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Cette nouvelle stratégie de la Russie sème la peur en Ukraine

L'utilisation des drones à des fins de guerre psychologique continue de s'amplifier en Ukraine.
L'utilisation des drones à des fins de guerre psychologique continue de s'amplifier en Ukraine.Image: watson

Poutine a une nouvelle méthode pour enrayer la mobilisation en Ukraine

Les attaques russes contre les centres de recrutement deviennent un instrument de guerre psychologique, d'autant plus que la mobilisation est un sujet délicat au sein de la population ukrainienne.
17.07.2025, 05:2817.07.2025, 05:28
Denis Trubetskoy / CH media
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Un dimanche à Samar, dans l’est de l’Ukraine. Un drone frappe le centre de recrutement local. En pleine journée, comme cela s’est déjà produit dans des villes telles que Kharkiv, Odessa ou Zaporijia. Ces attaques suivent une logique bien établie.

Un message cynique est inscrit sur le drone, en ukrainien:

«Pour le centre de recrutement, de la part des habitants reconnaissants de la ville de Samar»

Des inscriptions similaires ont récemment été observées sur d’autres drones dirigés depuis la Russie vers diverses localités.

Depuis le début de la guerre en février 2022, Moscou tente de perturber le processus de mobilisation en Ukraine. Dernièrement, on a observé une forte augmentation des incendies criminels visant les centres de recrutement de l’armée. Les auteurs seraient souvent des Ukrainiens de tout âge, attirés par une rémunération facile ou contraints par des menaces. Jusqu’à présent, ces actes n’ont eu qu’un effet limité.

Mais aujourd'hui, la situation est différente: la Russie a lancé une vaste campagne de dénigrement, principalement en ligne, contre la mobilisation ukrainienne. Certes, des cas de mobilisation forcée et violente ont été signalés en Ukraine. Mais la Russie en exagère fortement l’ampleur du phénomène dans sa propagande, dans le but de semer le doute au sein de la population.

Le centre de recrutement de Poltava après une attaque de drone russe début juillet : deux personnes sont mortes dans l'attaque et onze ont été blessées.
Le centre de recrutement de Poltava après une attaque de drone russe début juillet: deux personnes sont mortes dans l'attaque et onze ont été blessées.Image: Getty

La peur des drones russes s'immisce dans les esprits

Cette propagande semble porter ses fruits. La peur de la mobilisation augmente chez les hommes, d’autant plus que la guerre se prolonge et que les drones russes deviennent de plus en plus dangereux. Le fait que la Russie cible désormais intentionnellement les centres de recrutement ukrainiens avec des drones et des missiles constitue une nouveauté dans ce conflit.

Vitaliy Sarantsev, porte-parole des forces terrestres ukrainiennes responsables des centres de recrutement, déclare:

«Les attaques russes contre les centres de recrutement sont une tentative de perturber la mobilisation en Ukraine.»

Selon lui, d’autres attaques de ce type sont inévitables, mais les Russes ne parviendront pas à stopper la mobilisation, qui se poursuivra sans interruption.

Un drone kamikaze russe lors d'une attaque sur Kiev.
Un drone kamikaze russe lors d'une attaque sur Kiev.Image: Efrem Lukatsky / AP

Après trois ans et demi de guerre, l'enrôlement de nouveaux soldats est devenu l’un des plus grands défis pour l’armée ukrainienne, notamment en raison de l’écart démographique avec la Russie. Pourtant, rien n'indique que l’Ukraine pourrait échouer par manque de personnel militaire, d’autant que les avancées russes lors de la campagne d’été restent limitées.

Il est donc peu probable que la nouvelle stratégie de Poutine change fondamentalement la donne. Tout d'abord parce que l’Ukraine dispose d’un grand nombre de bureaux de recrutement. Ensuite, parce que les bases de données nécessaires ont été beaucoup mieux numérisées qu’auparavant. La bureaucratie sur place a donc moins d’importance qu’autrefois.

User des réseaux sociaux pour semer le doute

L’objectif principal des attaques russes sur les centres de recrutement est avant tout d'ordre psychologique. C’est ce qu’explique Ivan Tymotchko, chef de l’association des réservistes des forces terrestres. Le but est de provoquer un conflit ouvert entre les civils et les militaires. La Russie espère ainsi attiser l’opposition à la mobilisation en Ukraine.

Pour ce faire, Moscou mise de plus en plus sur les réseaux sociaux ukrainiens. Sur Telegram notamment, une vague de commentaires soi-disant ukrainiens se réjouissant des attaques contre les centres de recrutement s’est répandue ces derniers jours.

Ces commentaires reprennent des récits connus, comme l’idée que les députés et leurs fils devraient être mobilisés en premier, ou que la guerre continuerait parce que les dirigeants ukrainiens en profiteraient financièrement.

Mais le fait que la plupart de ces messages proviennent en réalité de Russie est évident, notamment à cause des potentielles conséquences juridiques pour les citoyens ukrainiens. Le Kremlin touche néanmoins un point sensible: l'hésitation de nombreux hommes ukrainiens à rejoindre la mobilisation.

Une stratégie revue pour répandre la peur

D’un côté, la poursuite de la mobilisation est nécessaire à la défense contre la Russie. De l’autre, la peur augmente chez les potentielles recrues, parce que le front est devenu de plus en plus mortel, surtout à cause des drones russes.

Cette nouvelle tactique russe est plus dangereuse pour la cohésion de la population ukrainienne que les attaques contre les centrales électriques, par exemple, qui ont privé de nombreux Ukrainiens de chauffage et d’électricité en hiver. La Russie s'attendait à des protestations au sein de la population, mais à l'inverse, ces attaques ont renforcé l’unité des Ukrainiens. Miser sur la mobilisation semble donc une stratégie bien plus prometteuse pour la Russie.

Traduit de l'allemand par Anne Castella

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Un bâtiment en flammes après un bombardement russe, Kiev.
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L'Ukraine attaque une ville russe située à 1300 km de ses frontières
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