Le parc des expositions de Paris brille à nouveau de mille feux. Plus de 50 marques automobiles sont présentes au «Mondial de l'auto», trois fois plus que lors de la dernière édition du salon en 2022. Paris profite sans doute aussi de la fermeture du salon de Genève, mais pas seulement.
Les Japonais sont venus, les Américains sont là avec Ford, Cadillac et Tesla. Les Européens sont presque tous présents, à l'exception de Mercedes et Volvo. Côté nouveautés, Volkswagen présente le SUV XL Tayron, Audi une version coupé du Q6 e-tron et BMW le X3. A domicile, Renault inaugure pas moins de six nouveaux modèles, dont les nouvelles versions R5; Citroën expose le C3-Aircross, Peugeot un e-508, Dacia son Bigster.
Mais les apparences sont trompeuses. Les perspectives pour le secteur automobile européen n'ont jamais été aussi sombres qu'aujourd'hui. Après Volkswagen, c'est au tour du patron de Stellantis, Carlos Tavares, de menacer de fermer des usines. Celui qui a réussi à assainir des marques comme Peugeot, Opel ou Fiat devra lui-même quitter son poste en 2026: sa stratégie consistant à privilégier le rendement par rapport à la masse s'avère aujourd'hui manquer de vision à long terme.
Renault a déjà introduit le chômage partiel dans des usines françaises afin de réduire les surcapacités. Il en va de même pour les fournisseurs comme le fabricant de pneus Michelin. En août, les ventes de voitures ont chuté de 16,5% dans toute l'Europe. La concurrence chinoise n'a certes écoulé que 17 000 modèles sur le vieux continent au premier semestre, mais elle progresse puissamment, comme on peut le constater à Paris.
Sept marques chinoises sont présentes au «Paris Motor Show». La plus ancienne, Hongqi, en français «drapeau rouge», produit depuis 1958 des voitures d'Etat pour le régime communiste – et aujourd'hui des berlines de luxe. La jeune génération est représentée par Xpeng, une marque 100% électrique qui a tout juste dix ans. Sa «voiture volante» est suspendue au toit du salon par ses hélices.
Le fondateur de l'entreprise, He Xiaopeng, s'efforce de présenter sa dernière berline P7+ avec un «Bonjour» et un «I am happy», avant de se lancer dans sa langue natale. Son discours est truffé d'expressions telles que technologie, navigation, innovation, trend setting, expansion mondiale. «Nous nous concentrons sur l'Europe», souligne le chef d'entreprise, dont la devise est:
C'est le numéro un du secteur des véhicules électriques, BYD, qui est le plus présent à Paris. L'ancien fabricant de batteries de Shenzhen, qui a dépassé Tesla pour la première fois cet été, présente dans une étude le U8 de sa marque premium Yangwang. Le super bolide U8, qui est même adapté à l'eau, a 1000 kilomètres d'autonomie et 1200 chevaux-vapeur.
Une horreur pour la maire de Paris Anne Hidalgo, qui a introduit dans sa ville des taxes spéciales de stationnement pour les SUV au 1er octobre. Un cadre de BYD, en attendant la conférence de presse, a un contre-argument tout prêt: «Le U8 électrique pollue moins l'air parisien que bien des vieux diesels français». Il préfère louer de mystérieuses particularités du U8 comme le «DiSus-P Intelligent Hydraulic Body Control».
Lors de la conférence de presse de BYD, les photographes et les journalistes se pressent en si grand nombre qu'ils doivent occuper les stands – en partie vides – de la concurrence. La vice-présidente du groupe, Stella Li, vêtue de turquoise et de blanc, dévoile tout d'abord le dernier modèle, le Sealion 7, dont la vitesse de pointe est de 230 km/h.
Puis Li dévoile le «secret» du succès de BYD: l'entreprise chinoise emploie 102 000 chercheurs et dépense 5,5 milliards de dollars en recherche et développement. Les autres marques ne peuvent qu'en rêver.
Que faire face à l'offensive des voitures électriques de l'Empire du Milieu? Le président Emmanuel Macron a défendu lundi au salon de l'automobile les taxes d'importation de l'UE sur les produits chinois qui viennent d'être décidés – et ce, malgré les critiques des constructeurs allemands qui, avec leurs ateliers chinois, sont en partie eux-mêmes concernés et craignent en outre des mesures de rétorsion de Pékin.
De leur côté, les constructeurs français déplorent la baisse du bonus électrique de l'Etat, qui est passé en France de 7000 à 4000 euros:
Les Européens lancent certes au «Mondial» une série de petits modèles électriques: Citroën la e-C3, Alfa Romeo sa première «Junior» entièrement électrique, Renault la R4. Mais ils le font aussi pour respecter les normes de CO2 à partir de 2025. En effet, ils doivent absolument augmenter leur part de voitures électriques vendues pour éviter de lourdes amendes.
Mais le directeur marketing de Peugeot, Phil York, reconnaît dans un entretien que la demande pour les voitures électriques «ne suit pas encore». Est-ce la clientèle européenne qui fait que l'industrie automobile locale s'enfonce de plus en plus dans la crise?
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci