Elena Quirici ne s'attendait pas à être autant tourmentée. Or durant les Jeux olympiques de Paris 2024, elle a vécu des montagnes russes émotionnelles. Il y a eu des hauts et des bas, entre fierté et tristesse, trois ans après sa participation aux JO de Tokyo. A l'époque, l'Argovienne savait déjà qu'elle devait profiter de son rêve devenu réalité et qu'elle n'aurait plus la possibilité de se présenter aux Jeux. Sa discipline, le karaté, vivait ses dernières heures olympiques, puisqu'il était prévu de la remplacer à Paris par des activités plus modernes.
Quirici est actuellement dans la forme de sa vie. Elle est numéro 1 mondiale dans sa catégorie de poids et a été élue meilleure athlète de la saison deux années consécutives. La karatéka a remporté l'argent aux Championnats d'Europe cette année ainsi qu'aux Mondiaux en 2023. Mais au lieu de se battre pour une médaille à Paris, elle était assise sur son canapé à regarder les autres ces derniers jours. «Cela me rend triste», confie la jeune femme de 30 ans.
A Tokyo, Elena Quirici a terminé cinquième et a décroché un diplôme olympique. Compte tenu de son niveau actuel, elle aurait sans doute obtenu une médaille si sa discipline avait été maintenue au programme des Jeux olympiques. Cette situation la pèse, d'autant que tout le monde lui en parle. Mais il y a autre chose qui attriste la native de Baden. Alors qu'elle a pu vivre son rêve à Tokyo, la nouvelle génération, elle, est privée du bonheur olympique.
Le Comité international olympique (CIO) est particulièrement enthousiaste à l'idée d'intégrer de nouvelles disciplines aux JO. C'est un moyen pour lui de se tourner vers des sports «jeunes», qui parlent à la nouvelle génération. Pour Elena Quirici, cet argument ressemble à une mauvaise plaisanterie. «Il y a beaucoup de jeunes athlètes dans le karaté», rétorque-t-elle.
De nombreux sports sont invisibles en dehors des Jeux olympiques. Cette compétition offre un rayonnement international, contrairement aux épreuves intimistes habituelles. Certains sportifs dédient donc toute leur carrière à cet événement. Si leur discipline disparaît du programme olympique, tout s'effondre. C'est ce qu'a vécu Elena Quirici. Elle a pris une longue pause après les Jeux de Tokyo. «J'ai écouté mon cœur. J'ai participé à notre plus grand tournoi. Puis cet objectif s’est effondré», raconte-t-elle de manière amère.
Depuis, Quirici s'est trouvé de nouveaux objectifs et a accompli d'autres rêves. Elle dirige désormais une école de karaté avec son compagnon, qui est également son entraîneur. «J'ai toujours voulu transmettre aux enfants ce que le karaté m'a donné», dit-elle. Ce projet était nécessaire, aussi sur le plan financier. On ne roule pas sur l'or en tant que karatéka professionnel, même quand on est le meilleur. Et il faut payer les voyages ainsi que les camps d'entraînement.
L'Argovienne s'est également fixé de nouveaux buts sur le plan sportif. «J'ai réorienté mon environnement», explique-t-elle. Elle évolue désormais au sein d'un nouveau groupe de travail et s'est séparée de son premier entraîneur, celui qui s'occupait d'elle depuis l'âge de quatre ans. «Je dois énormément à David Baumann, mais il était temps de passer à autre chose», raconte la vice-championne d'Europe. Les objectifs ont changé: le titre de championne du monde a pris de l'importance. C'est une source de motivation.
Adaptation en français: Romuald Cachod.