La réforme est si compliquée que les autorités doivent sans cesse expliquer les détails. Plusieurs tables rondes ont déjà été organisées avec les caisses d’assurance-maladie, l'industrie pharmaceutique et les médecins.
La Confédération s'est, en outre, vue contrainte de rédiger un document de 32 pages contenant les principales questions et réponses. Et elle a rédigé un rapport administratif complet qui doit mettre en évidence les nuances de la réforme de l’OPAS-OAMal. Il n'en reste pas moins que des clarifications supplémentaires sont nécessaires. Douze réunions de trois groupes de travail sont à nouveau prévues en 2025.
Un point largement débattu dans le cadre des mesures visant à réduire les coûts dans le secteur de la santé est la rémunération au cas par cas. Avant le 1er janvier 2024, chaque caisse-maladie avait la liberté de décider si elle souhaitait financer, par exemple, un médicament contre le cancer qui n'était pas encore autorisé en Suisse. Elle devait négocier directement le prix avec le fabricant. Cela entraînait des inégalités de traitement. Certaines caisses finançaient le traitement, tandis que d'autres refusaient des demandes identiques. Cela pouvait avoir des conséquences dramatiques pour les patients.
C'est là qu'intervient la réforme en question, qui oblige depuis le début de l'année toutes les caisses à rembourser, sous certaines conditions, les médicaments dits «off-label». Au lieu de négocier individuellement les prix avec les fabricants, les caisses d’assurance-maladie appliquent depuis lors des réductions de prix définies de 30 à 50% du prix pratiqué à l'étranger pour ces thérapies. Cela devrait améliorer l'égalité des chances.
Selon l'Association des entreprises pharmaceutiques en Suisse (Vips), cet objectif n'a pas été atteint. L'accès a certes été uniformisé, mais à un niveau plus bas. C'est la conclusion à laquelle parvient Ernst Niemack, son directeur, sur la base d'une enquête menée auprès de 75 membres de la Vips, dont CH Media a obtenu une copie. Les entreprises interrogées y expliquent qu'en 2024, elles auraient totalement renoncé à commercialiser sept médicaments en Suisse. De même, certains fabricants ont renoncé à élargir le champ de traitement des produits existants.
Les entreprises ne mettent pas leurs innovations sur le marché parce qu'elles craignent des baisses de prix trop importantes avec les nouveaux remboursements au cas par cas. De plus, elles voient d'un mauvais œil l'augmentation de la bureaucratie. Le nombre de remboursements au cas par cas augmente parce qu'avec les nouvelles règles, beaucoup plus de caisses maladie doivent utiliser cet élément. Parallèlement, le temps consacré à chaque cas a augmenté. Auparavant, il était d'un peu moins d'une demi-heure par cas, mais il est désormais plus élevé, comme l'indiquent plus de la moitié des entreprises interrogées.
Selon l'association, cette situation a conduit cette année à ce que 200 patients se voient refuser l'accès à des médicaments parfois vitaux. Ernst Niemack déclare:
Le représentant pharmaceutique met en garde contre la répétition des mêmes erreurs dans le paquet de mesures de réduction des coûts 2, actuellement débattu au Parlement. Cette semaine, le Conseil national a adopté, entre autres, des modèles de prix «semi-transparents» et des rabais sur les volumes pour les médicaments à fort chiffre d'affaires. Ernst Niemack espère également que les remboursements au cas par cas, extrêmement complexes, seront simplifiées lors d'une prochaine révision.
Interrogé à ce sujet, l'OFSP souligne que la Suisse a les coûts de médicaments par habitant les plus élevés d'Europe:
Dans ce contexte, il est peu compréhensible que «les entreprises ne veuillent pas mettre leurs médicaments à la disposition des patients suisses».
Traduit et adapté par Noëline Flippe