Alors que les fashionistas se sont à peine remis de l'édition 2025 du Met Gala de New York lundi soir, avec notamment Kim Kardashian en cuir moulant et Madonna en satin ivoire, Rome s'apprête à un défilé de mode d'un autre genre, mais tout aussi spectaculaire.
A partir de mercredi, les 133 cardinaux électeurs vont se réunir sous les fresques de Michel-Ange dans la chapelle Sixtine pour choisir le futur chef des quelque 1,4 milliard de catholiques.
Pour cette occasion exceptionnelle, ils arboreront tous la couleur pourpre, une teinte de rouge symbolisant le sang du Christ versé pour l'humanité. Cette couleur distingue les cardinaux des prélats de moindre rang (les évêques doivent ainsi se contenter du violet), tandis que le blanc est réservé exclusivement au pape.
Au-delà de sa couleur particulière, la tenue d'un cardinal est le fruit d'une longue histoire et d'une sophistication méconnue.
La base du vêtement est la soutane de cérémonie, une robe qui descend jusqu'aux talons et compte 33 boutons représentant le nombre d'années vécues par le Christ. La soutane est recouverte jusqu'aux genoux par le rochet, une robe blanche dont les extrémités sont ornées de dentelles.
Par-dessus le rochet, le cardinal se doit d'endosser le camail, une courte pèlerine rouge descendant jusqu'aux coudes fermée par une dizaine de boutons. L'imposante croix pectorale se porte par-dessus le camail.
Et la tête? Le chef des cardinaux est couvert d'une calotte, un petit chapeau rond, rouge lui aussi comme la barrette qui vient se placer au-dessus: un chapeau carré avec des rabats rigides.
Mardi place Saint-Pierre, une touriste britannique de 56 ans, Stephanie Linnell, s'est émerveillée de «ce décorum».
Lidia Spezia, une Italienne de 75 ans, s'offusque en revanche que ceux qui ne sont pas nés catholiques ne saisissent pas toujours la sacralité de ces rituels précédant l'élection du pape. Et d'arguer:
Ce mercredi 7 mai, dans l'après-midi, les cardinaux rejoindront en procession la chapelle Sixtine, accompagnés par d'autres prélats, notamment les évêques arborant eux aussi une couleur vive: le violet.
Et sans oublier les gardes suisses, qui assurent la sécurité du Vatican mais ne passent pas inaperçus avec leurs uniformes chamarrés à rayures bleues, jaunes et rouges.
Au-delà de leur pompe colorée, ces traditions sont le fruit de plusieurs siècles, avec une signification particulière pour chaque couleur, chaque objet liturgique et chaque vêtement. Un frère capucin, Kaisar Sihombing, résume:
Kaisar Sihombing, 35 ans, était mardi place Saint-Pierre, vêtu de la sombre tunique marron avec une simple corde autour de la taille, marque des ordres franciscains, qui font vœu de pauvreté. Pour lui, la pompe du conclave «fait partie de l'identité de l'Eglise, il n'y a rien de mal à cela».
Lors de l'exposition La mode et l'imagination catholique en 2018 au Metropolitan Museum of Art de New York, son commissaire Andrew Bolton avait jugé l'habillement «fondamental» pour toute discussion sur la religion. Et d'écrire:
Au fil de l'Histoire, ces tenues «ont affirmé des allégeances religieuses, confirmé des différences religieuses et ont été utilisées pour distinguer les hiérarchies et les sexes».