Cette région pro-russe serait «au bord de la faillite»
Située en République de Moldavie, la région séparatiste pro-russe de Transnistrie semble au bord de l’effondrement économique. Selon la Deutsche Welle, cette bande de terre sous l'égide de Moscou n’a plus accès aux livraisons de gaz depuis plusieurs jours.
Dans les habitations, les chauffages restent éteints, on ne trouve plus d'eau chaude, et l’industrie s’est pratiquement arrêtée. Seules les ambulances sont encore autorisées à faire le plein dans les stations-service.
Un gouffre économique existentiel
Jusqu’à présent, les séparatistes finançaient en grande partie leur administration grâce au gaz payé par les ménages et les entreprises. Des recettes directement versées dans le budget régional.
Mais les changements dans la structure d’approvisionnement et la baisse des volumes, récemment compensés tant bien que mal par des prêts russes, ont creusé un gouffre financier. Le parlement de Tiraspol prévoit donc d’utiliser les bénéfices des banques semi-publiques Sberbank et Eximbank pour combler le déficit budgétaire.
Président de la commission économique du parlement séparatiste, Viktor Guzun, a déclaré:
Les modifications des lois prévues devraient permettre au secteur bancaire de transférer ses fonds et ses bénéfices vers le budget public, afin d’assurer les principales dépenses sociales, notamment les salaires, les retraites, l’éducation et la santé.
Un mode de fonctionnement enrayé
Officiellement, le «ministre de l’Economie» de la région, Sergej Obolonik, attribue la pénurie à des problèmes techniques. Mais derrière cette crise énergétique se cache un échec politique.
En raison des sanctions occidentales contre la Russie, aucun paiement pour le gaz ne peut plus être effectué. Les livraisons russes à la Transnistrie passaient par des montages offshore opaques, que les banques européennes refusent désormais de traiter. Les opérations de contournement pratiquées jusque-là, notamment via des sociétés basées à Dubaï ou en Hongrie, ont récemment échoué, faute de contrats valides et de traçabilité des transactions.
Selon la Deutsche Welle, la Transnistrie serait «au bord de la faillite». L’arrêt des achats d’électricité par le gouvernement moldave à la centrale de Cuciurgan, contrôlée par les séparatistes, a fait disparaître une source de revenus essentielle.
Cette centrale couvrait autrefois 80% des besoins énergétiques de la Moldavie. Mais depuis mars 2022, le pays importe de plus en plus d’électricité de Roumanie et du reste du marché européen. Depuis le début de l’année, plus aucun courant ne provient de Transnistrie.
Autrefois pilier de l’économie transnistrienne, le commerce de contrebande avec l’Ukraine est lui aussi paralysé depuis le début de l’invasion russe.
Un avenir plus qu'incertain
Evoquant l’avenir de la région, le politicien moldave Alexandru Slusari a déclaré à la Deutsche Welle:
Il est cependant bien incertain de savoir si les séparatistes seront prêts à négocier avec Chisinau, ou s’ils tenteront, sur ordre de Moscou, de déstabiliser encore la région. Dans le même temps, selon la Deutsche Welle, le gouvernement moldave n’est pas prêt à réintégrer immédiatement la Transnistrie.
Relancer l’économie de la région demanderait d’énormes ressources, au moins trois milliards d’euros sur trois ans, estiment les autorités de Chisinau. La Moldavie aimerait donc procéder étape par étape.
La pression économique s’accompagne désormais de tensions politiques au sein du pouvoir transnistrien. D’ici environ 6 semaines, des élections législatives dites «parlementaires» doivent avoir lieu à Tiraspol.
Selon les sources de la Deutsche Welle, le Kremlin envisagerait de remplacer l’actuel dirigeant séparatiste Vadim Krasnoselski par Vitalii Ignatiev, jugé plus radical. Considéré comme plus fidèle à Moscou, ce dernier fait l’objet d’un mandat d’arrêt en Ukraine pour collaboration avec la Russie.
Les signes de désaccords au sein de la direction de Tiraspol se multiplient. Ces dernières années, Vadim Krasnoselski aurait pris plusieurs décisions plus modérées et entretenu des contacts informels avec Kiev. Des observateurs y voient un possible signe d’ouverture, mais l’avenir de la Transnistrie demeure incertain.
Traduit de l'allemand par Joel Espi