C'est avec la voix un poil enrouée mais un large sourire que la St-Galloise a fait le trajet jusqu'à Genève, ce mercredi soir. Et ce ne n'était pas seulement pour évoquer ses bonnes vieilles années «punk-rock» à Londres du temps de ses études - ni pour rappeler qu'elle était «de gauche», dans une autre vie.
Sa présence surtout tombait à pic pour réagir au débat encore brûlant du week-end dernier, après son approbation d'un discours très «libéral» de JD Vance à la conférence de Munich. Une approbation enregistrée un peu malgré elle par des caméras, alors qu'elle répondait à une question d'un journaliste du Temps. Alors que l'Europe est sens-dessus-dessous, elle valide:
Un propos qu'elle maintient, malgré tous les débats qui s'en sont suivis? s'enquiert Alexis Favre.
«Oui», répond la présidente du tac au tac. «Parce que moi, je n'ai parlé que d'un aspect. Celui où (JD Vance) avançait qu'il faut écouter la population, observer et garantir la liberté d'expression. Je n'ai pas parlé du reste. Ce n'est pas à moi de porter un jugement ni de faire un commentaire sur les Etats-Unis ou ce qu'il a dit sur l'Europe.»
«Ce n'est pas parce qu'on désapprouve le comportement de quelqu'un ou qu'on pourrait critiquer, que tous ses propos sont faux», nuance encore la conseillère fédérale. «Moi, je me suis limitée à approuver ce qu'il a dit sur la liberté d'expression, un principe de notre Constitution. Et surtout, le fait qu'il faut intégrer la population. J'ai trouvé cela très important.»
«Je ne me sentais pas concernée par le discours de JD Vance parce que le modèle suisse, c'est exactement le contraire», tient-elle encore à préciser. «En Suisse, on nous trouve toujours notre politique un peu ennuyeuse, mais on a gouvernement qui intègre quatre partis, des votations fréquentes, une tradition de pouvoir critiquer.»
Karin Keller-Sutter comprend cependant que ses propos ait pu choquer, sortis hors de leur contexte.
Interrogée ensuite par Alexis Favre sur les plans de Donald Trump à l'international, la ministre des Finances tient à se montrer prudente. «Je ne suis pas sûre que l'on sache ce qu'il veut», glisse-t-elle. «Le système Trump, c'est un système d'annonces, un système choc, on dit quelque chose et on regarde ensuite comme ça évolue.»
Le moment pour KKS de glisser qu'elle a lu le livre de 1984 du président américain, The Art of The Deal, pendant les vacances de Noël. Un livre qu'elle a trouvé «très intéressant». «C'est brutal», confirme-t-elle. «Il fait des annonces et il dit ensuite: "On va voir".»
«On sent une admiration chez vous pour cet art du deal», relève le journaliste de la RTS avec un sourire narquois.
«Je crois que nous sommes tous le contraires, hommes et femmes politiques. C'est ça qui nous choque, ce côté disruptif. Il faut faire avec. Dans ce nouveau monde très polarisé, très tendu, la Suisse doit naviguer de la meilleure manière possible pour défendre ses intérêts», conclut la ministre. (mbr)