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Pourquoi 86% des Suisses mariés pourraient payer moins d'impôts

Pourquoi 14% des couples mariés risquent de payer plus d'impôts
Ça avance sur la réforme fiscale des couples mariés. montage watson

Pourquoi 86% des Suisses mariés pourraient payer moins d'impôts

Le PLR et le PS ont fait un pas décisif en faveur de l’imposition individuelle, en s'entendant sur un compromis adopté par le Conseil national. Reste une inconnue de taille: le Conseil des Etats suivra-t-il? Les forces progressistes disposent d’un atout, mais aussi d'un sérieux défi.
10.05.2025, 18:4610.05.2025, 18:46
Doris Kleck / ch media
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«Jusqu'à 2500 francs d'impôts supplémentaires pour les familles de la classe moyenne. Est-ce vraiment ce que vous voulez, chers PLR, PVL, PS et Verts?», a tweeté avec délectation le futur président du Centre dimanche dernier. Il faisait référence à un article de la SonntagsZeitung sur l'introduction de l'imposition individuelle.

L'article faisait encore grincer des dents, mercredi, dans la salle des pas perdus et donnait un avant-goût de la bataille à venir autour de la votation. Mais nous y reviendrons plus tard.

Le Conseil national a discuté du contre-projet à l'initiative des Femmes PLR, qui demande l'introduction de l'imposition individuelle. Les couples mariés ne devraient plus être imposés en commun, mais individuellement. Les incitations à travailler pour les femmes devraient ainsi augmenter et la pénalisation fiscale du mariage devrait être supprimée.

La suppression de la pénalisation du mariage fait l'objet de discussions depuis 41 ans. Tous les partis y sont favorables, mais les avis divergent sur le «comment».

Pertes fiscales de 600 millions de francs

Le PLR, les Vert'libéraux, le PS et les Verts soutiennent l'introduction de l'imposition individuelle. Ensemble, ils ont trouvé un compromis qui a franchi une étape décisive au Conseil national. A l'avenir, chaque conjoint sera imposé séparément, ce qui mettra fin à la pénalisation du deuxième revenu due à la progressivité de l'impôt. La réforme profitera surtout aux couples avec enfants disposant de deux revenus. Comme les déductions pour les enfants seront partagées à parts égales, les ménages dont les revenus sont équilibrés en tireront un avantage particulier.

Mais la réforme fiscale a un coût. La proposition du Conseil fédéral entraînerait une perte de 870 millions de francs pour la Confédération. Le Conseil national l'a acceptée au premier tour, mais le Conseil des Etats a profondément remanié le projet. Il l'a rendu plus avantageux pour les couples à un seul revenu et a renforcé la progressivité de l'impôt, réduisant ainsi les pertes à 370 millions. Pour le PLR, ces modifications rendent désormais le compromis inacceptable.

Le PLR, le PS, les Vert'libéraux et les Verts ont trouvé un compromis autour d'une réforme fiscale qui entraînerait des pertes de 600 millions de francs. La gauche accepte ce coût, estimant qu'il est nécessaire pour alléger la charge pesant sur les deuxièmes revenus et renforcer les incitations à travailler. De son côté, le PLR — pourtant défenseur traditionnel des baisses d'impôts — accepte, dans certaines configurations, une hausse de l'imposition.

Globalement, la réforme profite à une majorité de contribuables. Selon les estimations de la Confédération, 14% d’entre eux subiront une charge fiscale supplémentaire, contre 11% dans le projet initial du Conseil fédéral, relevait récemment la NZZ.

Qui appartient encore à la classe moyenne?

Ce qui nous ramène aux perdants de la réforme et à l'article mentionné plus haut. La SonntagsZeitung titrait

«De nombreuses familles de la classe moyenne devraient payer d'un coup 2500 francs de plus»

Le conseiller national du Centre, Leo Müller, a exprimé l'inquiétude de son parti:

«Les familles de la classe moyenne, avec enfants et une répartition traditionnelle des rôles, seraient les plus durement touchées. Les intérêts de ce groupe ne sont manifestement plus représentés ici.»

Il est indéniable que la réforme peut désavantager les couples mariés avec une répartition traditionnelle des rôles: lui exerce une activité rémunérée, elle s'occupe du foyer et des enfants. C'est en partie intentionnel: l'objectif est d'accroître le taux d’activité des femmes. Mais cette logique suscite des critiques, notamment de la part de la conseillère nationale PLR Susanne Vincenz-Stauffacher:

«Les couples à un seul revenu ont profité pendant des décennies d'une prime au mariage. Ils doivent désormais accepter une hausse modérée de leur charge fiscale, car ce privilège est aboli.»

Vincenz-Stauffacher, tout comme la conseillère nationale socialiste Céline Widmer, souligne qu'à peine 2,2% des ménages correspondent encore au modèle traditionnel du couple à un seul revenu avec enfants. Toutes deux posent également une question rhétorique: peut-on réellement considérer qu'un ménage avec un revenu imposable de 150 000 francs appartient encore à la classe moyenne? C’est pourtant ce profil — un couple à un revenu avec enfants — qui serait concerné par la hausse d'impôt de 2500 francs largement mise en avant dans les médias.

Pourquoi le PLR pourrait avoir le dernier mot

Mais le projet est encore loin d'être acquis. En juin, ce sera au tour du Conseil des Etats de se prononcer et le suspense s'annonce digne d'un véritable thriller politique. Les partisans de l'imposition individuelle partent avec un handicap: le siège schaffhousois du socialiste Simon Stocker est actuellement vacant. Son élection ayant été annulée par le Tribunal fédéral, l'élection de remplacement n'aura lieu qu'à la fin du mois de juin.

Le PLR, le PS, les Vert'libéraux et les Verts détiennent actuellement 23 sièges au Conseil des Etats, tandis que les opposants du Centre et de l'UDC en comptent 22. Si aucun siège n'est vacant, la réforme devrait donc pouvoir passer également aux Etats. En cas d'impasse, les partisans pourraient encore compter sur un atout: le président PLR du Conseil des Etats, Andrea Caroni, qui pourrait avoir à trancher.

Traduit et adapté par Noëline Flippe

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