Erdogan a fait «d'une pierre, deux coups» en aidant les Suisses de la flottille
Ils sont huit et ont été accueillis comme des héros à l'aéroport. Les militants de l'association suisse Waves of freedom, partis avec la «flottille pour Gaza» et arrêtés par l'armée israélienne, ont été rapatriés à Genève depuis Istanbul. L'Etat turc leur a organisé et payé une visite médicale, un repas, la nuit à l'hôtel et le vol de rapatriement, ainsi que des vêtements et des chaussures neuves. L'association se montre reconnaissante:
A l'inverse, les militants dénoncent l'attitude du Département fédéral des affaires étrangères. L'association déplore le «manque d'assistance» du DFAE qui, lors de sa visite des ressortissants détenus dans les geôles dans la prison israélienne de Ktzi'ot, «n'était pas en mesure d'agir ni d'entreprendre quoi que ce soit».
«La Turquie a décidé d’organiser et payer l’hébergement et le vol de retour depuis Istanbul pour les personnes expulsées depuis Israël», nous confirme le DFAE, et de rajouter platement: «Pour de plus amples informations, veuillez vous adresser aux autorités turques». Contacté, le consulat de Turquie à Genève ne nous a pas donné de réponse au moment où nous publions cet article.
La générosité stratégique de l'Etat turc
Hicham El-Ghaoui, porte-parole de Waves of freedom, confirme que les autorités turques se sont spontanément manifestées:
Le consul général de Suisse a offert quelques maigres 40 euros — à rembourser — aux militants à Istanbul, «contrastant fortement avec le soutien concret et solidaire offert par la Turquie».
Mais cette aide du régime turc, tenu d'une main de fer par Recep Tayipp Erdogan, était-elle vraiment désintéressée? «La politique turque est très affectée par ce qui se passe à Gaza. Son gouvernement veut montrer à sa population qu'il va soutenir ses alliés pro-palestiniens à l'international», estime Cyrus Schayegh, spécialiste du Moyen-Orient au Graduate Institute de Genève. Il poursuit:
Hicham El-Ghaoui n'est pas naïf: «Il est clair qu’il y a un peu de manœuvre politique là-derrière, mais cela reste appréciable et saluable de nous avoir aidés.» Il l'affirme:
Avertissements ignorés
Sur les ondes de la RTS, Marianne Jenni, directrice des affaires consulaires du DFAE soulignait que la Confédération n'était pas responsable du rapatriement des Suisses. Elle indique que l'office a été «très actif envers les autorités israéliennes» et pointe la «responsabilité individuelle» des membres de la flottille.
On comprend dès lors que le torchon brûle entre Waves of freedom et le Département des affaires étrangères, qui reste ferme face aux doléances de l'association. Sur le réseau X, mercredi, celui-ci réitérait ses avertissements, comme pour bien rappeler les limites de la Confédération lorsque des ressortissants suisses décident consciemment de se mettre en danger. «C'est probablement une manière de signaler à d'autres qu'on ne va pas les aider en cas de pépin», estime Cyril Schayegh.
Le DFAE, à travers son ambassade à Tel Aviv, a été informé par les autorités israéliennes que les opérations d'arraisonnement de la flottille Global Sumud sont en cours. pic.twitter.com/Mh6Ipy8vVw
— EDA - DFAE (@EDA_DFAE) October 1, 2025
Un aperçu de ce dont Tel Aviv est capable
Dix Suisses sont encore détenus dans la prison de Ktzi'ot et «le DFAE continue d'œuvrer pour leur rapatriement». Waves of freeedom appelle le Conseil fédéral à œuvrer pour leur libération et critique les conditions de détention, pointant du doigt la nourriture, servie une fois par jour, le manque d'eau, le fait de dormir à même le sol et les mauvais traitements reçus par certains membres.
Parmi eux, l'ancien maire de Genève et élu de gauche radicale, Rémy Pagani, qui réclame ses médicaments, relate Blick.
Mais «ce que subissent ces Occidentaux, c'est une version très légère du traitement que le système carcéral israélien peut réserver à ses détenus palestiniens», analyse Cyril Schayegh. Il souligne: