Il fait à peine la taille d'une pièce de cinq centimes, mais les dégâts qu'il provoque peuvent être considérables. Le scarabée japonais (Popillia japonica) est, en effet, un insecte particulièrement vorace. Les individus adultes se nourrissent des feuilles, des fruits et des fleurs de plus de 400 espèces végétales, dont les vignes et les fruits à noyau.
La semaine dernière, on apprenait que cet insecte ravageur avait été repéré dans les cantons de Vaud et Genève, pour la première fois. Des mesures ont déjà été prises pour tenter de freiner son expansion, mais la tâche s'annonce compliquée.
Le Tessin en sait quelque chose. Le canton italophone a été le premier à détecter la présence du scarabée japonais, en 2017 déjà. Ce qui lui donne une longueur d'avance vis-à-vis des autres régions. Qu'est-ce qui a pu être fait? Les mesures adoptées pour contrer son expansion ont-elles porté leurs fruits? Nous avons interrogé Cristina Marazzi, responsable du Service phytosanitaire cantonal. Interview.
A quelle vitesse le scarabée japonais se propage-t-il?
Cristina Marazzi: Il faut distinguer le déplacement actif, c'est-à-dire le vol naturel de l'insecte, et le transport passif. Dans le premier cas, le scarabée peut parcourir environ quatre kilomètres par an, principalement lorsqu'il recherche de nouvelles zones à coloniser. En ce qui concerne le transport passif, c'est plus aléatoire.
Plusieurs années s'écoulent entre la première observation et l'établissement d'une population active. Normalement, les effectifs explosent à partir de la quatrième année, si aucune mesure n'est prise.
Justement, quelles sont les mesures qui peuvent être prises?
Il existe des mesures pour limiter la population d'insectes et d'autres pour tenter de l'éradiquer. Ce sont les deux philosophies qui coexistent actuellement en Suisse. Au Tessin, l'éradication n'a jamais été envisagée, car le foyer principal, qui est très important, se trouve juste de l'autre côté de la frontière, près de l'aéroport de Milan. En Suisse alémanique, en revanche, on applique des mesures plus radicales.
L'éradication est-elle possible une fois qu'une population active a été détectée?
L’éradication est improbable. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un insecte qui peut monter dans des véhicules et parcourir ainsi beaucoup de kilomètres. Eradiquer une population active est peut-être possible dans des endroits très isolés et dépourvus d'influences extérieures, comme une île. En Suisse, les conditions sont évidemment très différentes.
Quelles sont les principales mesures qui ont été adoptées au Tessin?
Il s'agit, comme indiqué, de mesures d'endiguement. La principale consiste à capturer un maximum de scarabée à travers le piégeage de masse. Concrètement, nous avons équipé de pièges les communes les plus touchées, lesquels ont été installés dans des zones sensibles. Chaque semaine, les autorités communales nous informent sur le nombre d'insectes capturés. Cela nous permet de savoir si tous les pièges fonctionnent correctement et s'ils sont placés au bon endroit.
Nous avons remarqué qu'avec un simple monitoring, les effectifs sont multipliés par cent chaque année. Nous avons alors décidé de mettre en place une surveillance plus efficace, basée sur la capture.
Les simples citoyens peuvent-ils contribuer?
Oui. Une fois que ce réseau de surveillance est opérationnel, les particuliers habitant dans des communes touchées peuvent se doter de leurs propres pièges.
Comment vide-t-on ces pièges?
Nous recommandons de vider le piège une fois par semaine.
Cela demande un certain travail...
Oui, cela implique plusieurs défis. Vider les pièges n'est pas toujours agréable, et il faut également disposer d'un congélateur où stocker les insectes.
Existe-il des pesticides contre le scarabée japonais?
Nous disposons d'un seul produit homologué, appelé Acétamipride. Ce dernier agit contre les insectes adultes, mais en tant que Service phytosanitaire cantonal nous ne recommandons son usage que dans des cas très graves.
Les mesures que le canton a mises en place sont-elles efficaces?
Les mesures d’endiguement sont particulièrement efficaces lorsque les conditions météorologiques estivales sont défavorables au développement des larves, c'est-à-dire lorsqu'il y a une période de sécheresse entre juillet et août. L’expérience et les résultats obtenus au cours de ces années le démontrent, et jusqu'à l'année dernière, il semblait que la population d'insectes s'était stabilisée grâce au piégeage de masse.
Début 2023, le nombre d'insectes avait même diminué. Cela s'expliquait par le fait que l'année d'avant avait été très sèche, ce qui avait tué beaucoup de larves. Cette année, en revanche, la population a recommencé à croître et a considérablement augmenté grâce à l’été humide de 2024.
Quels sont les secteurs les plus touchés?
Essentiellement la viticulture. Il y a très peu de vergers au Tessin, et la plupart produisent des fruits résistants aux attaques de ce scarabée, à savoir des pommes.
Les scarabées endommagent également les terrains de football et les pelouses en général. Dans ces cas, il est possible d'intervenir avec des petits vers, appelés nématodes, qui attaquent les larves des scarabées enfouies dans le sol. Il s'agit d'un traitement compliqué à mettre en place, mais très efficace.
Avez-vous déjà pu chiffrer les pertes?
Il est encore trop tôt pour le dire. Certaines vignes ont été très touchées par le passé, mais cela n'a pas impacté la production. Nous avons constaté que des vignobles ont également été endommagés cette année, mais nous ne savons pas encore si cela se traduira par des pertes importantes.