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Ukraine: «Il faudra 2 ans aux Russes pour prendre Donetsk»

Ukraine: «Il faudra 2 ans aux Russes pour prendre Donetsk»
Des troupes russes dans un lieu inconnu en Ukraine.Image: keystone

«Il faudra deux ans aux Russes pour conquérir la région de Donetsk»

La guerre contre l'Ukraine pourrait se jouer cette année. La Russie gagne du terrain et joue la montre - mais combien de temps les troupes de Poutine tiendront-elles?
06.01.2025, 05:2606.01.2025, 08:30
Martin Küper / t-online
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La Russie a conquis plus de 4000 kilomètres carrés de territoire ukrainien l'année dernière, ce qui correspond à environ une fois et demie la superficie du canton du Tessin. Mais ce gain de territoire a eu un prix: plus de 420 000 soldats russes ont été blessés ou tués dans les combats, selon les données ukrainiennes.

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La grande question est de savoir combien de temps encore la Russie peut-elle se permettre de réaliser des progrès relativement modestes au prix de si grandes pertes?

La priorité de la Russie: Pokrovsk

Jusqu'à présent, les Ukrainiens n'ont pas réussi à stopper la lente mais constante progression des Russes dans l'est du pays. Selon l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW), l'objectif d'étape le plus déterminant des troupes du Kremlin reste la ville stratégique de Pokrovsk, dans la région de Donetsk. D'importantes routes d'approvisionnement des troupes ukrainiennes se croisent dans cette ville qui comptait autrefois 53 000 habitants.

La conquête de Pokrovsk devrait rapprocher de manière décisive Poutine de son objectif: prendre le contrôle de l'ensemble de l'oblast de Donetsk.

Depuis la fin de l'année 2023, la Russie a fortement concentré ses actions offensives sur cette partie du territoire. Ainsi, au cours de l'année 2024, les Russes ont réussi à conquérir les petites villes d'Avdiïvka, Selydove, Vouhledar et Kourakhove. Rien que pour ces avancées, les Russes auraient perdu environ 150 000 soldats, selon les déclarations récentes de l'expert militaire Christian Mölling à t-online.

Ces gains territoriaux ont tout de même permis aux Russes de progresser vers Pokrovsk. Actuellement, selon l'ISW, ils tentent d'encercler la ville par le sud et le nord-est. Les chercheurs en stratégie militaire n'anticipent toutefois pas une percée rapide des Russes.

«Si les forces russes avancent à la même vitesse qu’en 2024, il leur faudra deux ans pour conquérir les territoires restants de la région de Donetsk», écrit l’ISW dans son dernier rapport de situation.

«Et cela supposerait que les Russes puissent s'emparer de zones urbaines aussi facilement que de champs et de villages, et que les Ukrainiens ne lancent pas de contre-attaques significatives dans la région.»

Mais il ne faut pas oublier que, jusque-là, les Ukrainiens n'ont pas réussi à stopper l'avancée russe. L'aide militaire occidentale reste donc essentielle pour le pays.

Le sort des Ukrainiens à Koursk

Les problèmes rencontrés par les défenses ukrainiennes semblent en partie être de leur propre fait. Depuis des mois, des soldats ukrainiens rapportent des carences importantes en terme d'effectif sur le front à Pokrovsk. Ils évoquent également des commandants incompétents et des ordres dépourvus de sens sur le plan militaire. «Le manque de personnel et ses répercussions sur le moral des troupes affaiblissent les lignes de défense ukrainiennes», écrit l’ISW.

«Les responsables doivent résoudre ces problèmes pour stabiliser la situation sur le front»

Les troupes ukrainiennes semblent également être fortement sous pression dans la région frontalière russe de Koursk. Début août, elles avaient avancé d’environ 35 kilomètres en territoire russe, selon le chef de l’armée ukrainienne, dans le but d’empêcher l’ouverture d’un nouveau front par les Russes dans la région ukrainienne de Soumy.

Depuis, les Ukrainiens doivent combattre dans cette zone avec des unités particulièrement mobiles et expérimentées contre les troupes russes, qui ont reçu l’ordre du Kremlin de reprendre le contrôle de cette région.

De violents combats autour d'une petite ville en ruines

Du côté russe, des milliers de soldats nord-coréens ont rejoint les combats dans la région de Koursk. Le dictateur Kim Jong-un aurait envoyé jusqu’à 13 000 soldats en Russie, mais les pertes parmi les militaires nord-coréens seraient considérables. Les conditions de vie de ces soldats étrangés au service du Kremlin seraient accablantes, les poussant souvent au suicide.

Malgré des efforts colossaux et des pertes massives, les Russes n’ont jusqu’à présent pas réussi à déloger les Ukrainiens de Koursk, bien que ces derniers ne contrôlent désormais plus qu’une petite partie du territoire initialement occupé.

Fellow soldiers carry a coffin of leading actor of the music and drama theatre Petro Velykiy, 48, who was killed in a battle with the Russian troops in Russia's Kursk region, during farewell cere ...
Des Ukrainiens enterrent un soldat tombé à Koursk.Image: keystone

Bien que les troupes russes concentrent leurs offensives en Ukraine principalement en direction de Pokrovsk, elles lancent également des attaques dans d'autres parties du pays. L'une des zones concernées est la petite ville de Toretsk, située à environ 30 kilomètres au nord de la capitale régionale, Donetsk. Depuis le début de l'été, les Russes y intensifient leurs assauts, sans toutefois parvenir à vaincre l’opposant.

Des images sur les réseaux sociaux ont dévoilé à plusieurs reprises de violents combats dans cette ville désormais largement détruite, qui comptait autrefois 35 000 habitants. La conquête de Toretsk rapprocherait également la Russie de la prise de contrôle de la région de Donetsk.

Les Russes pourchassent des civils à Kherson

L'offensive terrestre que la Russie a lancée en 2024 au nord de la grande ville de Kharkiv semble s'être largement essoufflée. Selon les déclarations russes, cette opération visait à établir une zone tampon pour empêcher les attaques d'artillerie ukrainiennes sur la ville russe de Belgorod.

Cependant, d'après les évaluations de l'ISW, cette offensive n'a obtenu aucun succès notable pour l'armée russe. Malgré cela, les habitants de Kharkiv continuent de souffrir des attaques régulières menées par les Russes, utilisant des missiles, des bombes planantes et des drones kamikazes.

A Ukrainian serviceman of the 57th Mechanised Brigade fire 120mm mortar towards Russian positions near Kharkiv, Ukraine, Tuesday, Dec. 24, 2024. (AP Photo/Andrii Marienko)
Un soldat ukrainien près de Kharkiv.Image: keystone

La situation des habitants de Kherson est tout aussi dramatique. L'Ukraine avait libéré cette ville située dans le sud du pays en novembre 2022, repoussant les Russes de l'autre côté du Dniepr. Cependant, depuis leur position, les troupes de Poutine continuent de bombarder la ville avec des frappes aériennes. Les attaques de drones visant les civils sont particulièrement perverses et redoutées. Des pilotes de drones russes traqueraient des innocents depuis les airs pour s’entraîner. Une pratique cyniquement appelée «safari humain». Des centaines de civils auraient ainsi déjà été tués ou gravement blessés.

Moins de bombes planantes grâce à l'ATACMS

Dans presque toutes les régions du pays, la population civile ukrainienne souffre des frappes aériennes russes visant les centrales électriques. Bien que l'Ukraine dispose de systèmes de défense antiaérienne occidentaux et de quelques avions de combat de type F-16, les Russes adaptent constamment leurs tactiques d'attaque. Ils cherchent soit à contourner la défense aérienne, soit à la submerger par leur nombre. Récemment, les Russes ont utilisé de nombreuses copies bon marché du drone iranien Shahed pour épuiser les capacités de la défense antiaérienne ukrainienne.

En revanche, les attaques russes avec les redoutées bombes planantes, capables de transporter jusqu'à 1500 kg d'explosifs, ont considérablement diminué. Ce type d’arme avait causé des dégâts massifs dans les villes ukrainiennes et sur le front. Depuis que l'Ukraine a obtenu, début novembre, l'autorisation d'utiliser les missiles américains ATACMS contre des cibles en Russie, les attaques russes avec ce type de bombes ont diminué d'environ moitié, selon Kiev. La Russie doit désormais stationner ses bombardiers plus loin de la frontière et ne peut plus les envoyer en mission aussi fréquemment.

Crainte de Trump, espoir en Merz

Dernièrement, l'Ukraine a intensifié ses attaques contre des cibles en Russie. Rien que ces derniers jours, l'Ukraine a attaqué un poste de commandement russe à Koursk, un dépôt de pétrole dans l'ouest de la Russie, ainsi qu’un haut responsable militaire en plein Moscou. Le présumé criminel de guerre Igor Kirillov et son assistant ont perdu la vie lors de cette attaque.

La production d’armes en Ukraine a également considérablement augmenté ces derniers mois. Le pays dispose désormais de plusieurs missiles et drones développés localement, capables de frapper profondément à l'intérieur du territoire russe. Le développement et la production de ses propres systèmes d'armement sont essentiels pour Kiev. En effet, les systèmes d'armement occidentaux, comme le missile de croisière Storm Shadow ou les missiles ATACMS, ont été livrés en quantités très limitées et leur utilisation est soumise à des restrictions politiques. Et il est plus qu'incertain que l'Occident soutienne davantage l'Ukraine en 2025 qu'il ne l'a fait jusqu'à présent.

Le 20 janvier, Donald Trump prendra le pouvoir aux Etats-Unis. La manière dont Trump va aborder la question de l'Ukraine reste pour l'instant incertaine. Cependant, Kiev et les Européens craignent que le partisan de Poutine réduise considérablement le soutien américain à l'Ukraine. Le président démocrate sortant, Joe Biden, tente actuellement de faire parvenir autant d'aide militaire et financière que possible avant la fin de son mandat.

Les Ukrainiens devraient suivre avec attention les élections fédérales allemandes du 23 février. Le candidat à la chancellerie, Friedrich Merz, avait suggéré d'envoyer à Kiev le missile de croisière allemand Taurus. Cependant, le chancelier Olaf Scholz (SPD) a fermement rejeté cette idée jusqu'à présent, ce qui a déçu de nombreux Ukrainiens.

Traduit et adapté de l'allemand par Léon Dietrich

La guerre en Ukraine dans l'œil d'Alexander Chekmenev

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La guerre en Ukraine dans l'œil d'Alexander Chekmenev
Faces of war pour le New York Times.
source: alexander chekmenev
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