L'UE ouvre une enquête contre WhatsApp
L'UE a lancé jeudi une enquête sur le géant américain de la tech Meta, propriétaire de WhatsApp, pour une possible infraction aux règles de la concurrence liée aux fonctions d'intelligence artificielle (IA) dans l'application de messagerie.
Cette nouvelle enquête démontre la détermination de Bruxelles à réguler les entreprises du numérique, malgré les pressions répétées des Etats-Unis de Donald Trump, qui accusent l'UE de cibler injustement les champions américains du secteur.
Selon la Commission européenne, une nouvelle politique annoncée par Meta «pourrait empêcher les fournisseurs tiers d'intelligence artificielle de proposer leurs services via WhatsApp», ce qui, si ces soupçons étaient confirmés, constituerait un abus de position dominante. Contacté, un porte-parole de WhatsApp a rejeté catégoriquement ces allégations.
Au moment où «les activités d'IA sont en plein développement», Bruxelles veut s'assurer «que les citoyens et les entreprises bénéficient pleinement de cette révolution technologique, en empêchant les détenteurs de positions dominantes d'en profiter pour évincer les concurrents», souligne pour sa part Teresa Ribera, vice-présidente de la Commission européenne chargée de la Concurrence.
WhatsApp pourrait bloquer certains chatbots
Actuellement, explique l'exécutif européen, WhatsApp permet aux entreprises d'échanger avec leurs clients via sa plateforme, et certaines le font en utilisant des services d'IA développés par des fournisseurs indépendants de Meta, sous la forme de robots conversationnels ou «chatbots» qui répondent par exemple aux questions des consommateurs.
Mais selon la Commission, de nouvelles règles de fonctionnement annoncées par Meta pourraient priver d'accès ces fournisseurs tiers, au bénéfice de son propre service, baptisé Meta AI. Un porte-parole de WhatsApp conteste:
La multiplication des chatbots d'IA utilisant l'interface de programmation (API) de WhatsApp destinée aux entreprises «met nos systèmes à rude épreuve, alors qu'ils n'ont pas été conçus pour supporter une telle charge», d'où les changements annoncés, a-t-il indiqué. Avant d'ajouter:
Pressions des Etats-Unis
Fin novembre, le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick, avait appelé l'UE à «rééquilibrer» ses lois régulant la tech, comme le DSA et le DMA, deux lois phares entrées récemment en vigueur, en proposant en échange une diminution des droits de douane imposés par Washington sur l'acier européen.
Une idée aussitôt rejetée par plusieurs responsables européens, qui ont réaffirmé le droit souverain de l'Union européenne à adopter et appliquer ses propres lois, et rappelé qu'elles s'appliquaient à toutes les entreprises actives sur le marché européen, quelle que soit leur nationalité.
Mais il ne s'agit pas du premier contentieux entre Meta et l'UE. Le groupe a écopé en avril d'une amende de 200 millions d'euros pour infraction à la concurrence dans le cadre du DMA, le règlement sur les marchés numériques entré en vigueur l'an dernier, concernant l'utilisation à des fins publicitaires des données personnelles des utilisateurs de ses plateformes comme Facebook et Instagram. Meta a fait appel de cette décision.
Auparavant, l'UE avait sanctionné le groupe à hauteur de 798 millions d'euros en novembre 2024, pour avoir abusé de sa position dominante dans les petites annonces en ligne, en liant son service Facebook Marketplace à Facebook.
Meta faisait déjà l'objet depuis juillet d'une enquête en Italie liée au déploiement de son assistant d'IA dans WhatsApp, l'autorité de la concurrence italienne (AGCM) estimant qu'il pourrait nuire à ses concurrents. Bruxelles a précisé qu'elle veillerait à mener ses investigations sans empiéter sur cette enquête italienne. (afp)
