La marée orange des colis en provenance de Chine n'est pas prête de s'arrêter. La boutique en ligne Temu promet des envois gratuits, des retours gratuits et surtout des prix imbattables et, par-dessus le marché, des réductions.
Une offre à laquelle de nombreuses personnes ne peuvent manifestement pas résister, même en Europe et en Suisse. L'année dernière, Temu a réalisé un chiffre d'affaires de 300 millions de francs dans notre pays, en partant pratiquement de rien.
L'engouement pour Temu est fou, affirme Jörg Weber, le fondateur de la chaîne de vêtements Chicorée, en particulier chez les jeunes. «La force et la rapidité avec lesquelles Temu s'est établi en Suisse sont uniques.» Ainsi, Temu n'a pas seulement misé sur Twint comme moyen de paiement. La plateforme pose également de nouveaux jalons en matière de publicité ciblée, notamment sur le plan financier. Selon des estimations, le groupe dépense chaque année trois milliards de dollars pour promouvoir ses produits dans le monde entier.
Ce démarrage en trombe a effrayé le secteur suisse du commerce de détail qui ne veut pas rester les bras croisés. L'association Swiss Retail Federation a ainsi déposé une plainte auprès du Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco). Elle reproche par exemple à Temu de brader ses marchandises en dessous du prix d'achat, de faire de la publicité avec de faux rabais et d'essayer d'appâter les clients avec des affirmations trompeuses comme «il ne reste plus que 5 pièces!» ou «presque épuisé».
Mais la résistance contre Temu ne vient pas seulement des pays de l'UE ou de la Suisse, mais aussi de la Chine elle-même. Fin juillet, des centaines de commerçants se sont rassemblés devant les bureaux de la maison mère de Temu, Pinduoduo, respectivement PDD Holdings, dans la métropole économique de Guangzhou, au sud de la Chine. Plusieurs vidéos publiées sur la plateforme chinoise Weibo en témoignent. L'une d'entre elles montre comment les commerçants bloquent le passage dans les bureaux de Temu.
Plusieurs médias locaux ont rapporté qu'au total, environ 300 personnes s'étaient rassemblées lors des manifestations. Environ 80 d'entre elles auraient réussi à pénétrer dans le bâtiment et à atteindre les bureaux de Temu au 30e étage, comme le rapporte Business Insider. Ils ont tenté de s'entretenir avec la direction de Temu, mais sans succès.
L'enjeu des protestations est finalement l'argent. «PDD, rends-moi mon argent durement gagné», pouvait-on lire sur l'un des T-shirts portés par les commerçants pendant les protestations, selon le Frankfurter Allgemeine Zeitung. Ils s'opposaient à ce que Temu retienne préventivement les paiements aux commerçants. Et ils manifestent contre les amendes élevées que les commerçants et frabricants doivent apparemment payer à Temu, par exemple lorsqu'ils ne peuvent pas respecter les délais de livraison ou que les descriptions des produits ne sont pas correctes. Donc, en fin de compte, lorsque les commerçants ne tiennent pas les promesses que Temu fait aux consommateurs.
La plate-forme chinoise défend donc sa politique commerciale avec l'argument de la qualité:
La société Temu PDD, fondée à l'origine en 2015, met également sous pression son grand concurrent national Alibaba avec sa stratégie à bas prix, les chiffres de croissance sont remarquables. Ainsi, le chiffre d'affaires pour le premier trimestre 2024 a plus que doublé par rapport à la même période de l'année précédente pour atteindre environ 12 milliards. Les commerçants chinois ne semblent pas vraiment en profiter. Ou en tout cas pas assez.
Ce n'était pas non plus la première manifestation de ce genre. En mai déjà, quelques commerçants se seraient rassemblés devant le bâtiment Temu à Guangzhou. Et ce ne sont probablement pas les derniers.
En Suisse, la lutte du commerce de détail national contre Temu se poursuit. Toujours est-il qu'à partir de 2025, le géant chinois de la vente en ligne devra lui aussi payer la TVA dans notre pays. Cette lacune sera comblée et un désavantage concurrentiel sera supprimé.
En Allemagne aussi, le commerce de détail lance régulièrement des appels aux politiques pour qu'ils prennent des mesures plus fermes contre Temu et consorts. «En Allemagne, il y a une liberté de manœuvre pour les modèles commerciaux numériques douteux», a récemment déclaré l'entrepreneur de droguerie Raoul Rossmann au Handelsblatt. «Si Temu ne respecte pas les règles, il devrait tout simplement être désactivé.»
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)