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A Gaza, désespoir et souffrance persistent: «Rien n’a changé»

Des gens se déplacent entre les bâtiments détruits de la ville de Gaza: la guerre est finie, mais pas les souffrances.
Des gens se déplacent entre les bâtiments détruits de la ville de Gaza: la guerre est finie, mais pas les souffrances.Image: Jehad Alshrafi / AP

Il se passe quoi à Gaza?

Le cessez-le-feu tient, mais le désespoir demeure. Dans la bande de Gaza, destruction, faim et peur rythment toujours le quotidien. Le plan de paix fraîchement signé ne laisse guère entrevoir d’espoir.
17.10.2025, 11:4817.10.2025, 13:20
Lisa Schneider, Berlin et Felix Wellisch, Tel Aviv / ch media

Avant l’attaque du Hamas contre le sud d’Israël le 7 octobre 2023, avant que la guerre ne déchire la bande de Gaza, Mehna Shabat menait une vie ordinaire. Agé de 54 ans, il habitait à Beit Hanoun, près de la frontière israélienne, enseignait à l’école et élevait ses filles avec son épouse.

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Aujourd’hui, il ne lui reste rien. Sa femme a été tuée dans une frappe aérienne, l’une de ses filles a perdu un œil, et Beit Hanoun n’existe plus. La ville a été vidée de ses habitants et presque entièrement rasée. Quand l’accord de paix a été signé en Egypte, il a cru voir le bout de ses peines. Comme il le confie, ce fut bref:

«Il n’y a plus rien ici pour nous. Tout ce qu’il nous reste, ce sont nos souvenirs. Rien n’a changé. Chaque jour, nous sommes confrontés à la dure réalité»
Deux jeunes filles palestiniennes transportent leurs biens à travers la ville de Gaza.
Deux jeunes filles palestiniennes transportent leurs biens à travers la ville de Gaza.Image: Abdel Kareem Hana / AP

Un accord déjà malmené

La trêve a commencé, la guerre s’est arrêtée; mais la souffrance, elle, perdure. Le plan de paix présenté par Donald Trump prévoyait pourtant certaines améliorations: un afflux d’aide humanitaire comparable à celui du cessez-le-feu précédent, entre janvier et mars, l’entrée de matériel pour déblayer les ruines, et l’ouverture du point de passage de Rafah vers l’Egypte.

Des habitants de Gaza réparent une conduite d'eau.
Des habitants de Gaza réparent une conduite d'eau.Image: Jehad Alshrafi / AP

Mais la première phase de l’accord a déjà été rompue. Le Hamas devait, dans les septante-deux heures suivant le début du cessez-le-feu vendredi, restituer tous les otages, vivants ou morts. Lundi, tous les otages vivants ont bien été rapatriés en Israël, mais seulement quatre corps sur les dix prévus. Le Hamas a affirmé ignorer l’emplacement de certains des morts.

Mardi, quatre autres dépouilles ont été rendues. Cependant, selon les examens médico-légaux menés à l’institut Abu Kabir de Tel-Aviv, seules trois d’entre elles étaient celles d’otages. L’identité de la quatrième reste inconnue.

L’aide humanitaire coupée de moitié

En réaction, Israël a informé l’ONU de sa décision de réduire de moitié les livraisons d’aide à Gaza: au lieu de 600 camions par jour, seuls 300 seront désormais autorisés à passer. Israël justifie cette mesure par la violation de l’accord par le Hamas.

Un Palestinien à Gaza avec ses maigres possessions.
Un Palestinien à Gaza avec ses maigres possessions.Image: Abdel Kareem Hana / AP

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) a confirmé cette annonce. Il a rappelé qu’au début de la semaine, après «des mois de frustration et de blocage», des progrès ont enfin permis d’augmenter l’aide acheminée vers Gaza, avant d’avertir d’un possible «retour en arrière».

Mais, même avant cette décision, Mehna Shabat n'a pas constaté d’amélioration notable. Il raconte:

«L’accès aux produits de base reste extrêmement limité. On trouve surtout des conserves. La plupart des aliments disponibles proviennent de livraisons commerciales, pas de l’aide humanitaire.»

Les chiffres de l’ONU confirment la situation: entre le 19 mai et le 15 octobre 2025, environ 4000 camions d’aide ont atteint leur destination, tandis que près de 7100 ont été interceptés en route, soit par des «personnes affamées», soit par des «groupes armés», selon les termes de l’organisation internationale.

Une femme palestinienne avec ses enfants dans les ruines de la ville de Gaza.
Une femme palestinienne avec ses enfants dans les ruines de la ville de Gaza.Image: Jehad Alshrafi / AP

Depuis la mi-septembre, ces détournements ont toutefois nettement diminué, et les données montrent une légère baisse supplémentaire depuis le début de la trêve vendredi. Mais il est trop tôt pour en tirer des conclusions: le cessez-le-feu n'est en vigueur que depuis une semaine.

Le contrôle du Hamas sur la population

Obtenir les biens les plus simples reste une épreuve, comme nous raconte Mehna Shabat. D’après les données publiées par Israël, les livraisons concernent avant tout des denrées alimentaires, alors que les produits médicaux et le matériel d’hébergement d’urgence, les fameux shelter kits, manquent cruellement.

Pour l’heure, la première phase de l’accord tient encore, malgré les obstacles liés au retour des otages et à la distribution de l’aide. Le poste-frontière de Rafah, censé rouvrir, reste toutefois fermé, contrairement aux annonces initiales.

La ville de Gaza offre un spectacle de désolation.
La ville de Gaza offre un spectacle de désolation.Image: Abdel Kareem Hana / AP

Quant à la deuxième phase du processus, censée aborder la question du désarmement du Hamas et du retrait total de l’armée israélienne, les informations sont contradictoires: certains affirment que les discussions ont commencé, d’autres démentent.

Alors que le désarmement du Hamas figure à l’ordre du jour, Donald Trump aurait, selon la plateforme Al-Monitor, donné son feu vert tacite pour que le mouvement islamiste continue, au moins pour un temps, à exercer son autorité à Gaza. Y compris par la force.

Les témoignages, photos et vidéos des derniers jours en disent long: le Hamas frappe désormais ceux qu’il accuse de vols ou de trafics liés à l’aide humanitaire, mais également des civils qui osent s’opposer au mouvement. Mehna Shabat résume:

«Il n’y a plus de vie à cet endroit. Tout ce que nous voulons, c’est que cette période prenne fin»

Adapté de l'allemand par Tanja Maeder

Manifestations européennes en soutien à la Palestine
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Manifestations européennes en soutien à la Palestine
Genève.
source: epa keystone / martial trezzini
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- Arrivée des Suisses de la flottille pour Gaza à Genève
Video: watson
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