Svetlana, c'est l'incarnation du luxe, de la haute société, de la richesse. Des bijoux par-ci, du champagne par là, une Rolls-Royce et une villa à plusieurs millions. Mais Svetlana n'est pas qu'une simple femme au foyer fortunée. Elle est l'épouse du vice-ministre de la Défense de Russie, Timur Ivanov. Elle a d'ailleurs été aperçue cette année dans une station de ski française de luxe, malgré les sanctions sévères prises à l'encontre de son mari. Un exemple, parmi tant d'autres, de sa personnalité.
On ne sait pas grand-chose des jeunes années de Svetlana Zakharova. Un article du magazine russe Tatler nous apprend qu'elle a étudié l'économie et obtenu son diplôme dans les années 90, alors que la Russie traversait une pénurie de personnel qualifié. Ce qui lui sera favorable puisqu'elle occupera rapidement un poste de directrice financière. Elle a une vingtaine d'années.
Dans l'entreprise pour laquelle elle travaille, le leader russe dans le secteur de l'imprimerie, elle fait la connaissance de son futur mari Mikhail Manevich. Ils tombent amoureux et se diront «je le veux» peu de temps après. Il a 48 ans, elle en a 22. Elle portera désormais le nom de Svetlana Manevich.
Mikhail Manevich est très fortuné — et se doit de l'être. Svetlana a besoin, selon ses propres dires, d'environ 50 000 francs par mois pour subvenir à ses besoins. Mais comme beaucoup de choses dans la vie, leur union ne dure pas indéfiniment. Et en 2008, les Manevich divorcent après plusieurs années de mariage. Le magazine people Tatler couvrira d'ailleurs leur séparation. A Moscou, deux camps de fans se seraient même formés, les pro-Svetlana et les pro-Mikhail.
Personne ne connait vraiment la raison de la séparation. Une chose est sûre, Mikhail s'est beaucoup battu pour Svetlana.
Mais rien n'y fait. Svetlana s'appelle à nouveau Sakharova et s'est entichée d'un nouvel homme qui deviendra son compagnon, Timur Ivanov.
Lorsque les deux se rencontrent, Ivanov n'est «que» vice-président d'une grande entreprise russe d'électricité nucléaire. Plus tard, il devient vice-président du gouvernement du district de Moscou. Son chef? Sergueï Choïgou, aujourd'hui connu comme ministre de la Défense de Poutine. Avec lui, Svetlana peut enfin profiter pleinement de la vie. En août 2013, elle poste sur Instagram une photo de sa fille à Saint-Tropez. En légende, elle écrit que sa fille joue avec des bouchons de champagne et plaisante sur le fait qu'elle vit une enfance difficile.
A Saint-Tropez, la famille a loué une villa pour les vacances — 5 chambres, 5 salles de bain et 2 pièces pour le personnel. Coût de la petite maison: environ 120 000 francs par mois. A cela s'ajoute un yacht de 37 mètres de long, pour le modique prix de 90 000 francs. C'est en tout cas ce qu'affirment les recherches de l'équipe du politicien d'opposition Alexeï Navalny.
Un an plus tard, en 2014, la famille retourne à Saint-Tropez. Mais cette fois-ci, c'est une nouvelle villa de huit chambres à coucher qu'ils occuperont. Son prix? 110 000 francs par mois. En 2015, la maison n'aura que sept chambres, mais au prix de 150 000 francs pour un mois de vacances. En 2016, Timur gravit un échelon supplémentaire: il suit Choïgou au niveau national et devient vice-ministre de la Défense.
On pourrait penser que Timur, désormais employé de l'Etat, devrait faire preuve d'un peu de retenue et montrer l'exemple. Il n'en est rien: Saint-Tropez reste au menu de la petite famille. Le vice-ministre de la Défense y fête d'ailleurs son anniversaire en 2016 dans une villa qui compte un court de tennis et un héliport. Sans oublier le yacht. Les contrats sont établis au nom d'une nounou de la fille. Coût total de ces petites vacances sur la Côte d'Azur? Environ 260 000 francs pour un mois.
Mais les vacances ne sont pas la seule excuse pour dépenser. Loin de là.
L'historique des e-mails de Svetlana, dont dispose l'équipe de Navalny, montre l'immensité des dépenses de Svetlana. Entre 2013 et 2018, 200 000 francs sont dépensés pour l'achat d'une Rolls-Royce Corniche. C'est la deuxième. L'autre, elle la conduit uniquement en Russie. Le modèle le plus récent roule sous le soleil du sud de la France.
Et puis, le 24 février 2022, la Russie attaque l'Ukraine. Le mari de Svetlana, dans son rôle de vice-ministre de la Défense, est également responsable de l'événement. Mais cela ne l'empêche pas de continuer à cultiver son style de vie pour le moins décadent. En mars 2022, elle dépense d'un coup plusieurs centaines de milliers de francs chez un joaillier parisien que beaucoup considèrent comme le «Fabergé de notre temps», où il faut d'ailleurs une invitation privée pour s'y rendre. Ce n'est pas elle qui paie, mais un ami. Pas question de mêler le nom du vice-ministre de la Défense à de telles dépenses.
Mais où Svetlana (ou plutôt Timur) trouve-t-elle l'argent pour de tels bibelots coûteux? L'Etat russe offre certainement une rémunération confortable pour une telle position dans la hiérarchie politique, mais de telles sommes sont bien au-delà du montant officiel.
Pour mieux comprendre comment un tel train-train quotidien est possible, il faut se pencher sur les activités de Timur Ivanov.
En tant que vice-ministre de la Défense, plusieurs tâches relèvent de son domaine. Outre la représentation de Choïgou, Timur Ivanov est également responsable de l'infrastructure et des projets de construction de l'armée. Des dépôts de munitions? Timur Ivanov. Nouvelles casernes pour le corps des cadets? Timur Ivanov. L'«Eglise principale des forces armées de Russie»? Encore une fois, Timur Ivanov.
Le nouveau projet prestigieux? La reconstruction de Marioupol. Et c'est là que l'histoire devient intéressante.
La ville occupée de Marioupol a récemment fait la Une des journaux en raison de la visite du chef du Kremlin en personne, Vladimir Poutine. L'objectif de sa visite: il voulait voir l'avancée des travaux de construction dans la ville, bombardée par la Russie.
Les travaux sont effectués par plusieurs entreprises, mais l'une d'entre elles a décroché un contrat particulièrement important: Olympsistroi. Ces dernières années, l'entreprise a obtenu des contrats d'une valeur de plus de 700 millions de francs. Ces contrats ont été attribués, en toute logique, par Timur Ivanov.
Deux hauts responsables d'Olympsistroi possèdent en également une autre entreprise, Oboronpeststroi. Ce nom apparaît plusieurs fois dans les archives de l'historique des mails de Svetlana — et plus précisément dans des factures. Oboronpeststroi a ainsi payé à plusieurs reprises des factures pour des projets privés de la famille. Du marbre pour leur résidence secondaire d'hiver, des installations sanitaires pour l'appartement moscovite, des armoires, des matériaux de construction et tout ce que le cœur peut désirer, payés par d'autres.
Le terrain sur lequel la famille construit actuellement sa deuxième maison de campagne appartient également à une entreprise qui, elle, appartient à Oboronpeststroi. Une coïncidence?
Timur Ivanov a été placé sur la liste des sanctions de l'Union européenne (UE) en octobre 2022. Normalement, de telles restrictions s'appliquent également aux membres de la famille et aux proches. Le nom de Svetlana ne figure toutefois sur aucune liste. Pourquoi? Elle a divorcé quelques mois auparavant. Elle avait pourtant récemment fait changer son nom en Ivanov. Il est intéressant de noter que cette fois-ci, le Tatler n'en parle pas.
Pas de dispute publique, pas d'Une de magazine, absolument rien ne laisse supposer que les deux ne forment plus un couple. Mais officiellement, Svetlana n'a plus rien à voir avec Timur.
Et c'est ainsi que Svetlana a été aperçue au début de l'année dans la luxueuse station de ski française de Courchevel, en train de flâner, de faire du shopping et de faire la fête. Comme il se doit pour la classe supérieure russe, habillée de fourrure.