L'ambassadeur de Lituanie en Suède, Linas Linkevicius, a sans doute voulu plaisanter en postant sur X une photo du pont de Crimée, d'un missile en train de décoller et de Vladimir Poutine, accompagnées du texte:
If someone hasn't had a chance to take a photo at the Kerch bridge, it's still time. pic.twitter.com/SH9SxejoTk
— Linas Linkevicius (@LinkeviciusL) April 27, 2024
Mais le tweet de Linkevicius n'a pas été bien accueilli à Moscou. Dmitry Polyanskiy, représentant adjoint de la Russie auprès des Nations unies, a mis en garde l'ex-ministre des Affaires étrangères lituanien: «Le jour du jugement suprême va arriver» et les «soumis baltes» regretteront de telles déclarations.
Il semble que la Russie soit de plus en plus nerveuse sur cette question. Vendredi, Maria Vladimirovna Zakharova, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, en a rajouté une couche:
Le pont avait été considérablement endommagé en 2022 lorsqu'un camion transportant des explosifs y avait explosé. Il a toutefois été réparé peu après. Depuis, les Ukrainiens n'ont cessé de tenter de couper cet important lien avec le continent, notamment avec des drones maritimes, sans succès jusqu'à présent.
Mais cela pourrait changer. Les Etats-Unis ont annoncé l'envoi de nouveaux missiles ATACMS en Ukraine. Ceux-ci n'arriverait actuellement pas à atteindre le pont, mais ils pourraient attaquer les défenses aériennes russes en Crimée. En termes de portée, il serait possible de frapper le pont avec des missiles Taurus allemands, qui peuvent parcourir jusqu'à 500 kilomètres. Mais le chancelier allemand Olaf Scholz continuer à s'opposer à leur livraison.
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Zakharova voit les missiles américains ATACMS comme preuve que l'Ukraine prépare déjà une attaque avec l'aide de l'Occident. La porte-parole s'est aussi inquiétée de la livraison annoncée de chasseurs F-16, qui pourraient atteindre le pont de Crimée. Mais compte tenu de la puissance de la défense aérienne russe, on peut se demander si l'Ukraine risquerait l'un de ses nouveaux avions pour une telle mission.
Sans donner plus de détails, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères annonce:
Comme souvent, la Russie tente de tracer une ligne rouge pour empêcher l'Occident d'apporter une aide supplémentaire. Le pont de Crimée est un ouvrage phare de Poutine, qu'il a fait construire après la capture de la péninsule en violation du droit international. A la veille du 9 mai, «le Jour de la Victoire» en Russie, une attaque réussie serait une humiliation pour lui. Et elle couperait également une importante route d'approvisionnement.
Si le pont était endommagé de manière permanente, Moscou serait contraint d'acheminer le ravitaillement militaire par la route à travers le sud de l'Ukraine occupée. Cette route passerait par les provinces de Kherson et de Zaporijjia, dont la Russie s'est partiellement emparée au printemps 2022, mais où de violents combats font toujours rage.
Les attaques de représailles évoquées par la Russie seraient vraisemblablement dirigées contre l'Ukraine. Le politologue Gerhard Mangott ne s'attend pas à ce qu'il y ait des bombardements de surface, «car les villes en Ukraine sont bien protégées». Il met toutefois en garde contre un autre scénario, plus dangereux:
Il est pratiquement certain qu'une attaque contre le pont de Crimée aura lieu. Selon le Guardian, les services secrets ukrainiens avaient déjà déclaré il y a un mois qu'ils prévoyaient une nouvelle frappe. «Nous le ferons dans la première moitié de l'année 2024», a déclaré un fonctionnaire au Guardian début avril, ajoutant que Kyrylo Budanov, le chef de la direction principale des services de renseignement, avait déjà «la plupart des moyens pour atteindre cet objectif».
La question est de savoir si de petites unités de commandement suffisent ou si l'on attend des missiles à longue portée de l'Occident. Il est peu probable que l'Ukraine se laisse dissuader par les menaces russes.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci