International
Gaza

Pourquoi la guerre à Gaza est un désastre pour le climat

Les bombardements dans la bande de Gaza ont également un impact négatif sur le climat, comme le montre une nouvelle étude.
Les bombardements dans la bande de Gaza ont également un impact négatif sur le climat, comme le montre une nouvelle étude.Image: Imago, montage watson

La guerre à Gaza pollue plus que l'Estonie et le Costa Rica réunis

Une nouvelle étude montre que l'impact climatique de la guerre à Gaza est supérieur aux émissions de CO₂ du Costa Rica et de l'Estonie réunis.
03.06.2025, 21:0103.06.2025, 21:01
Plus de «International»

La destruction, le déblaiement et la reconstruction dans la bande de Gaza pourraient générer à long terme jusqu'à 31 millions de tonnes d'équivalent CO₂. A titre de comparaison, cela représente plus que les émissions de gaz à effet de serre cumulées du Costa Rica et de l'Estonie en 2023. C'est ce que révèle une nouvelle étude dont dispose le Guardian.

L'étude, qui est en cours d'évaluation par la revue spécialisée One Earth, arrive à la conclusion suivante: plus de 99% des 1,89 million de tonnes de CO₂ estimées avoir été émises entre l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023 et le cessez-le-feu temporaire en janvier 2025 sont imputables aux frappes aériennes et à l'invasion terrestre de Gaza par Israël.

L'équivalent de 84 centrales à gaz pendant un an

Carburant destiné à des générateurs électriques dans des bunkers et les roquettes du Hamas génèrent environ 3000 tonnes d'équivalent dioxyde de carbone, ce qui correspond à 0,2% du total des émissions directes liées au conflit. Selon l'étude, 50% sont causés par la livraison et l'utilisation d'armes, de chars et d'autres moyens de combat par l'armée israélienne.

Au total, les chercheurs estiment que les coûts climatiques à long terme de la destruction militaire de la bande de Gaza par Israël, et des récents conflits militaires avec le Yémen, l'Iran et le Liban, correspondent à la recharge de 2,6 milliards de smartphones ou au fonctionnement de 84 centrales à gaz pendant un an. Ce chiffre comprend également les 557 359 tonnes d'équivalent CO₂ estimées générées par la construction du réseau de tunnels du Hamas et du «Dôme de fer» israélien.

La reconstruction sera la plus coûteuse

Selon l'étude, les coûts climatiques les plus importants seront toutefois liés à la reconstruction de la bande de Gaza. On estime à 60 millions de tonnes la quantité de débris toxiques à évacuer. Selon l'étude, les coûts en CO₂ liés à ce transport et à la reconstruction ultérieure de 436 000 logements, 700 écoles, mosquées, cliniques, bâtiments gouvernementaux et autres, ainsi que 5 kilomètres de routes à Gaza, généreront environ 29,4 millions de tonnes de CO₂.

A titre de comparaison, cela correspond aux émissions totales de l'Afghanistan en 2023.

«Cette guerre à Gaza montre que les chiffres sont considérables, supérieurs aux émissions totales de gaz à effet de serre de nombreux pays, et qu'ils doivent être pris en compte pour fixer des objectifs précis en matière de protection du climat»
Frederick Otu-Larbi, coauteur de l'étude et professeur à l'Université des ressources énergétiques et naturelles du Ghana
An aerial photograph taken by a drone shows the destruction caused by the Israeli air and ground offensive in Jabaliya, Gaza Strip, on Sunday, Feb. 16, 2025. (AP Photo/Mohammad Abu Samra)
Une photo aérienne prise par un drone montre l'ampleur des destructions causées par l'offensive aérienne et terrestre israélienne à Jabaliya, dans la bande de Gaza.Image: keystone

Le budget de l’armée israélienne a atteint 46,5 milliards de dollars en 2024, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), ce qui représente la plus forte augmentation au monde. Sur la base des méthodes du Conflict and Environment Observatory (Ceobs), les émissions militaires de base d’Israël – sans compter celles liées au conflit et à la reconstruction – ont atteint 6,5 millions de tonnes de CO₂ équivalent en 2024. Cela dépasse l’empreinte carbone annuelle de l’Erythrée, pays de 3,5 millions d’habitants, selon le Guardian.

Les réactions pleuvent

Astrid Puentes, rapporteuse spéciale des Nations unies sur le droit à un environnement propre, sain et durable, voit dans cette étude une raison supplémentaire d'arrêter la guerre à Gaza. Elle ajoute:

«Que les Etats s'accordent ou non pour qualifier la guerre à Gaza de génocide, ce à quoi nous assistons a de graves répercussions sur toutes les vies de la bande de Gaza, menace les droits humains dans la région et cause l'aggravation du changement climatique à l'échelle mondiale»

Hadeel Ikhmais, directeur du bureau chargé du changement climatique au sein de l'Autorité palestinienne pour la qualité environnementale, déclare au Guardian:

«Les guerres ne tuent pas seulement des êtres humains, elles libèrent également des produits chimiques toxiques, polluent le sol, l'air et les ressources en eau, et accélèrent les catastrophes environnementales»

Selon les règles en vigueur de l'ONU, la déclaration des données relatives aux émissions militaires est facultative et limitée à la consommation de carburant, bien que les coûts climatiques de la destruction de la bande de Gaza se feront sentir dans le monde entier. Ni l'armée israélienne ni le Hamas n'ont communiqué de données sur les émissions à l'ONU.

Cette non-prise en compte des émissions de CO₂ créerait un «trou noir» dans la responsabilité des Etats. Cela permettrait aux gouvernements d'échapper à leurs «crimes environnementaux», selon Ikhmais.

A propos de l'étude
Publiée par le Social Science Research Network, cette étude est la troisième et la plus complète réalisée par une équipe de chercheurs britanniques et américains sur les coûts climatiques des 15 premiers mois de la guerre à Gaza. Elle s'appuie sur une méthodologie en cours d'élaboration, connue sous le nom de «cadre Scope 3+», qui vise à quantifier les émissions directes et indirectes liées à la guerre. Cela peut inclure la dégradation des sols, les incendies, les dommages aux infrastructures, le déplacement de populations, l'aide humanitaire, le détournement de cargos et l'aviation civile. Les chercheurs se sont appuyés sur des informations librement accessibles, des reportages médiatiques et des données provenant d'organisations humanitaires indépendantes, telles que l'ONU. Cliquez ici pour accéder à l'étude (en anglais).

(les)

Manifestations européennes en soutien à la Palestine
1 / 9
Manifestations européennes en soutien à la Palestine
Genève.
source: epa keystone / martial trezzini
partager sur Facebookpartager sur X
Voilà à quoi ressemblerait la maison d’un haut dirigeant du Hamas
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
0 Commentaires
Votre commentaire
YouTube Link
0 / 600
La distribution d'aide humanitaire à Gaza toujours à l'arrêt
Les centres de la GHF, l'organisation créée par Israël pour distribuer l'aide humanitaire à Gaza, restent fermés ce jeudi. Les opérations avaient été suspendues après la mort de dizaines de Palestiniens tués par Tsahal.

La Fondation humanitaire de Gaza (GHF), soutenue par les Etats-Unis et Israël, a repoussé sine die la réouverture de ses centres d'aide prévue jeudi dans le territoire palestinien. La GHF n'a pas communiqué de nouveau calendrier.

L’article