L'été qui vient de se terminer a été celui du surtourisme. Jamais ce concept, pourtant pas nouveau, n'a été aussi présent dans le débat public. Les restrictions adoptées par de nombreuses destinations touristiques, ainsi que les protestations de leurs habitants, ont montré une tolérance de plus en plus faible envers les masses de vacanciers.
Le sujet est délicat, car le phénomène est très émotionnel. Pourtant, il peut être quantifié. C'est ce qu'affirme le voyagiste français Evaneos, qui, en partenariat avec le cabinet de conseil Roland Berger, a créé son «indice du surtourisme». Ce dernier classe les 70 destinations les plus visitées au monde (chiffres de 2019) en fonction de leur exposition au surtourisme. Il s'agit de 68 pays, ainsi que de Bali et des Hawaï, isolées car particulièrement touchées par le phénomène.
Chaque destination se voit attribuer une note allant de 1 à 5, élaborée sur la base de quatre «critères objectifs»:
Résultat: près de la moitié des destinations analysées, soit 30, sont considérées «à risque». Les endroits les plus touchés sont ceux qu'Evaneos appelle les «destinations balnéaires»: Chypre obtient le score le plus élevé (4,4 sur 5), suivi par Aruba (4,2) et Bali (4,2). La Croatie, la Grèce et le Monténégro appartiennent également à cette catégorie.
Généralement peu peuplés, ces lieux accueillent beaucoup de touristes (jusqu'à six par habitant), répartis sur une zone souvent assez petite (jusqu'à 8000 vacanciers par km2). Ces destinations sont d'autant plus vulnérables qu'une grosse part de leur PIB (25% en moyenne) dépend du tourisme.
Les pays qui souffrent d’une surfréquentation estivale ponctuelle font également partie de la liste rouge. On y retrouve les principales destinations européennes, comme l'Italie, l'Espagne, le Portugal et la France. Jusqu'à 43% des arrivées sont concentrées dans la période allant de juin à août. De plus, l'afflux de touristes concerne «une grande partie de leur territoire». Leur score moyen se situe à 3,5 sur 5.
Au sein de la catégorie «à risque», on retrouve finalement les destinations qui vivent un surtourisme «urbain». Les vacanciers se concentrent dans des portions plus petites du pays, dans certains «lieux d'intérêt» notamment. Copenhague, Amsterdam et Dublin en sont des exemples.
Il existe ensuite une catégorie intermédiaire de pays, dits «à surveiller». Ils sont 17, et présentent une densité de touristes «globalement acceptable», explique Evaneos, qui note toutefois que d'importantes disparités existent au sein du même pays. De nombreux lieux d'intérêt sont «particulièrement exposés».
La Suisse fait partie de cette catégorie. Notre pays obtient un score de 3,1 et se situe entre le Maroc, le Vietnam et l'Inde.
Le reste des destinations sont encore «préservées» par le surtourisme. Leur score moyen se monte à 2,2. La densité de vacanciers, tant par kilomètre carré que par habitant, est «très limitée», car ces pays sont dotés d'un large territoire et de plusieurs points d'intérêt. De plus, les arrivées ne se concentrent généralement pas dans un seul trimestre. La Pologne, la Norvège, le Japon et les Etats-Unis font partie de la catégorie.
Evaneos propose quelques solutions pour tenter de limiter le problème. Les destinations les plus touchées sont encouragées à prendre des mesures coercitives et urgentes, comme des quotas. Les pays moins exposés peuvent mettre en avant des destinations alternatives et moins connues, y compris à titre préventif, afin d'anticiper l'augmentation des vacanciers.
Ces derniers peuvent également jouer un rôle. Les touristes sont invités à privilégier des régions moins fréquentées, ainsi que la basse saison. L’Organisation mondiale du tourisme rappelle que 95% des vacanciers visitent moins de 5% des terres émergées. (asi)