Il se tramait quelque chose dimanche soir, dans les rues de Downtown Miami. Pas seulement des trombes d'eau annonciatrices de l’ouragan Milton, qui s’apprête à déferler sur la Floride. Plutôt un déluge de mini-jupes à paillettes et de perruques fuchsia qui s’est abattu sur le Kaseya Center, un gros bébé de béton abritant près de 20 000 places assises.
Il est 20 heures. L’ambiance est au bling et à l'euphorie. Les looks des fans, prêts à se dévergonder à coups de flows méchants, de «bitch!» à tout-va et de twerks fracassants dans les tribunes, sont plus gourmands les uns que les autres. Dans le stade, c'est un festival de mini-shorts, froufrous, vestes à plumes, talons aiguilles, chaînes, strass et glitters.
Rien n'est trop rose ni trop tapageur pour rendre hommage à la «Queen». La seule et l'unique, Nicki Minaj, qui entame ce 6 octobre l’une des ultimes étapes de sa tournée Pink Friday World Tour II, aux Etats-Unis. La série de concerts la plus lucrative de tous les temps pour une rappeuse.
Assister à un concert dans le pays de l’Oncle Sam, c’est une expérience en soi. La promesse d’une organisation fluide et millimétrée, d'innombrables bars et stands de merchandising répartis à travers le stade pour limiter la queue. Sans oublier un choix quasiment infini de nourriture des meilleures enseignes de la ville, du smash burger à tomber de Skinny Louie, à la pizza redoutable de Papa Johns. Le tarif d'une bête part de Margarita est affolant, mais pas forcément plus choquant que la saucisse du malheureux stand de currywurst planté devant l’Arena de Genève au concert de Mylène Farmer.
Le lancement des festivités étant annoncé pour 21h00, nous prenons place avec quelques minutes d'avance dans un stade encore vide. Avec un mauvais pressentiment. Soit Nicki Minaj n’a pas fait déplacer les foules ce soir, pour la troisième date de sa tournée en Floride, après Jacksonville et Tampa... soit la déesse du rap va se faire douloureusement désirer.
A mesure que des masses de fans en mode barbe à papa viennent colorer les gradins, notre pressentiment se confirme. Il faudra trépigner plus de deux heures avant de voir la «Queen» pointer son illustre postérieur. Une attente meublée par l’enthousiasme patient de DJ Skillibeng et la première partie de la chanteuse Bia et du rappeur Tyga.
A 23h20, alors qu'on commence sérieusement à se demander si elle ne laissera pas ses 20 000 fans en plan, la voilà, enfin. La grande Nicki Minaj, du haut de son petit 1m50. Le corps aux courbes surnaturelles sculpté dans un body métallique. Comme une sorte de créature venue de l'espace. C'est justement d'une voix robotique qu'elle entame I'm The Best.
Une affirmation qui reste à prouver. Si la scénographie est léchée et les chorégraphies des huit danseurs et danseuses sexy à souhait, le show souffre de méchantes pauses. Les changements de costume trop longs, trop lents, minent l'ambiance. Ce qui ne semble guère freiner le public, très jeune et chauffé à blanc, dans ses ardeurs. Entre deux transitions, on patiente en grignotant quelques vidéos sur TikTok.
Si on s'attendait à découvrir une Nicki Minaj déchaînée, sexy, nasty et aussi acidulée qu'un Tiki à la fraise, ce dimanche, la rappeuse la plus vendue au monde était plus volontiers princesse que reine. Une princesse gentille, timide et effarouchée, bien à l'abri dans ses longues robes à la sauce Disney.
L'air perdu, un peu fragile et de se demander ce qu'elle peut bien faire là, la partenaire in crime préférée de Lil Wayne, Drake, Kayne West ou encore Eminem, passe complètement à côté de son concert. Au premier sens du terme, puisqu'elle s'absente hors de scène à plusieurs reprises, parfois pour un bon quart d'heure. Les quelques passages en playback sont outranciers, mais assumés. Les twerks sont plus discrets et moins nombreux que les perruques.
Nicki Minaj, en vraie diva, n’en a rien à cirer.
Ce concert, au rythme étrange et difficile, se prolongera tout de même jusqu'à 1h20 du matin. Alors que notre estomac gargouille et qu'on se surprend à fantasmer sur le MacDo qui nous attend à la sortie, la princesse tire sa révérence, entre deux feux d'artifice, sur Night Is Still Young. Après quatre longues heures d'entertainment à la sauce barbecue, nous, on ne l'est plus vraiment.