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Credit Suisse-UBS: «La Finma a été trop permissive»

«L'enquête sur Credit Suisse a couté 5 millions: qu'avons-nous appris?»

Par la voix de sa vice-présidente, l'Association suisse des employés de banque critique le rapport d'enquête sur Credit Suisse. Elle s'inquiète de l'avenir des collaborateurs de la banque.
23.03.2025, 18:4823.03.2025, 18:48
Daniel Zulauf / ch media
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La vice-présidente de l'Association suisse des employés de banque, Natalia Ferrara, l'affirme: lors de la chute de Credit Suisse, ce ne sont pas les règles, mais leur application qui ont fait défaut.

Même deux ans après, beaucoup d'anciens de Credit Suisse considèrent le naufrage de leur employeur comme une honte. Selon vous, comment a-t-on géré cette débâcle?
Natalia Ferrara: L'association et moi-même ne sommes pas très satisfaites. Le 19 mars 2023 déjà, on discutait très en détails de beaucoup d'éléments, sauf des collaborateurs de Credit Suisse. Cela n'a pas changé aujourd'hui. C'est un grand manque de respect.

Natalia Ferrara
La vice-présidente de l'Association suisse des employés de banque, Natalia Ferrara.Image: KEYSTONE

Vous n'êtes pas non plus satisfaite du rapport de la Commission d'enquête parlementaire (CEP). Pourquoi?
Elle a travaillé pendant 18 mois, le rapport a coûté cinq millions. Et qu'avons-nous appris avec tout ça? Rien du tout. Est-ce que cela a permis d'établir clairement des responsabilités? Non. Savons-nous maintenant plus précisément comment procéder à l'avenir? Non. Le rapport met certes le doigt sur des erreurs, par exemple en matière de surveillance ou de la part du Conseil fédéral. Mais il n'attribue de responsabilité concrète à personne.

«C'est la faute à tout le monde et personne à la fois»

Le Parlement, lui, évalue toutefois positivement ce document.
Je l'ai étudié de près. Son objectif était de comprendre ce qui s'est passé afin d'éviter qu'une telle débâcle ne se reproduise. Malheureusement, je n'ai pas pu en tirer de leçons vraiment utiles pour l'avenir.

Mais, une fois encore, le Parlement est satisfait. Pourquoi pas vous?
Peut-être que le Parlement est satisfait, mais croyez-moi, les collaborateurs de Credit Suisse ne le sont pas du tout, et moi non plus. En tant qu'ancienne procureure, je suis certainement un peu sévère, et peut-être aussi que mes attentes étaient trop élevées. Le rapport n'explique pas comment l'autorité de surveillance des marchés financiers a pu accorder pendant des années des facilités de capital aussi importantes à Credit Suisse, ni pourquoi personne au Conseil fédéral n'a compris qu'il fallait agir urgemment.

Vous avez dit que l'attitude de la Suisse vis-à-vis d'UBS relevait de la négligence. Qu'entendez-vous par là?
Je lis et j'entends depuis quelque temps des points de vue qui culminent parfois dans la question de savoir si la Suisse a encore besoin d'UBS. Comme si le pays pouvait aisément gérer son économie sans elle. Ces suppositions n'intègrent jamais la question des emplois. Voilà pourquoi il y a de la négligence, selon moi. On ne peut pas occulter cet aspect. On ne doit pas non plus le faire lorsqu'on propose des mesures de régulation.

«UBS joue un rôle important pour l'ensemble de la place financière suisse, dont dépendent directement 100 000 personnes»

Une réglementation bienveillante - telle que celle dont a bénéficié Credit Suisse - est-elle souhaitable pour UBS?
Non. Il y avait des règles - y compris pour Credit Suisse, mais elles n'ont pas été appliquées, par manque de surveillance. Credit Suisse a vraiment été traité différemment de toute autre banque en Suisse. Chez moi, au Tessin, il y avait la Banca della Svizzera Italiana, établie depuis longtemps. La Finma avait ordonné sa dissolution après un scandale international de blanchiment d'argent. Cela aurait pu arriver à Credit Suisse. Mais la Finma se montrait beaucoup plus permissive avec. Il ne faut donc pas seulement considérer les règles, mais aussi leur application.

A vos yeux, Marlene Amstad n'est pas la bonne personne pour diriger la Finma. Avez-vous une alternative?
Je ne citerai certainement pas de noms, mais c'est une question de profils. La Finma attend des membres des conseils d'administration des banques certaines compétences, par exemple une formation appropriée ou une expérience professionnelle pertinente. Ces exigences devraient également s'appliquer à ses propres organes dirigeants, or ce n'est pas le cas.

Mais en tant qu'ancienne procureure, vous savez bien qu'au final, ce sont le courage, le caractère ou le tempérament qui font la différence.
C'est vrai. La qualité d'une autorité a aussi beaucoup à voir avec le caractère, l'intégrité de ses représentants. Ce sont aussi des valeurs auxquelles nous tenons beaucoup en Suisse. C'est pourquoi nous ne demandons pas seulement une nouvelle norme pénale pour les cadres dirigeants, mais aussi des mesures qui garantissent que la nouvelle UBS demeure une banque avec des valeurs suisses.

L'intégration de Credit Suisse reste à venir. Qu'est-ce qui attend les collaborateurs?
Au terme des négociations avec notre association en août 2023, l'UBS s'est engagée à ne pas supprimer plus de 3000 postes.

Faut-il comprendre par là qu'il y aura 3000 licenciements?
Non. Il a été convenu que les personnes concernées recevraient une communication de la part d'UBS annonçant la suppression éventuelle de leur poste. A partir de ce moment-là, elles ont jusqu'à un an pour chercher un nouveau poste en externe, mais surtout en interne.

«Actuellement, des solutions sont trouvées en interne pour la plupart des cas»

Nous le reconnaissons, UBS assume sa responsabilité sociale. Sans quoi les gens se retrouveraient tous à l'ORP.

Mais il reste une grande étape d'intégration.
C'est vrai, et il est également possible que ce maximum de 3000 postes à biffer varie selon l'évolution de la situation pour UBS. Pour l'instant, nous évoluons bien en dessous de ce plafond. Mais oui, la majeure partie de l'intégration reste à venir. C'est pourquoi nous voulons absolument qu'elle se déroule dans de bonnes conditions.

Les choses vont donc plutôt se corser...
Oui, on peut partir de ce principe. Les doublons vont augmenter et davantage de collaborateurs devront quitter l'entreprise. Mais pour les plus âgés, nous avons la possibilité de prolonger l'accompagnement au-delà du plan social, jusqu'à une retraite anticipée. C'est vraiment une solution sur mesure pour la Suisse. Elle compte beaucoup, car environ 40% des collaborateurs d'UBS ont plus de 50 ans.

La place financière ne peut-elle pas absorber ces salariés?
Certainement pas tous. Il y a bien quelques milliers de postes à pourvoir dans le secteur financier, mais la plupart s'adressent à des spécialistes, qui doivent avoir un profil différent de celui des employés potentiellement en surnombre chez UBS. Il importe donc réellement que l'intégration des deux entités se passe bien.

(Traduit et adapté par Valentine Zenker)

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