L'inflation continue de reculer en Suisse. En mai 2025, le renchérissement s'est chiffré à -0,1% par rapport au même mois de l'année précédente, indique ce mardi l'Office fédéral de la statistique (OFS). Aussi petit soit-il, ce taux négatif constitue une première depuis plus de quatre ans. La dernière évolution à la baisse des prix à la consommation remonte, en effet, à mars 2021.
S'agit-il d'une bonne nouvelle? Ça dépend pour qui, avance Sergio Rossi, professeur ordinaire d'économie à l’Université de Fribourg. «Cette situation peut avoir un impact positif sur les ménages, du moins en principe. En réalité, elle profite surtout aux entreprises», affirme-t-il.
La raison en est que ce taux d'inflation négatif s'explique avant tout par la baisse des prix à l'importation, liée au franc fort, poursuit le spécialiste.
Les prix des produits importés ont effectivement baissé de 2,4% sur un an, détaille l'OFS. En revanche, ceux des produits indigènes affichent une légère augmentation (+0,6%). «Pour les ménages, les prix n'ont pas beaucoup changé», résume Sergio Rossi. «Il ne faut pas oublier qu'en principe, les entreprises ne baissent pas les prix, mais tendent à augmenter leurs marges», ajoute-t-il.
Dans le détail, les produits pétroliers ont enregistré le plus fort repli (-9,6%), ainsi que l'énergie et les carburants (-8,3%). A l'inverse, les loyers du logement ont sensiblement augmenté (+2,6%).
S'il devait perdurer, ce recul de l'inflation risque même d'avoir un impact négatif sur les travailleurs, prédit Sergio Rossi: «Les entreprises pourraient alors ajuster les salaires en fonction de l'inflation mesurée sur le marché des produits».
De plus, l'économiste rappelle que le calcul pour déterminer le taux d'inflation néglige plusieurs coûts qui pèsent sur les ménages. «L'assurance maladie n'y figure pas, tandis que l'impact des loyers y est souvent sous-estimé», détaille-t-il.
«Parallèlement, les entreprises sont dans une position de force sur le marché du travail», souligne encore le spécialiste. «Négocier une hausse de salaire n'est désormais plus possible, sauf pour très peu de travailleurs hautement qualifiés».
Les prévisions concernant la suite divergent. Interrogé par l'agence AWP, l'économiste David Marmet, de la Banque cantonale de Zurich (ZKB), indique que le renchérissement devrait continuer d'évoluer négativement ces prochains mois. Arthur Jurus, de la banque Oddo BHF, note que le franc devrait continuer de s'apprécier, ce qui réduit encore le prix des produits importés et tend à lester davantage l'inflation.
Pour Sergio Rossi, les choses pourraient évoluer différemment. «Au vu des tensions géopolitiques et des choix de Trump en matière de politique commerciale, je ne pense pas que cette tendance se poursuivra au cours de ces prochains mois», déclare-t-il. L'économiste n'exclut pas le scénario inverse, soit une hausse des prix. Et de conclure: