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«Ils veulent nous détruire»: Le maire de Melitopol s'exprime

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«Ils veulent nous détruire»: kidnappé par les Russes, ce maire ukrainien raconte

Ivan Fedorov.
Le maire en exil de Melitopol, Ivan Fedorov.Image: Andy Hlushchenko
La ville occupée de Melitopol, dans le sud-est de l'Ukraine, est l'une des principales cibles de la contre-offensive ukrainienne. Le maire en exil, Ivan Fedorov, espère un retour rapide.
13.06.2023, 05:5213.06.2023, 08:25
Stefan Schocher, Vienne / ch media
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Pour l'armée russe, Melitopol est la plaque tournante au sud de l'Ukraine. La ville, qui comptait autrefois 150 000 habitants, est un nœud de communication pour le ravitaillement, un centre de commandement et la capitale déclarée de la Russie pour la région de Zaporijia. En tant que «porte de la Crimée», elle devrait être l'un des principaux objectifs de l'offensive ukrainienne.

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Sous l'occupation russe, Melitopol s'est fait connaître par l'extrême brutalité du régime d'occupation russe à l'encontre des opposants politiques et de leurs familles. Il a été fait état d'arrestations claniques, d'extorsion de fonds par la prise en otage de proches, de déportations, de tortures et de meurtres.

Melitopol

Ivan Fedorov est le maire de Melitopol. Aujourd'hui, il gouverne depuis Zaporijia. A 34 ans, c'est un homme politique remarquablement jeune. Il a lui-même passé deux mois en otage en Russie.

Melitopol est le centre logistique des Russes dans le sud de l'Ukraine. Mais en même temps, c'est aussi un centre de la résistance ukrainienne. Des explosions et des attentats sont signalés presque tous les jours. Quelle est la situation actuelle?
Ivan Fedorov: Vous avez raison, Melitopol est un centre de résistance. Les collaborateurs des Russes sont actuellement en panique. Mais les Russes eux-mêmes ne le sont pas encore vraiment. Nous avons beaucoup d'informations sur le fait que des collaborateurs voulaient s'enfuir, mais en ont été empêchés par les autorités russes. Leurs familles sont toutefois déjà parties.

FILE - Russian army soldiers stand next to their trucks during a rally against Russian occupation in Svobody (Freedom) Square in Kherson, Ukraine, on March 7, 2022. As Russian forces sought to tighten ...
L'occupant russe à Kherson.Image: AP

Des rapports font également état de partisans ukrainiens dans la région. Quels sont ces groupes?
La chose la plus importante que nous devons comprendre est la suivante: la Russie ne contrôle notre territoire que physiquement — même après un an et cinq mois d'occupation. Mais elle ne nous contrôle pas, elle ne contrôle pas notre attitude, elle ne contrôle pas l'humeur de nos concitoyens.

«C'est pourquoi certains organisent justement le mouvement des partisans»

Il semble que dans le cadre de la contre-offensive ukrainienne, il y ait également des avancées en direction de Melitopol. Que pouvez-vous dire à ce sujet?
Je pense que seuls les militaires devraient commenter les questions militaires. Nous avons beaucoup d'informations sur les troupes russes en territoire ukrainien et nous ne voulons pas que les troupes russes aient autant d'informations sur nos troupes. Mais nous voyons certaines choses sur la ligne de front et à l'arrière. Nous devons maintenant nous taire, aider nos soldats et leur donner tout ce dont ils ont besoin.​

Des équipes d'espions russes auraient été récemment amenées dans la ville. Est-ce que vous interprétez cela comme un signe de nervosité?
Les Russes ont tout amené à Melitopol: le FSB, le GRU, les hommes de Kadyrov, Wagner. Nous constatons que, chaque semaine, de plus en plus de troupes russes différentes arrivent sur notre territoire. Cela signifie que les Russes ne partiront pas de leur propre chef. Maintenant, nous avons vu qu'ils amènent des agents spéciaux.

«Ils veulent parler à nos citoyens et découvrir qui attend l'offensive ukrainienne et la libération, et où se trouvent leurs allégeances»

Comment expliquez-vous que la Russie ait au moins perdu la guerre pour la bonne humeur en Ukraine dès le début?
L'Ukraine et les Ukrainiens n'ont jamais été aussi unis qu'aujourd'hui. Et tout n'est finalement qu'une question de temps et de prix. Donc du prix que nous payons pour notre libération et notre vie libre. Mais les Russes ne seront jamais en mesure de nous voler nos cœurs et de nous prendre notre âme.

Vous savez très bien ce qui est en jeu pour ceux qui se battent contre le régime d'occupation. Vous avez d'ailleurs vous-même été fait prisonnier par les Russes.
Les Russes sont des terroristes. Ils commettent un génocide. Ils ne veulent pas de notre territoire. Ils veulent nous détruire en tant qu'Ukrainiens. A l'époque (réd: après la prise de contrôle de la ville par la Russie), j'ai dit ouvertement que je ne travaillerais que sous le drapeau ukrainien et selon la loi ukrainienne.

«C'est pour cela qu'ils m'ont kidnappé. Mais c'est ce qu'ils font tous les jours: des politiciens, des journalistes, des vieux, des jeunes, des gens quelconques. C'est du terrorisme»

Comment gouverner à distance une ville comme Melitopol, qui comptait autrefois 150 000 habitants?
Ce n'est pas facile. Mais toute notre équipe est en sécurité ici à Zaporijia et personne n'a collaboré. Nous essayons de soutenir nos citoyens. Nous avons ouvert un centre humanitaire à Zaporijia pour nos citoyens qui ont fui, afin de leur venir en aide. Et l'autre tâche principale est de nous préparer à la libération de la ville. Il est clair que lorsque les Russes quittent une ville, ils emportent tout ou détruisent ce qu'ils ne peuvent pas emporter. C'est donc à nous de communiquer avec l'UE et de demander de l'aide.

«Après la libération, nous n'aurons plus rien»

Nous avons donc besoin d'autant de partenaires internationaux que possible pour nous aider après la libération.

Quand pensez-vous pouvoir revenir?
J'aimerais être optimiste. J'aimerais y retourner le plus vite possible.​

Après Marioupol, Marïnka et Bakhmout, avez-vous l'espoir qu'il reste encore beaucoup de choses de Melitopol après la libération?
Personne ne peut savoir ce qui va se passer. Personne ne peut répondre à la question de savoir dans quel état sera Melitopol. Ce qui nous reste, c'est que nous nous préparons à différents scénarios. Nous allons libérer la ville et nous allons la reconstruire. Mais bien sûr, nous aimerions revenir et trouver la ville intacte.​

Traduit et adapté par Noëline Flippe

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