Après le mirage des JO, les sans-abris sont de retour à Paris
Au milieu des touristes et des volleyeurs de Paris plage, des familles sans abri, affaires entassées dans des sacs, patientent par dizaines devant l'Hôtel de Ville dans l'espoir d'obtenir un hébergement, un bien rare en été, alertent les associations.
Dans la file, Marwa, Ivoirienne de 33 ans, serre contre elle son bébé malade, inquiète de ne pas réussir à décrocher de places pour «le petit qui ne se sent pas bien» et ses trois autres enfants.
Il y a aussi Mariam* (prénom d'emprunt), 56 ans, qui a fui la Côte d'Ivoire après un veuvage, et qui montre sa tente roulée sous son bras. La demande d'asile soupire:
Chaque soir, depuis une semaine, ils sont quelque 200 à faire ainsi la queue au cœur de la capitale, sur l'esplanade où, il y a un an, les festivités des Jeux olympiques battaient leur plein. Migrants pour la plupart, avec un tiers d'enfants parmi eux, ils espèrent que l'association d'aide aux étrangers, Utopia 56, leur épargnera une nuit à la rue.
«La situation est particulièrement tendue en été», alerte Charlotte Kwantes, membre de l'association, qui tient toute l'année une permanence sur le parvis pour tenter de trouver in extremis un hébergement d'urgence aux plus précaires, refoulées des habituelles structures d'accueil pour sans-abri.
20 000 places d'urgence manquent en France
Mais ce soir-là, au cœur des vacances estivales, malgré ses efforts, plus de soixante candidats, dont 17 enfants, ne trouveront pas de solution. Services publics au ralenti, bénévoles associatifs en vacances, écoles et gymnases fermés et ne pouvant donc plus être utilisés en ultime recours: les raisons sont multiples, énumèrent les associations. Eleonore Schmitt, coordinatrice du Collectif des associations pour le logement, rassemblant 39 organisations, déplore:
«Les associations ne peuvent pas pallier les manquements de l’Etat qui doit assurer ses responsabilités et remplir ses obligations en matière de droit à l'hébergement et droit au logement», insiste la représentante du Collectif, pour qui «l’héritage social promis après les Jeux olympiques n’a pas eu lieu».
«Il n'y a eu aucune différence pour les personnes précaires», confirme Charlotte Kwantes pour Utopia 56. Elle explique:
«C’est mieux que dormir dehors»
La Ville de Paris, à qui les associations reprochent notamment un défaut de «mise à l'abri» des femmes enceintes et des mères isolées avec de jeunes enfants, assure continuer d'ouvrir «été comme hiver, des centres pour mettre à l'abri des personnes en famille».
«1063 personnes sont actuellement mises à l’abri dans des lieux municipaux transformés pérennement ou au sein de gymnases de la Ville», indique la collectivité. La préfecture d’Île-de-France assure pour sa part «qu’il n’y a pas de fermeture de places d'hébergement liée à la période estivale».
«Le parc d’hébergement francilien reste à un niveau élevé (plus de 113 000 places)», ajoute la préfecture, indiquant que «les fermetures de structures sont accompagnées d’ouvertures, comme la quarantaine de places dans ses locaux pour les femmes isolées dont certaines avec enfants». Mais cela reste insuffisant.
Arrivés en France il y a deux ans, Maria et son mari dorment depuis un mois dans la rue avec leur fille de quatre mois. «Le 115 nous dit que l'on est plus prioritaire», raconte-t-elle à propos du numéro du Samu social, chargé d'orienter vers des hébergements d'urgence.
A 21 heures, la famille trouve finalement du répit dans d'anciens bureaux à Bagnolet (Seine- Saint-Denis) prêtés à Utopia 56. «C’est mieux que dormir dehors», admet la mère de famille, en installant sa tente dans le bâtiment vide. Mais dès le lendemain matin, il faudra quitter ce lieu pouvant accueillir jusqu'à 120 personnes.