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Ces Suisses «espéraient la pandémie Covid» pour s'enrichir

Luca Steffen (à gauche) et Jascha Rudolphi, les « millionnaires masqués », patrons d'Emix
Luca Steffen (à gauche) et Jascha Rudolphi dirigent la société Emix. Avant le Covid, ils gagnaient leur argent en important des boissons gazeuses et des cosmétiques.

Ces Suisses «espéraient la pandémie Covid» pour s'enrichir

En vendant des masques au plus fort de la crise Covid, une petite société helvétique a gagné des centaines de millions de francs. Si ses pratiques interrogent, la Justice, elle, ne voit rien à leur reprocher.
02.08.2024, 16:5502.08.2024, 16:55
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La pandémie Covid refait surface au Tribunal cantonal de Zoug. Au début de la crise, les services de l'Etat s'écharpaient sur la question des masques. Ils étaient d'abord absolument inutiles, puis nécessaires et enfin totalement obligatoires. Deux jeunes hommes et leur société ont flairé un bon filon en se lançant sur ce qui sera le très lucratif marché du masque.

En se procurant à bas coût des quantités astronomiques de masques, ils ont réussi à se rendre essentiels dans la stratégie de prévention de la maladie de plusieurs pays.

Avec un prix unitaire pouvant aller jusqu'à près de 10 CHF pièce, Emix, leur société, a notamment réalisé un chiffre d’affaires d'environ 700 millions d’euros grâce aux achats des autorités allemandes. En Suisse, la pharmacie de l'armée, qui était chargée de faire des stocks, a acquis pour plus de 22 millions de francs de masques à l'entreprise.

Un premier scandale avait déjà fait les gros titres en 2023. La moitié des masques livrés à l'armée était constituée de contrefaçons présumées de qualité inférieure, dont certaines étaient même affectées par la moisissure. Le préjudice pour les autorités s'est alors monté à 1 million de francs. L'enquête à ce sujet a finalement été classée en 2022.

C'est une autre affaire qui occupe désormais le tribunal. Emix et ses deux dirigeants étaient appelés devant la justice zougeoise par deux anciens partenaires qui exigent la publication de leurs chiffres d'affaires. Les deux plaignants avaient accordé, en février 2020, des prêts à court terme, contre une participation de 10% sur les bénéfices. Si les prêts ont été remboursés et les intérêts versés un mois plus tard, les deux créditeurs estiment que les sommes qu'ils ont reçues ne correspondent pas à leur apport. Ils demandaient deux choses:

  1. Plus d'argent
  2. La publication du chiffre d'affaires

Dans le cadre de la procédure judiciaire, les échanges WhatsApp des propriétaires d'Emix ont été partagés. On peut notamment y lire:

«Nous avons actuellement 15 millions de masques en commande. Mais le plus intelligent est de les garder en stock pendant une à deux semaines et de les vendre en Europe avec un bénéfice plus important. En Italie, en Allemagne et en Suisse, tout est vendu. Ils ne reçoivent plus de marchandise, car ils achètent habituellement en Chine... Et les Chinois ont l’interdiction d’exporter des masques, car ils en ont eux-mêmes besoin.»
«J’espère qu’un état d’urgence pandémique soit déclaré, l’État achètera au prix fort.»

Si sur le plan moral, cette manière de faire peut interroger, rappelons qu'aucune loi n'a été enfreinte.

A la première demande des plaignants, le Tribunal a estimé, comme l'écrivent les journaux de Tamedia, qu'«un partage du profit plus élevé n’entrerait pas en ligne de compte». Concernant la deuxième requête, la divulgation des comptes, la justice zougoise a demandé la publication «des informations complètes sur toutes les ventes conclues concernant les masques, sur les prix de revient, les coûts directs d’approvisionnement et les recettes (de revente) générées».

Un porte-parole d'Emix, interrogé par Tamedia, salue la décision du tribunal et estime qu'elle est:

«Très positive pour Emix, car les revendications des plaignants concernant les bénéfices ont été clairement rejetées. Les droits de regard de la partie demanderesse n’ont été accordés que dans une mesure très limitée».»

Interrogé sur le volet moral et les marges qu'Emix pratiquait, le porte-parole rappelle que:

«Il a été prouvé à plusieurs reprises qu’Emix vendait les masques au prix du marché; elle gagnait de l’argent sur les volumes qu’elle était l’un des rares revendeurs à être en mesure de fournir»
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Le port du masque se généralise en Suisse et dans le monde au cours de l'année 2020.
source: keystone / jean-christophe bott
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