La suite de «Kaamelott» est une cacophonie sans nom
Souvenez-vous, Kaamelott : Premier Volet était sorti durant l’été 2021, en pleine désertion des salles de cinéma due à la pandémie de Covid-19. Malgré ce contexte difficile, le film a réuni plus de deux millions de spectateurs, un véritable succès. Pourtant, si le long-métrage reste cher au cœur des fans, pour le spectateur lambda, il en demeure un vague souvenir, celui d’un film relançant la série culte éponyme dont le souvenir est encore plus lointain, puisqu'elle s'est achevée en 2009.
Démarrée en 2005 et pensée initialement comme un programme télévisé court de trois minutes, surfant sur le succès de séries à sketches comme Caméra Café, Kaamelott n’a cessé de s’allonger au fil des saisons. L’humour potache des débuts a peu à peu laissé place à une épopée chevaleresque plus dramatique, avec des épisodes d’une quarantaine de minutes, où l’on découvre un roi Arthur (Alexandre Astier) dépressif et trahi par son fidèle chevalier Lancelot (Thomas Cousseau). La rigolade, elle, demeure assurée par la bande de pieds nickelés gravitant autour du roi.
Pendant ce temps, au royaume de Logres
Si cette première partie du second volet sort quatre ans après le film qui introduisait l’univers de la série au cinéma, seulement six mois se sont écoulés dans l’histoire depuis l’affrontement entre Arthur et Lancelot. Un combat qui a réduit le château de Kaamelott en cendres et mis fin à une décennie de tyrannie.
Pourtant, le roi Pendragon n’a pas le cœur aux responsabilités. Il préfère vivre reclus chez ses beaux-parents, quitte à replanter Excalibur dans son rocher. Mais avoir laissé la vie sauve à Lancelot, désormais reclus dans des ruines, n’a pas plu aux dieux. Leur courroux oblige alors Arthur à reprendre son rôle et à présider une nouvelle Table Ronde.
Autour de cette Table ronde fraîchement inaugurée, nouveaux et anciens chevaliers vont forcément devoir prouver leur valeur, comme dans tout bon récit chevaleresque, et c'est à partir de là que le scénario va se scinder en intrigues multiples, suivant les fresques de chacun des groupes partis à l'aventure aux quatre coins du Monde, des Marais Orcaniens aux terres glacées du Dragon Opalescent.
Un film n'est pas une série
Si Alexandre Astier a choisi de couper son film en deux parties, c’est qu’il avait beaucoup de choses à raconter. D’abord parce qu’il faut bien diriger tous ses amis à qui il a offert un rôle, mais surtout parce que l’essence de Kaamelott, c’est avant tout ses dialogues. Et des dialogues, il y en a... tout le temps, parfois même un peu trop. Ajoutez à cela que la plupart des personnages hurlent leurs répliques en s'engueulant, et vous obtenez deux heures d’une lourdeur presque pachydermique.
Parmi la pléthore de nouveaux personnages (85 comédiens ont participé au tournage), on retrouve de nombreux visages connus, comme les humoristes Thomas VDB, Haroun, Redouane Bougheraba ou encore Moguiz. En revanche, l’absence de Perceval se fait cruellement ressentir, bien que le personnage soit mentionné à plusieurs reprises.
L’acteur Franck Pitiot a en effet décliné le rôle pour ce second volet, estimant ne plus se reconnaître dans le personnage tel qu’Alexandre Astier l’avait réécrit. Le film aurait sans doute gagné à se concentrer sur cette nouvelle génération de chevaliers, quitte à faire revenir les anciens dans la deuxième partie. Ce film choral nous aurait ainsi évité l'impression de subir une cacophonie.
De plus, le long métrage, qui s’inscrit dans une intrigue beaucoup plus vaste s’étalant sur trois (que dis-je, quatre!) volets, donne parfois l’impression qu’il faut raccrocher les wagons d’un train qui ne semble aller nulle part, ou du moins, qui s’arrête là où on ne s’y attend pas. En résulte un sentiment de frustration, celui d’avoir passé deux heures devant une longue exposition, comme si l’on avait bingé deux épisodes d’une série dont il faudra attendre la suite pendant un an.
Un format qui ne dérangerait pas sur un canapé, mais qui fait un peu grincer des dents lorsqu’il faut payer un ticket de cinéma pour découvrir un film qui ne se suffit aucunement à lui-même et dont la suite est prévue pour le 11 novembre 2026.
La fantasy à la française
Tout n’est pas à jeter dans Kaamelott: Deuxième volet, partie 1. Les fans de la plume d’Alexandre Astier seront évidemment ravis de retrouver son univers si singulier. Et si la fantasy médiévale reste un genre quasi inexistant dans le paysage cinématographique français, les amateurs de mythes et de légendes auront de quoi se satisfaire: le film offre des paysages naturels magnifiques, allant de Malte à l’Islande, en passant bien sûr par la France.
De plus, cette suite assume pleinement son virage vers le fantastique, laissant davantage de place à la magie et aux créatures mythologiques avec des effets spéciaux très réussis.
La série, par manque de moyens, laissant souvent la place aux aventures épiques hors champs, se focalisant sur des plans fixes et des dialogues incisifs les relatant.
Avec ses grandes ambitions cinématographiques, le film part pour l'aventure aux quatre coins du monde et on éprouve une certaine satisfaction devant ce Game of Thrones franchouillard, malgré une direction artistique plus que discutable, puisque les costumes y sont abominables (ce qui était déjà le cas dans le premier volet). Un choix assumé qui n'est pas sans rappeler Sacré Graal! (1975) des Monty Python.
Malheureusement, l’aventure — la vraie, avec un grand A — ne reste qu’une promesse à venir, puisque cette première partie s’avère n’être qu’une carotte au bout d’un bâton, laissant le spectateur terriblement sur sa faim. Pas sûr, donc, que tout le monde soit encore au rendez-vous dans un an.


