Cher Prince Harry,
Tu as eu trois jours. Un délai très court, il est vrai, pour exorciser tes 38 ans de «traumatismes» et de «souffrances psychologiques», qui ont coupé court à ta «croissance». On n'invente rien, c'est toi qui l'a dit cette semaine, au cours de ton bras-de-fer judiciaire contre un groupe de presse tout-puissant.
Documentaire, livre, interview télévisée: il ne manquait plus que le tribunal pour hurler ton injustice sur la place publique. Ce soir, c'est chose faite. Tu es le premier royal depuis 130 ans à avoir été auditionné par la Haute Cour britannique.
Alors que ton escale au Royaume-Uni touche à sa fin, rien n'est réglé.
Tu as promis que tu ne menais pas ce combat judiciaire par simple haine des tabloïds, mais dans le but de «tenir des gens pour responsables». Harry, tu sais bien que c'est faux.
Plus que la mesquinerie ou les pratiques illégales présumées des journalistes, ton procès a prouvé une chose: ta haine viscérale et irraisonnée de la presse. Les longues heures de contre-interrogatoire et ta déclaration en ont dévoilé toute l'étendue. Tant de diatribes erratiques, d'accusations floues et paranoïaques, qui te vaudraient l'étiquette de complotiste, si tu n'étais pas prince.
Ces trois jours d'audience à Londres étaient l'occasion de défendre ta cause une dernière fois et de prendre un nouveau départ. Enfin, tu aurais pu t'envoler serein vers ta nouvelle patrie, savourer l'existence paisible d'un ex-royal libéré de ses obligations et l'anonymat de Los Angeles.
Pourtant, jamais tu n'as n'a semblé moins prompt à aller de l'avant, alors que six affaires judiciaires distinctes devant la Haute Cour t'attendent. Sécurité, diffamation, piratage... Il y en a tant qu'on perd le fil et l'envie de les détailler.
Aussi longtemps que tu seras rongé par ton sentiment d'injustice, ton désir de vengeance, tes traumatismes de jeunesse et ce deuil crasse, tu continueras à subir des «courses-poursuites effrayantes», l'incursion impitoyable des médias et les gros titres «blessants».
Personne ne nie tes plaies, ni l’influence néfaste de la presse sur ton existence. Aucun être humain normalement constitué ne souhaiterait être photographié en sortant d'une discothèque, après une beuverie entre copains, lors d'un rendez-vous romantique ou, pire, au beau milieu d'un deuil maternel. Personne, en réalité, n'a les reins suffisamment solide pour se coltiner ce job chronophage de royal et l'exposition qu'il implique.
Harry. Maman n'est plus là pour te sommer de vivre ta vie et d'aller de l'avant (deux fois aller de l'avant). Papa est un pur produit de la Firme, plus concerné par son futur que par ton sort. Quant à Meghan, elle a trop besoin de capitaliser sur tes failles pour financer ses escarpins Tom Ford. Tu es le seul à pouvoir dépasser l'obsession qui te grignote.
Au lieu de vouloir faire condamner tout le monde, tu devrais plutôt envisager de te gracier d'être né. Tu as raison, ce n'est pas simple de pousser son premier cri sous une couronne.