiques de la Confédération, la majorité d'entre elles (91%) recevaient une rente de vieillesse.
Au total, l'AVS a distribué des prestations pour un montant de près de 50 milliards de francs, soit 2% de plus que l'année précédente. Quelque 47,1 milliards de francs ont été versés en rentes de vieillesse, 275 millions de francs en rentes complémentaires pour enfants et conjoints, ainsi que 2,1 milliards de francs pour les veuves et les orphelins.
En moyenne, la rente de vieillesse s'élève à 1915 francs par mois et par personne. C'est légèrement plus que l'année précédente, et lié à l'adaptation de l'indice mixte.
Le montant varie en fonction du lieu de résidence, mais les citoyens helvétiques touchent une retraite de 1964 francs, tandis que pour les personnes étrangères, ce montant descend à 1505 francs.
L'écart est encore plus important pour les retraités vivant à l'étranger, qui représentent environ 15% des sommes versées. Alors que les ressortissants suisses touchent en moyenne 1249 francs par mois, les étrangers n'ont droit qu'à 558 francs mensuellement en moyenne.
Cette différence trouve son origine principalement dans le durée de la cotisation, qui peut s'avérer nettement plus courte pour les étrangers. Seuls 7% d'entre eux ont droit à une rente complète. Pour les Suisses, ce chiffre est de 82%.
Les sommes touchées entre les hommes et les femmes varient très peu. Ces dernières touchent en moyenne 17 francs de plus par mois, alors que les hommes contribuent pour près de deux tiers, soit 65%, au financement de l'AVS via les cotisations salariales. Les hommes ne touchent finalement que 46% du montant total des rentes.
Ce sont là, notamment, les effets des bonifications pour tâches d'assistance et la répartition financière entre les époux qui compensent leur revenu en moyenne plus faible. De plus, les femmes vivent en moyenne plus longtemps, ce qui fait que mécaniquement, elles touchent plus de rentes.
En fonction de l'état civil et de la temporalité, les rentes vont varier fortement. Voilà qui devrait encore alimenter les discussions à venir sur l'augmentation des retraites.
Les montants des rentes en fonction de l'état civil sont intéressants. En effet, on constate deux effets qui promettent d'être importants dans la discussion à venir sur une nouvelle extension des rentes.
Lorsque le membre d'un couple marié part à la retraite, les différences entre les revenus des hommes et des femmes sont importantes. Une femme touche ainsi en moyenne 1572 par mois, tandis qu'un homme, 2025 francs. Dès que le deuxième conjoint a, lui aussi, droit à la retraite, les rentes sont réparties de telle sorte que la différence est effacée. Chacun des conjoints touche ainsi 1700 francs par mois en moyenne.
Et là, on assiste à un deuxième effet. A deux, les couples mariés percevaient jusqu'à une fois et demie le montant maximal fixé pour les rentes AVS. C'est pourquoi, en 2024, la rente de 381 000 couples mariés, soit 88% d'entre eux, a été plafonnée.
En ce moment, les élus placent beaucoup d'espoirs dans la flexibilité du versement des retraites. En fonction de leurs besoins, les personnes peuvent décider de travailler plus longtemps ou de partir en retraite anticipée.
Avec la dernière révision de l'AVS, le Parlement a voulu favoriser encore plus cette flexibilité, en permettant un versement partiel de la retraite, ainsi qu'un versement anticipé mensuel.
Une retraite anticipée a beau entraîner une réduction de la rente de 6,8% par année d'anticipation, celle-ci est en augmentation chez les hommes. Dans la dernière classe d'âge, 8100 hommes, soit 12% d'entre eux, ont opté pour cette solution.
Chez les femmes, la tendance est inversée. Mais durant des années, le taux de retraites anticipées a été nettement plus élevé que chez les hommes. Désormais, en raison de l'augmentation de l'âge de la retraite, les femmes bénéficient d'un taux plus favorable pour une retraite anticipée. En 2024, 10% d'entre elles, soit 6400 personnes, ont opté pour une retraite anticipée.
De leur côté, ceux qui travaillent plus longtemps sont favorisés. Durant 5 ans au maximum, un ajournement de la retraite est possible, et peut augmenter le revenu de 5,2 à 31,5% au maximum. Peu de gens ont toutefois recours à cette option: 2,5% chez les hommes et 2,9% chez les femmes, ce qui représente respectivement 1600 et 1800 personnes l'année dernière.
Le nombre de personnes à la retraite montre à lui seul combien il est difficile de faire des prévisions lorsque cela touche l'AVS. En 2024, 145 600 nouveaux retraités sont venus s'ajouter au contingent. En parallèle, 105 700 rentes ont pris fin à la suite de décès ou de fins de droit. En chiffres net, l'augmentation s'élève donc à 38 400 nouvelles rentes.
La tendance montre donc qu'il faudra verser nettement plus de rentes. Et leur total augmentera encore de façon conséquente à partir de 2026, en raison du premier versement de la 13e rente AVS. Dès cette année, le résultat de répartition devient clairement négatif, et il manquera plus d'un demi-milliard de francs dans les caisses de l'AVS. D'ici 2030, le trou devrait s'élever à 6 milliards par an.
Traduit de l'allemand par Joel Espi