Après des débats souvent âpres entre la majorité et la gauche d'un côté et des élus LR de l'autre, 99 députés ont voté pour l'article unique du projet de révision constitutionnelle. Il sera considéré comme adopté à l'assemblée nationale le 30 janvier s'il obtient un nouveau feu vert lors d'un vote solennel, ce qui ne fait guère de doute.
«La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté garantie à la femme d'avoir recours» à une IVG: par cette formulation l'exécutif espère trouver une voie entre l'assemblée, qui avait voté à la fin 2022 un texte pour consacrer un «droit» à l'IVG, et le Sénat, qui avait validé de justesse quelques mois plus tard l'inscription dans la constitution d'une «liberté».
«Notre pays ne peut pas se ranger aux côtés des Etats-Unis de Trump, ou de la Hongrie d'Orban. Les corbeaux sont à nos portes et nous ne laisserons pas nos corps», a lancé la députée écologiste Marie-Charlotte Garin.
Malgré des regrets à gauche sur l'abandon du terme de «droit» ou l'absence de référence à la contraception, Mathilde Panot (LFI) a appelé à acter une «victoire historique» sur les «anti-droits [qui] siègent [...] à l'extrême droite».
Les débats ont tourné à l'aigre dans la soirée, notamment lors de l'examen d'amendements LR pour faire revenir le délai légal d'IVG à 12 semaines (contre 14 actuellement).
Reprochant à la majorité de ne pas s'engager contre un hypothétique allongement conséquent de la durée légale, Thierry Breton (LR) l'a accusée de se comporter en «remorque du planning familial», suscitant une bronca à gauche et chez les macronistes.
Prenant la défense de l'association, «indépendante», le rapporteur Renaissance Guillaume Gouffier Valente a rétorqué n'avoir pas vu passer «le moindre amendement demandant un allongement» à gauche ou chez les macronistes, mais plusieurs qui «attaquent l'accès au droit à l'avortement» venant de la droite.
Éric Dupond-Moretti s'est efforcé de répondre aux LR qui voient dans la formule «liberté garantie» une brèche pour un allongement de la durée légale, sans que le conseil constitutionnel ne puisse s'y opposer. La révision ne créera pas de «droit absolu et sans limite», a-t-il insisté.
Pour qu'un congrès puisse être réuni, il faudrait que le Sénat approuve le 28 février cette notion de «liberté garantie», qui fait tiquer des cadres à droite. Et la droite sénatoriale, peu encline à faire de cadeau à l'exécutif, avait vécu comme une pression le fait que le gouvernement suggère en décembre la date du 5 mars pour réunir le Congrès, ce qui supposerait que le Sénat avalise la rédaction du gouvernement.
«Nous prendrons le temps qu'il faut pour aller au bout de cette révision», promise par le président français Emmanuel Macron, a tenté de déminer Éric Dupond-Moretti mercredi. Si le Sénat adoptait à nouveau une version différente de l'assemblée nationale, la navette parlementaire reprendrait. (sda/ats/afp)