C'est un détail esthétique qui a son importance, même si l'intéressé ne s'en rendait pas vraiment compte à première vue: sa barbe.
Trump s'était même exprimé à ce sujet, émettant quelques doutes concernant la barbe de son futur colistier en cas d'élection au mois de novembre. La figure de proue des républicains a toujours imposé un visage lisse, bien coupé; il n'est pas vraiment fada des poils sur le visage. Dans un passé récent, Trump avait ordonné à son fils de se débarrasser de sa barbe, par souci d'apparence. Il était si à cheval sur la pilosité faciale, qu'il demandait à ses collaborateurs de se raser. En clair: l'ogre républicain n'aime pas les barbus.
Sauf que dans le cas de Vance, s'il décide de raser, c'est une autre paire de manches. Selon un conseiller de Trump, sans sa barbe:
Un visage rond et poupin, celui d'un petit écolier naïf. Cette transformation était une manière de montrer que, à l'image de sa percée politique rapide, il a pris en maturité jusqu'à faire changer d'avis son guide politique (et spirituel). L'ancien président a quelque peu mis de l'eau dans son vin depuis, comme il l'indiquait sur Fox News Radio, disant de son colistier qu'il avait bonne mine avec une barbe – «comme un jeune Abraham Lincoln».
En effet, c'est l'icône Abraham Lincoln qui a amorcé la tendance de la barbe en politique. Après lui, neuf des onze présidents suivants ont porté une sorte de barbe ou de moustache, une tendance qui a pris fin avec William Howard Taft, qui a été en fonction de 1909 à 1913, rappelle le Washington Post.
En ce qui concerne le poste de vice-président, le dernier à avoir porté ne serait-ce que quelques poils sur la face, était le moustachu Charles Curtis, en 1932, sous le règne d'Herbert Hoover. Ainsi, depuis près d'un siècle, la barbe n'a plus la cote. Jusqu'à aujourd'hui.
Car les barbes fournies ont longtemps été rejetées par la droite. L'exemple du face-à-face entre Nixon et Kennedy illustre à merveille cette impopularité des poils sur la frimousse. Joel K. Goldstein, auteur et spécialiste de la vice-présidence, interrogé par le Washington Post insiste sur l'apparence d'un homme politique.
Times change, serait-on tenter de dire. JD Vance devient le bras droit de Donald Trump, tout en gardant sa barbe. Même constat pour un élu moins dans la lumière, mais incarnant l'avenir du Grand Old Party: Hayden Padgett. Le président des Jeunes républicains, a également décidé de se laisser pousser des poils sur les joues.
La crainte d'une allure négligée paraît être un lointain souvenir; le poil représente désormais un signe de mâle fort, voire synonyme de liberté d'expression. Les visages lisses ont moins la cote et la barbe est de retour dans les rangs conservateurs.
Ces quinze dernières années, elle peut compter sur une nouvelle jeunesse, une nouvelle popularité. La tendance prend peut-être sa source chez les cols blancs, avant de déteindre sur les politiciens qui s'en rapprochent.
Pour JD Vance, cette barbe, qui peut paraître futile pour la population, est une évolution du personnage, un processus de transformation depuis son best-seller Hillbilly Elegy. Le public et les réseaux sociaux parlent d'une manière de s'affirmer. Depuis son succès littéraire, l'Américain a grandi, roulé sa bosse à la Silicon Valley et s'est fait un paquet de billets verts sous la houlette de Peter Thiel. Car le look barbu est désormais une marque chez les entrepreneurs.
La stratégie politique n'est jamais bien loin, empruntant ce changement esthétique pour appuyer et incarner le programme très conservateur de Donald Trump.
Mais la pilosité faciale peut aussi signifier la fin d'un cycle. Al Gore est par exemple réapparu en public après avoir perdu l'élection présidentielle de 2000, avec une barbe fournie, alors définie comme une «barbe d'exil» et interprétée comme un signe d'abandon des ambitions politiques. C'était la fin d'un parcours politique pour l'un des vice-présidents les plus influents dans l'Histoire des Etats-Unis.
Tout le contraire de JD Vance, en pleine ascension. Malgré sa popularité qui monte en flèche, les dernières nouvelles pourraient lui valoir quelques poils blancs. Adoubé par le parti républicain, le sénateur barbu de l'Ohio est à présent remis en cause dans son propre camp pour ses différents propos - sur les femmes et son attaque de cat lady adressée à Kamala Harris.