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Köppel à Moscou: l'UDC fait l'autruche

Köppel à Moscou
Keystone / shutterstock (montage watson)
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Köppel à Moscou: l'UDC fait l'autruche

Le premier parti de Suisse préfère faire profil bas depuis que son conseiller national est rentré de Russie. «C'était privé. Circulez, il n'y a rien à voir», pourrait-on résumer. C'est simple, classique, ça fonctionne. Mais c'est bas.
03.05.2023, 19:0010.05.2023, 21:55
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Le journaliste et conseiller national UDC Roger Köppel est rentré en Suisse après avoir rencontré, à Moscou, deux des personnages clés du régime de Poutine: Vladimir Soloviev, le propagandiste en chef, et Maria Lvova-Belova, ministre des droits de l'Enfant accusée de déportations de petits Ukrainiens par la Cour pénale internationale (CPI).

Et puis? Et puis plus rien. Watson a feuilletoné sur le voyage, mais c'est retrouvé face à un mur: du côté des instances dirigeantes de l'UDC, c'est portes closes. Le secrétariat central se borne à expliquer que «les activités privées ne sont pas du ressort du parti». Contactée, Céline Amaudruz, vice-présidente du parti et seule membre romande du comité, ne nous en dira pas plus.

Les collègues de Köppel s'en lavent les mains

Du côté des conseillers nationaux et figures du parti contactés, on explique que ce voyage privé n'est pas un problème. Certains ne veulent pas commenter du tout, d'autres expliquent qu'il est «important de montrer les différentes facettes de la situation» et louent les qualités de journaliste de Roger Köppel, qui irait au-delà des clivages. Sur la RTS, Yves Nidegger raconte que son travail contre-balance «la propagande de l'Otan». Un dernier nous assure au téléphone qu'il découvre la polémique avec notre appel.

De rares, à l'instar du conseiller aux Etats bernois Werner Salzmann, se disent surpris et concèdent que le «moment n'est pas idéal». Pour un parti dont les membres sont connus pour se serrer les coudes en cas de coup dur, cela a déjà valeur de désaveu. Une petite fissure en quelques caractères qui laisse découvrir, à l'interne, une frange qui désapprouve.

Des parlementaires UDC réagissent:

On n'en saura pas plus. L'UDC a efficacement verrouillé la communication autour du voyage de son conseiller national. On aurait tout aussi bien pu nous répondre:

«Bof, si c'est privé, on s'en fout, non?»

D'importantes questions

Sauf que non, on ne s'en fout pas. Qu'un parlementaire suisse, bien qu'à double casquette, débarque à Moscou sans être inquiété et puisse accéder aux personnes les plus en vue du régime de Poutine soulève d'importantes questions.

Il y a le voyage et puis il y a le contenu, lisible dans une édition de la Weltwoche titrée «Moscou au printemps». Dans son interview, Köppel met Maria Lvova-Belova face aux critiques de l'Occident: celles d'avoir déporté près de 40 000 enfants ukrainiens, dans le but d'en faire de bons petits Russes. Une perche tendue qui permet à celle-ci de développer son argumentaire, d'ailleurs déjà connu: «Nous n'enlevons pas les enfants, nous les sauvons». Tout ceci saupoudré de quelques enfumages vocabularistiques.

On ne parlera pas du portrait de Vladimir Soloviev, dans lequel on découvre un homme distingué, intelligent, dont les sorties du genre «On pourrait détruire le Royaume-Uni avec un tsunami radioactif provoqué par une arme nucléaire sous-marine du turfu» ne seraient rien d'autre qu'une blague un peu potache. «Nous, les Russes, on aime l'ironie», lui répond Soloviev. Et Roger Köppel de le comparer aux Monty Pythons et à Woody Allen, quelques lignes plus haut. Sérieusement?

No comment.

On n'attendait pas forcément un mea culpa de la part de l'UDC, ce n'est pas son genre. D'autant qu'à quelques mois des élections fédérales, on comprend totalement que le parti souhaite éviter les vagues (radioactives). Et ce, même si Roger Köppel doit quitter la coupole après la session parlementaire de septembre.

On aurait pu recevoir au moins un commentaire, son opinion sur la polémique ou une vague explication. Le timing est-il regrettable, alors que la Suisse a justement succédé à la Russie au Conseil de sécurité de l'ONU et qu'un journaliste de la NZZ s'est retrouvé inquiété par l'ambassade russe en Suisse, quelques jours avant le voyage du Zurichois? Nous n'aurons aucun éclairage.

L'idiot utile de Poutine

Le socialiste zurichois Fabian Molina n'hésite pas à traiter Roger Köppel de «collabo». La comparaison historique est lourde. Une chose est sûre: quoi qu'ait été l'intention de l'élu UDC, il a engagé l'image de la Suisse.

Il est sûr que le voyage de Roger Köppel sert à la légitimation de l'action du Kremlin dans la sphère médiatique occidentale. Qu'il le veuille ou non, il est l'idiot utile de Poutine en Suisse, le pays de la neutralité — une des valeurs centrales de l'UDC.

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