Ils ont beau avoir pour point commun d'être issus tous deux d'un Etat rural, les deux candidats à la vice-présidence des Etats-Unis ne pourraient pas être plus différents. D'un côté, un ancien prof du lycée de 60 ans, qui bichonne sa réputation de «papa» affable du Midwest, sa passion pour la chasse et ses prises de position progressistes. De l'autre, un diplômé de la faculté de droit de Yale, auteur à succès et ancien financier de 40 ans, au style plus virulent et surtout, profondément conservateur.
Deux personnalités, deux visions du monde, qui s'affronteront pour la première fois ce mardi soir, sur CBS.
Leur débat télévisé s'annonce plus chaotique que celui qui a opposé Donald Trump et Kamala Harris, il y a trois semaines - la chaîne n'ayant pas prévu de couper les micros des participants, à moins d'une nécessité absolue. Les candidats, debout, privés de notes écrites, ne disposeront que d'un stylo et de feuilles de papier pour tout soutien. Ils ne seront pas autorisés à interagir avec leurs collaborateurs de campagne au cours des deux pauses de la soirée.
Les débats entre vice-présidents n’ont souvent qu’un effet limité (si ce n'est nul) sur l’issue d’une élection présidentielle. Ce qui ne signifie pas que JD Vance et Tim Walz n’auront pas la pression pour attirer davantage de curieux que le bras de fer entre leurs deux patrons, le 10 septembre - qui, rappelons-le, a cumulé près de 67 millions de téléspectateurs. Dans l'histoire politique récente, le seul débat vice-présidentiel à n’avoir jamais compté davantage de spectateurs que celui des aspirants à la présidence remonte à 2008, entre Joe Biden et Sarah Palin.
Les stratèges des deux camps estiment toutefois que, cette fois-ci, les choses pourraient être un peu différentes. En effet, étant donné que Donald Trump et Kamala Harris risquent fort de ne pas se retrouver pour un second débat, le face-à-face de mardi pourrait être le dernier entre les deux camps, avant que la majorité des électeurs ne se décident. «Ce sera très probablement la dernière opportunité pour l’électorat américain de voir deux candidats différents sur la même scène parler de leurs différentes visions», estime Corey Lewandowski, conseiller de longue date de Trump, auprès du Washington Post.
Les objectifs de Tim Walz comme de JD Vance sont clairs. Non pas de se vendre eux-mêmes, mais de défendre le boss bec et ongles - sans oublier de porter quelques coups bien sentis, d'avoir l'air crédibles en tant que remplaçants potentiels à la Maison-Blanche et, surtout, de s'éviter tout embarras inutile.
Une mission sans doute plus délicate en ce qui concerne le colistier de Trump, JD Vance, qui affiche la cote de popularité la plus basse des quatre candidats sur les deux tickets présidentiels. Selon un sondage du Wall Street Journal réalisé à la fin du mois dernier, non seulement les électeurs avaient une meilleure opinion de son concurrent Tim Walz (46% contre 40% pour JD Vance), mais le sénateur de l'Ohio accusait en outre un taux d'opinion défavorable plus élevé (50% pour lui, contre 40% pour Tim Walz).
JD Vance devra en outre affronter le regard d’un spectateur plus important que quiconque: l'impitoyable Donald Trump, qui l'a choisi comme colistier en partie grâce à son talent pour débattre. Pour l'instant, le milliardaire a des raisons de regretter son choix: son jeune colistier est empêtré dans les controverses depuis le début difficile de sa campagne, entre ses commentaires désobligeants sur les «femmes à chats sans enfants» et ses allégations infondées sur les immigrants haïtiens mangeurs d'animaux domestiques à Springfield.
JD Vance a cependant pour lui d'adorer les débats et une certaine expérience en la matière. S'il n'a pris ses fonctions publiques de sénateur que l’année passée, il a dû survivre à une douzaine de débats pour obtenir son poste. Réputé pour son style agressif, l'écrivain se délecte des échanges combatifs sur les chaînes d'info en continu et les émissions du dimanche matin.
Ce débat, il l'attend et le réclame depuis des mois. Au contraire de son rival, Tim Walz, qui se considère comme mauvais orateur et pour qui cette rencontre est une source d'anxiété depuis des semaines, selon des proches du gouverneur démocrate. Interrogé par MSNBC peu après le débat entre Kamala Harris et Donald Trump, pour savoir s'il avait déjà commencé à réfléchir à sa propre rencontre avec son adversaire républicain, le démocrate avait répliqué:
Ses collègues démocrates ne partagent pas tous ses inquiétudes - rassurés à la fois par les sondages de popularité de Tim Walz, qui lui assurent une marge de manœuvre supplémentaire, mais aussi par les débats télévisés auxquels il a pris part au cours de sa longue carrière politique. Un historique qui laisse deviner que, si ce politicien à l'accent prononcé et adepte du tir au faisan n'est pas l'orateur le plus vibrant de son parti, il reste un débatteur chevronné.
Dans tous les cas, et même si ce débat n'aura probablement pas un impact massif sur l’issue de l’élection, les personnalités de JD Vance et de Tim Walz sont susceptibles de faire pencher la balance. «Si quelques milliers de votes sont affectés dans un Etat compétitif et que c'est davantage que la marge, alors cela peut avoir des conséquences», note Joel Goldstein, spécialiste de la vice-présidence auprès de Politico. Ne reste pour les deux concurrents qu'à faire des étincelles... et surtout, éviter une gaffe fatale.