La déclaration finale du sommet du G20 à Rio de Janeiro contient une phrase qui a de quoi faire frisonner ceux qui ont une phobie des impôts:
L'hôte du sommet, le président brésilien Lula, aurait aimé une formulation plus concrète cette semaine. Il milite pour que les milliardaires paient au moins 2% d'impôts sur leur fortune. Ce qui permettrait d'engranger environ 250 milliards de dollars recettes par an.
Lula se considère comme le porte-parole du Sud global et entend désormais porter le projet à l'ONU. Qu'est-ce que cela signifie pour la Suisse? Quelles sont les réactions face à cette exigence ciblée sur les très riches?
Pour le coprésident du PS Cédric Wermuth, «l'explosion des inégalités demeure certainement le problème fondamental de notre époque». Son collègue de parti, le conseiller national Fabian Molina, parle d'une «mesure attendue depuis longtemps pour s'attaquer aux grands problèmes de ce monde: la faim et la crise climatique». La Suisse devrait suivre le mouvement, le Sud global veut des réformes de l'imposition des grosses fortunes et il ne se laissera pas détourner de cette voie. Le socialiste zurichois estime encore que l'exigence de justice fiscale devient une priorité internationale.
Les Verts se disent tout aussi favorables:
Selon elle, les richesses se distribuent de manière extrêmement inégale en Suisse et dans le monde. Une situation qui entrave la lutte contre la pauvreté et la crise environnementale:
Dans le camp bourgeois, en revanche, l'idée a du mal à passer. Pour le président du PLR, Thierry Burkart:
Pour le libéral-radical, il est hors de question de taxer davantage la population suisse. De plus, l'expérience de l'impôt minimum de l'OCDE montre que les Etats-Unis ont ignoré leurs propres règles pour venir débaucher les meilleurs contribuables suisses:
Le chef du groupe parlementaire UDC Thomas Aeschi souligne, lui, que «les personnes les plus aisées paient en Suisse des impôts sur le revenu, sur la fortune et de nombreux autres encore, comme ceux sur les dividendes. L'impôt fédéral est, selon lui, très progressif:
Le président du Centre, Gerhard Pfister, partage cet avis: pas question de rallier le projet. «L'imposition modérée des très riches fonctionne bien. On attend aussi d'eux qu'ils contribuent au-delà de cela pour la cohésion du pays, par exemple par un soutien à de nombreuses institutions». Cela empêche qu'une certaine classe sociale se détache du reste de la société. Sur ce point, il n'en va pas tout à fait de même au Brésil.
La Suisse compte actuellement 86 milliardaires, soit plus que tout autre pays par rapport à sa population. Que pense le département fédéral des Finances de cette revendication? «Nous suivons de près les discussions sur l'imposition des personnes privées très fortunées au sein du G20», déclare le chef de la communication Pascal Hollenstein. Selon lui, il est important pour la Suisse que chaque pays puisse tenir compte des particularités de son système fiscal lors de l'imposition des contribuables:
Pascal Hollenstein souligne malgré tout que notre pays dispose d'un impôt sur la fortune qui rapporte gros pour les finances publiques. Il représente au moins 10% des recettes fiscales au niveau cantonal et communal dans la moitié des cantons environ. L'imposition des personnes physiques est généralement progressive.
Ernst Stocker, le président des directeurs cantonaux des finances, relève de son côté:
Pour le conseiller national UDC Thomas Aeschi voit quant à lui un frein à cette taxation des milliardaires: «Je doute que le gouvernement Trump adhère au projet».
Traduit et adapté par Valentine Zenker