Depuis toujours, Donald Trump voit le monde au travers d'un petit écran, et s'il répète par exemple qu'il faut désormais «nourrir» la population de Gaza, c'est d'abord parce qu'il a été impressionné par des images d'enfants émaciés.
Cette inflexion, au moins rhétorique, confirme que l'ancien promoteur immobilier, comme pendant son premier mandat, forme sa vision du monde et articule sa diplomatie en bonne partie en fonction de ce qu'il voit à la télévision.
Longtemps sourd aux mises en garde répétées sur la catastrophe humanitaire en cours dans le territoire palestinien, le président américain a changé de ton assez soudainement pendant un récent séjour en Ecosse.
Interrogé le 28 juillet pour savoir s'il était d'accord avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, qui venait d'affirmer qu'il n'y avait pas de famine à Gaza, le milliardaire de 79 ans a répondu:
Il a ajouté par la suite: «c'est une vraie famine», et estimé «qu'il n'était pas possible de simuler ça».
Depuis, l'ancienne vedette de téléréalité répète donc qu'il faut venir en aide aux habitants du territoire palestinien ravagé par la guerre, sans toutefois avoir annoncé des actions diplomatiques réellement nouvelles.
Comme le rappelle Dan Kennedy, professeur de journalisme à la Northeastern University:
Selon un décompte de l'AFP, le président républicain a eu, depuis son investiture en janvier, 22 briefings des services de renseignement, mais, dès son premier mandat, nombre d'articles de presse ont révélé qu'il ne s'intéressait guère aux rapports diplomatiques écrits ou aux analyses d'experts en sécurité nationale.
Avant d'accéder à la Maison-Blanche, en 2015, le milliardaire avait répondu à un journaliste qui lui demandait comment il s'informait sur le plan militaire. Trump avait alors répondu:
Le dirigeant républicain avait été piqué au vif pendant son premier mandat par un article du New York Times révélant qu'il passait plusieurs heures par jour rivé à son téléviseur, en suivant surtout la chaîne Fox News, la préférée des républicains, mais aussi CNN, NBC, ABC.
Pour ce second mandat, et même s'il a mené une campagne électorale faisant la part belle aux podcasteurs et influenceurs, il est évident que Trump reste un avide consommateur d'émissions télévisées. Dan Kennedy note:
Sur sa plateforme Truth Social, Trump commente presque en direct les programmes qu'il regarde. Dans un long entretien téléphonique mardi avec la chaîne CNBC, il a par exemple déclaré:
Le président américain, qui n'hésite pas à publier des montages à sa gloire réalisés par intelligence artificielle, a toujours été très sensible aux images.
En octobre 2019, décrivant l'opération militaire américaine en Syrie ayant abouti à la mort du chef du groupe Etat islamique (EI), Abou Bakr al-Baghdadi, il avait lancé:
A la fin de son entrevue désormais célèbre avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky en février, qui avait tourné au jeu de massacre, Trump avait lancé:
Spectateur enthousiaste, le président américain n'hésite pas à se servir d'images qui l'ont interpellé ou intéressé pour créer un rapport de forces diplomatique.
En mai, il avait tendu une véritable embuscade au président sud-africain Cyril Ramaphosa, contraint de regarder dans le Bureau ovale un montage vidéo supposé étayer des accusations de génocide contre des fermiers blancs en Afrique du Sud.
Le président américain a depuis dit qu'il ne se rendrait «probablement pas» au sommet du G20 prévu en novembre en Afrique du Sud, et infligé au pays des taxes douanières de 30%, soit le taux le plus élevé d'Afrique subsaharienne.