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On a parlé à ce Suisse qui est parti travailler à Kaboul

Un centre de rapatriement volontaire du HCR au Pakistan avant le retour en Afghanistan, en août 2025.
Un centre de rapatriement volontaire du HCR au Pakistan avant le retour en Afghanistan, en août 2025.Image: Keystone

On a parlé à ce Suisse qui est parti travailler à Kaboul

La Suisse est l'un des premiers pays européens à retourner en Afghanistan. Eric Marclay, le chef du bureau humanitaire, raconte la réinstallation et l'évolution de la situation sécuritaire depuis l'arrivée au pouvoir des talibans.
31.08.2025, 15:5731.08.2025, 15:57
Lea Hartmann / ch media
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Les collaborateurs avaient dû évacuer en urgence le bureau suisse de Kaboul, la capitale afghane il y a quatre ans. La prise du pouvoir par les talibans les avaient contraints à rentrer.

Mais depuis quelques mois, la Suisse est à nouveau présente en Afghanistan. Elle constitue l'un des premiers pays européens à y avoir repris ses quartiers. Eric Marclay dirige le nouveau bureau humanitaire de Kaboul. Il a travaillé pendant 25 ans pour le Comité international de la Croix-Rouge avant de rejoindre la Confédération. Nous l'avons rencontré en Suisse.

Quel a été le plus grand défi lors de votre retour en Afghanistan?
Eric Marclay: Nous nous sommes surtout préoccupés de questions logistiques. Notre bureau n'avait pas subi de dommages, mais il fallait le réaménager, remettre en état les infrastructures et garantir la sécurité et le logement des collaborateurs – cinq Suisses et dix Afghans, dont trois femmes.

La présence de femmes a-t-elle posé des problèmes avec le gouvernement taliban?

«Ce n'est pas comme si nous avions besoin d'une autorisation des talibans pour les embaucher»

Nous avons simplement informé les autorités à propos de notre personnel, par souci de transparence. Les Afghanes portent le voile. Cela n'a posé aucun problème jusqu'à présent.

Comment se passe le travail sous le régime taliban? Vous met-il des bâtons dans les roues?
Non, pas du tout. Nous avons obtenu très rapidement les visas et l'autorisation d'y retourner.

«Nous entretenons des relations purement techniques avec les talibans. Il n'y a pas de coopération, pas de contacts informels, nous ne négocions pas avec eux»

Il n'y a aucune restriction, nous sommes libres dans notre travail. Nous les informons simplement des projets que nous soutenons.

Eric Marclay, directeur du nouveau bureau humanitaire suisse de Kaboul.
Eric Marclay, directeur du nouveau bureau humanitaire suisse de Kaboul.Image: Keystone

Selon Berne, la situation sécuritaire dans le pays s'est améliorée. Cela correspond-t-il à votre impression sur place?
Par rapport aux décennies précédentes, la situation s'est en effet nettement améliorée. Dans certaines régions, des escarmouches ont encore lieu et des attentats terroristes ne sont jamais à exclure.

«Mais dans l'ensemble, les Afghans nous disent que la situation sécuritaire n'a jamais été aussi bonne que ces dernières années»

Ils peuvent se déplacer librement dans le pays. Même les travailleurs humanitaires peuvent aujourd'hui se rendre dans des régions où ils n'auraient jamais pu aller dans les années 2000.

Cela signifie-t-il que l'Afghanistan est un pays sûr et que l'on peut y renvoyer des personnes?
Je ne peux pas me prononcer à ce sujet. Je m'occupe du travail humanitaire et non des questions politiques.

Plusieurs responsables talibans se sont récemment rendus en Suisse pour organiser l'expulsion de ressortissants condamnés. L'engagement humanitaire de la Suisse joue-t-il un rôle dans la coopération avec les talibans dans le domaine de la migration?
La question est pertinente, mais c'est au Parlement d'y répondre. La séparation des tâches n'est actuellement pas très claire. Nous n'utilisons pas l'un pour obtenir quelque chose dans l'autre domaine. Et nous ne les opposons pas non plus.

Qu'en est-il de votre propre sécurité? Sortez-vous uniquement en compagnie d'agents de sécurité?
Nous avons engagé une société internationale. Cependant, nous nous déplaçons généralement dans les véhicules de nos partenaires, d'autres organisations non gouvernementales.

«Nous ne sortons pratiquement jamais en privé. Nous n'irions jamais au restaurant à Kaboul, par exemple»

La Suisse soutient l'Afghanistan à hauteur de 25 millions de francs par an. Quels projets est-ce que ces fonds financent?
Notre travail repose sur trois piliers. Le premier: l'aide humanitaire, c'est-à-dire l'approvisionnement en nourriture, en eau et en médicaments. La situation humanitaire dans le pays reste très précaire, en particulier dans les zones rurales, mais aussi dans les villes. Des dizaines de milliers d'Afghans reviennent actuellement d'Iran et du Pakistan et doivent repartir de zéro.

Ensuite?
Nous soutenons des projets visant à renforcer l'agriculture, notamment dans le contexte de changement climatique.

«Kaboul devrait être l'une des premières villes à manquer d'eau dans les années à venir»

Le troisième pilier est la protection des droits humains, un domaine particulièrement complexe. Par l'intermédiaire de l'ONU, la Suisse soutient les projets de 141 organisations de femmes. Celles-ci leur offrent un soutien psychosocial et l'accès à l'éducation et au travail. Nous touchons ainsi des milliers de femmes. J'ai également demandé directement à des Afghanes ce que nous pouvions faire pour les aider. Elles ont répondu que la Suisse pourrait les aider à exporter leurs produits locaux. Les autorités afghanes nous laissent nous engager dans ce domaine.

Quel bilan tirez-vous après près de six mois sur place?

«Je tire un bilan très positif. La valeur ajoutée de notre bureau, c'est la proximité. Elle nous permet de mieux comprendre la situation et les besoins de la population. Et aussi d'utiliser l'argent de la manière la plus intelligente et la plus ciblée possible.»
Eric Marclay, directeur du nouveau bureau humanitaire suisse de Kaboul.

(Adaptation en français: Valentine Zenker)

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