Maltraité depuis des jours sur un stream, il décède en direct
Raphaël Graven, 46 ans, connu en ligne sous les pseudos Jean Pormanove ou JP, est décédé lundi à Contes, petit village au nord de Nice. Il était connu pour participer à des vidéos le montrant subissant violences et autres humiliations, notamment de deux partenaires connus sous les pseudos de Narutovie et Safine.
L'information a été partagée mardi par le parquet de Nice, confirmant une information de Nice-Matin. Il a indiqué avoir ouvert une enquête en «recherche des causes de la mort» et ordonné une autopsie.
«Torture quotidienne»
Le concept de l'émission «Le Lokal» voyait Narutovie et Safine tracasser Jean Pormanove, qui se décrivaient comme des amis, mais aussi d'autres participants. Ces moqueries ont pris des formes diverses et étaient régulièrement critiquées par de nombreux internautes, les accusant d'aller trop loin et de les harceler sous couvert de plaisanteries.
Le décès fait suite à dix jours de direct d'une émission continue et destinée à recevoir de l'argent de la part des utilisateurs et de la plate-forme Kick. Sur la vidéo qui montrerait les derniers instants de Raphaël Graven, un compteur de temps indique plus de 298 heures et un compteur d'argent la somme de 36 411 euros
Sur certaines vidéos, encore visibles sur divers réseaux, on peut voir «JP» se faire tirer dessus sans porter de protection avec des projectiles de paintball, être frappé par ses partenaires lors de séances de «gaming», ou se retrouver systématiquement dans le rôle de souffre-douleur en privé ou en public, tout en semblant consentir à ce rôle. De choquantes scènes de strangulation ont également eu lieu.
Privations de sommeil
Jean Pormanove, décrit comme une «personne fragile», s'était par exemple, quelques jours avant le décès, fait réveiller en pleine nuit, un de ses «compères» démarrant une moto à côté de son lit. L'homme aurait subi des privations de sommeil durant plusieurs jours.
Quand c'était pas des sons de dons d'abonnées de la communauté, c'était des happenings de l'équipe autour d'Owen, qui consistaient à réveiller de la façon la plus choquante possible, en les frappant souvent au passage. 300h sans réel repos alors que c'était une personne fragile. pic.twitter.com/cOaSDbKvr5
— OuaisGᴜᴇsʜ ☭ (@GueshCtrl) August 18, 2025
Lundi, les autres protagonistes l'ont retrouvé inanimé, sous une couette dans un lit. Selon un utilisateur du réseau X ayant suivi l'émission, il aurait subi un arrêt cardiaque. BFMTV évoque un «étouffement». Une autopsie doit avoir lieu ces prochains jours.
«Violences sur personnes vulnérables»
Les investigations ont été confiées à la police judiciaire de Nice, déjà saisie depuis décembre 2024 d'une enquête notamment pour «violences volontaires en réunion sur personnes vulnérables et diffusion d'enregistrement d'images relatives à la commission d'infractions d'atteintes volontaires à l'intégrité de la personne», suite à un article de Médiapart révélant l'existence de ces vidéos, suivies par des milliers de personnes, notamment sur la plateforme australienne de diffusion en direct Kick.
Kick est une plateforme australienne, grande concurrente du leader mondial du live streaming Twitch et aux règles de modération plus relâchées. Initialement destinée à accueillir des vidéos liés au jeux d'argent, elle a également commencé à héberger des contenus plus controversés.
Créée en 2022, Kick offre une politique de rémunération bien plus avantageuse que ses concurrents, reversant 95% des revenus générés aux créateurs de contenus, contre 50% chez la plupart des autres plateformes. Les «streamers» peuvent ainsi engranger de fortes sommes grâce à leurs abonnés payants et à des dons des internautes versés lors d'un direct dont ils aiment le contenu.
Les plate-formes dans le viseur de la ministre
Clara Chappaz, ministre déléguée chargée du Numérique, a indiqué avoir saisi l'Arcom, le service français de lutte contre la violence en ligne.
Le décès de Jean Pormanove et les violences qu’il a subies sont une horreur absolue. J’adresse toutes mes condoléances à sa famille et à ses proches.
— Clara Chappaz (@ClaraChappaz) August 19, 2025
Jean Pormanove a été humilié et maltraité pendant des mois en direct sur la plateforme Kick.
Une enquête judiciaire est en cours.…
Interrogée sur cette affaire, Kick a répondu «ne pouvoir donner aucune information en raison de notre politique de confidentialité». Dans ses conditions d'utilisation, le site souligne que «bien que la violence puisse être contextuelle et avoir des conséquences variables, nous interdisons tout contenu représentant ou incitant à une violence odieuse».
(acu avec afp)
