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Servette-Genk excite les foules: «Il se passe quelque chose»

Les supporters genevois allument des fumigenes, lors de la rencontre de football de Super League entre le Geneve Servette FC et le FC Sion, ce dimanche 20 mars 2022 au stade de Geneve. (KEYSTONE/Marti ...
Les Genevois ont pris l'habitude de célébrer les bons résultats de leur équipe, comme ici en mars 2022 face au FC Sion.Image: KEYSTONE

Servette-Genk excite les foules: «Il se passe quelque chose»

Plus de 16 000 personnes sont attendues ce mardi (20h30) au stade de Genève, en pleine semaine et au coeur de l'été, pour voir un match face à un modeste club belge. Comment en est-on arrivé là?
25.07.2023, 07:2025.07.2023, 07:56
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«Quand on pense qu'il y aura autant de monde, c'est vrai que ça fait bizarre.» Au bout du fil, Christophe, abonné au Servette FC depuis qu'il est «en âge de payer» (c'est-à-dire depuis 15 ans), a de la peine à «comprendre l'engouement que suscite l'affiche, surtout en plein été, une période durant laquelle les affluences sont plutôt faibles.»

Ce sera donc tout le contraire mardi soir, puisqu'ils seront plus de 16 000 à garnir la Praille pour le 2e tour qualificatif de la Ligue des champions face au KRC Genk, ce vice-champion de Belgique dont la plupart des supporters grenat ignorent tout et seraient incapables de situer sur une carte.

«Il est vrai que ce n'est pas l'équipe qui fait le plus rêver. Lorsque j'ai réservé mes billets d'avion pour le match retour, j'ai dû chercher sur Internet pour savoir où se trouvait la ville. Apparemment, il y a une gare, donc Genk doit être facilement atteignable depuis Bruxelles.»
Christophe, abonné au Servette FC depuis 15 ans.

Carte de situation

Genk se trouve à 50 km au nord de Liège, à mi-distance entre Bruxelles et Cologne.
Genk se trouve à 50 km au nord de Liège, à mi-distance entre Bruxelles et Cologne.

Les Servettiens renouent avec bonheur aux joies de la C1 et ça leur avait manqué. La dernière soirée européenne à ce niveau remonte au 25 août 1999 et à l'époque, c'est aux Charmilles que les Grenats avaient reçu Sturm Graz.

Le résumé de la partie

Cette longue absence (24 ans) explique en partie l'enthousiasme que suscite le match face à Genk et qui dépasse de très loin celui de 1999. «16'000 spectateurs en plein mois de juillet, je n'ai pas le souvenir d'avoir vécu un tel engouement à Genève», remarque Laurent Ducret, journaliste à Keystone-ATS et spécialiste du football genevois.

«La grande différence, ce sont les réseaux sociaux, poursuit-il. L'excitation autour d'un match s'auto-alimente à une vitesse folle, avec des centaines d'interactions.» «Dans le secteur de la communication, le SFC possède une équipe très forte, ajoute Sacha Roulin, fondateur de Servettiens.ch. Loïc Luscher en tête, ces gens savent parfaitement comment attirer de jeunes spectateurs au stade et flatter leurs instincts.»

«On parle de gars qui, souvent, n'ont pas beaucoup d'argent et emmènent leurs potes pour s'éclater en tribune Nord, où les ambiances sont très chaudes. Cette génération forme une fan-base toujours plus grande que Servette réussit habilement à fédérer, notamment en communiquant beaucoup via des rappeurs locaux. Les supporters classiques de 30 à 40 ans, comme moi, peuvent se sentir exclus. Reste que Servette continue d'attirer toutes les classes sociales et que le nombre de spectateurs augmente chaque saison.»
Sacha Roulin
Servette's supporters light smoke flares, during the Super League soccer match of Swiss Championship between Servette FC and BSC Young Boys, at the Stade de Geneve stadium, in Geneva, Switzerland ...
Selon certaines indiscrétions, les ultras (ici en pleine démonstration) ont préparé un énorme tifo ayant nécessité plusieurs semaines de travail pour la réception de Genk mardi.Image: KEYSTONE

Sacha Roulin sait aussi que ce succès populaire récompense la «communication très maline du club», dont il décrypte le savant mécanisme:

«Pour un grand match, le processus est toujours le même: longtemps à l'avance, on commence par nous annoncer la présence de 4000 spectateurs... mais il s'agit en réalité du nombre d'abonnés. Puis on passe rapidement à 5000 spectateurs - mais ce sont 1000 invités supplémentaires! Le monde attirant le monde, les gens veulent en être et se ruent sur la billetterie.»

C'est ainsi qu'un match devient un grand match, et qu'un grand match se transforme en évènement incontournable («the place to be», comme on dit chez Rolex). «Dans mon travail, je suis le seul à suivre Servette. On me parle pourtant de ce rendez-vous contre Genk depuis plusieurs jours», rapporte Christophe.

Ce supporter ne paiera rien pour entrer au stade, puisque les deux premiers matchs européens du SFC sont inclus dans le prix de l'abonnement. Une mesure qui, couplée aux tarifs raisonnables proposés au grand public (40 francs en tribune latérale par exemple), participe à l'élan populaire né autour d'une affiche, mais surtout d'un club qui travaille très bien depuis plusieurs saisons.

«Les gens sentent qu'il se passe quelque chose à Servette. L'arrivée de Jérémy Guillemenot a agi comme un signal, une preuve que le club est ambitieux et disposé à lâcher de l'argent. Et maintenant, on fantasme sur le retour de Jean-Pierre Nsamé. Tout le monde l'a vu tirer la gueule sur le banc d'YB le week-end dernier et certains veulent croire qu'il serait plus heureux à Genève. Ce transfert n'est absolument pas impossible.»
Laurent Ducret
Servette's forward Jean-Pierre Nsame, left, fights for the ball with Aarau's defender Bruno Martignoni, right, during the Challenge League soccer match of Swiss Championship between Servette ...
«JP» Nsamé a traumatisé pas mal de défenses lorsqu'il portait le maillot du Servette.Image: KEYSTONE

Pour expliquer la hype autour du club grenat, Laurent Ducret exclut «l'effet René Weiler». «J'ai rarement vu un entraîneur donner une première conférence de presse aussi creuse. Et pourtant, on ne peut pas dire qu'il n'a pas eu le temps de se préparer (réd: Weiler a été nommé en mars).» Selon le journaliste, c'est dans l'espoir de ressembler au meilleur que le SFC nourrit son mythe. «Les Servettiens se disent que si YB a pu évoluer autant ces dernières années, ils le peuvent aussi.»

«Cette équipe plait. Elle véhicule des valeurs très genevoises de grande gueule (merci Crivelli) et d'intrépidité. Elle n'a pas peur et ça, excusez-moi, mais c'est très genevois!»
Sacha Roulin, fondateur de Servettiens.ch

Si Laurent Ducret cite Young Boys, Christophe, lui, préfère convoquer le souvenir glorieux de Bâle. «Quand l'engouement a réellement pris autour du FCB au début des années 2000, c'était aussi grâce à des tours qualificatifs de Ligue des champions. Est-ce que Servette (réd: qui défiera les Rangers de Glasgow s'il se qualifie pour le tour suivant) peut profiter de ce type d'engouement, et de sa belle 2e place l'an passé, pour fidéliser de nouveaux supporters et partenaires?»

Les supporters opportunistes de la semaine deviendraient alors les fidèles du week-end. «On ne peut pas nier que ce match contre Genk attire aussi un public opportuniste, ou disons, occasionnel, reconnaît Sacha Roulin. Le mot magique, c'est «Ligue des champions». Le Genevois, historiquement, voit grand.»

«Tu fais le même Servette-Genk en Conférence League et il y a 10 000 spectateurs de moins»
Sacha Roulin

Ça ferait 7000, soit l'affluence du hockey aux Vernets, antre du tout frais champion de Suisse. «Mais pour les purs et durs du Servette, le hockey reste un monde à part et un succès... embêtant, ose Sacha Roullin. C'est autant d'argent et de spectateurs qui, potentiellement, échappent au football. Je vous le dis tout net parce que je ne suis pas à un ennemi près: le Genève-Servette Hockey Club ne vit pas au bon endroit, au bon moment. Je préférerais qu'il s'exile dans le canton de Vaud!»

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