Ce film avec DiCaprio est une véritable bombe
One Battle After Another, de son titre original, a conquis la critique outre-Atlantique et séduit des maîtres du cinéma tels que Martin Scorsese, qui qualifie le film de fascinant, ou encore Steven Spielberg, qui l’aurait vu trois fois, évoquant une œuvre proche du Docteur Folamour (1964) de Stanley Kubrick.
Derrière ce film on ne peut plus américain, on retrouve Paul Thomas Anderson, ou PTA pour les intimes, une figure incontournable du cinéma hollywoodien. Cinéaste doublé d'un auteur, il est l'un des rares à nous livrer des films indépendants dans des écrins luxueux, que ce soit par la qualité de ses interprètes que par sa mise en scène. Un réalisateur qui se réinvente à chaque long-métrage et à qui l'ont doit des films «parfaits» tels que Magnolia (1999), ou encore There Will Blood (2007) et il se pourrait bien que Une bataille après l’autre, son dixième film, soit fait du même bois.
Librement adapté du roman Vineland (1990) de Thomas Pynchon, Une bataille après l’autre met en scène Leonardo DiCaprio dans le rôle d’un ancien révolutionnaire antifasciste vieillissant, qui doit protéger sa fille adolescente lorsque, 16 ans après sa naissance, un ancien ennemi refait surface pour les traquer. A la fin des années 2000, Bob (DiCaprio) appartenait au groupe révolutionnaire des French 75 aux côtés de sa compagne Perfidia Beverly Hills (Teyana Taylor). Après avoir mené une action pour libérer des migrants d’un camp de détention dirigé par le colonel Steven J. Lockjaw (Sean Penn), ce dernier va remuer ciel et terre pour retrouver leurs traces.
Du roman, le réalisateur prend des libertés en transposant l’histoire dans un contexte évoquant la politique migratoire imposée par Donald Trump, où les agents du Service de l’immigration (ICE) traquent les clandestins. Devant sa caméra, des acteurs d’exception: aux côtés de Leonardo DiCaprio, on retrouve Sean Penn, Benicio del Toro, ainsi que la grande révélation du film, Chase Infiniti, qui brille dans le rôle de Willa, une adolescente débrouillarde.
The Big Lebowski chez les MAGA
Paul Thomas Anderson est associé à une génération de cinéastes apparus dans les années 1990, dont l’audace a fait la différence aux côtés de Steven Soderbergh, Quentin Tarantino, James Gray ou David Fincher. Dans ses œuvres, aussi variées soient-elles, le cinéaste de 55 ans explore souvent des drames psychologiques, mettant en scène des personnages imparfaits et des familles dysfonctionnelles, à travers des thèmes de solitude et de rédemption.
Et ce sont bien ces thématiques que l’on retrouve dans Une bataille après l’autre. Dans le rôle de Bob, cet ancien « antifa », comme le qualifiera la droite MAGA, Leonardo DiCaprio incarne un être paranoïaque et craintif, épris d’alcool et de fumette, dont le quotidien de « vivons cachés, vivons heureux» est soudainement bouleversé. Mais ce léger synopsis n’est que l’arbre qui cache la forêt, puisque le film, d’une densité folle avec ses 2h50 de durée, se révèle être un western baignant dans une aura politique dystopique, à la croisée des genres, entre comédie et thriller.
Ainsi, le personnage de Bob, qui n'est pas sans rappeler celui du «Duc» campé par Jeff Bridges de The Big Lebowski (1998) s'avère véritablement un parti pris comique par sa maladresse et son look. Un personnage drôle malgré lui plongé dans une intrigue dans laquelle se mêlent drame familial, fusillades et courses-poursuites entre une rébellion et une milice fasciste dirigée par une mystérieuse organisation suprémaciste, le tout aggloméré dans une histoire captivante du début à la fin.
Un film révolutionnaire
Le cinéma a toujours été un médium qui se veut le reflet de son époque. Avec son dixième long-métrage, Paul Thomas Anderson prend le pouls de la société américaine pour dresser un constat cynique: ce n’est pas une dystopie, c’est bien ce que sont devenus les Etats-Unis.
Cette comédie absurde, pourtant prise très au sérieux, se révèle être ce que le cinéma américain peut offrir de meilleur: une œuvre cathartique menée tambour battant et sublimée par la virtuosité de la mise en scène. Divisée en deux parties, comme deux films en un, on sort d’Une bataille après l’autre avec la satisfaction d’avoir vu une œuvre majeure. Un film manifeste et optimiste, dont on ne peut qu’espérer qu’il résonne dans cette Amérique divisée. Les autocrates, eux, passeront leur chemin, ratant assurément l’un des meilleurs films de l’année.
«Une bataille après l'autre» de Paul Thomas Anderson sort au cinéma le 24 septembre 2025. Durée: 2h 50m