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Primes maladie en Suisse: «Cela ne peut pas continuer ainsi»

Medbase exploite environ 70 cabinets médicaux en Suisse.
Le directeur de l'entreprise Medbase livre son analyse de la situation du secteur de la santé en Suisse.Image: Keystone

Primes maladie: cette entreprise du groupe Migros a une solution

En Suisse, la filiale de Migros, Medbase, exploite environ 70 centres médicaux et 55 pharmacies. Le directeur de l'entreprise nous explique comment il entend réduire les coûts et pourquoi il craint que la Suisse ne bascule vers un système de type allemand. Entretien.
04.10.2025, 11:5604.10.2025, 11:56
Florence Vuichard / ch media

Savez-vous déjà de combien votre prime d’assurance maladie augmentera en 2026?
Marcel Napierala: Oui, de 4,5%.

Allez-vous changer de caisse?
Non. 4,5% correspond à la hausse moyenne en Suisse. Je suis très satisfait de mon modèle alternatif d’assurance, qui repose sur une prise en charge coordonnée.

Marcel Napierala, directeur et fondateur de Medbase.
Marcel Napierala, directeur et fondateur de Medbase.Image: dr

Vous n’êtes donc pas seulement directeur de Medbase, mais aussi client?
Exactement, mais c’est plutôt un hasard. Je suis convaincu par notre modèle de soins coordonnés. Il est bénéfique pour les patients et il permet de contenir les coûts de santé. Or, chaque année, nous avons 4 à 5% de hausse: cela ne peut pas continuer.

La prise en charge coordonnée permet-elle réellement de faire des économies?
Oui. La coordination signifie que seules les prestations médicalement nécessaires sont fournies, et qu’elles sont concertées entre médecins de famille, physiothérapeutes et spécialistes. Cela évite les doublons. Reste que, dans notre système de santé fragmenté, «coordination» n'est pas toujours le mot juste.

«Je n’ai aucune sympathie pour les querelles entre hôpitaux, cantons, Confédération, assureurs et médecins de premier recours.»
«Je rêve d’un système où nous travaillerions davantage en partenariat, depuis toujours»

Pouvez-vous prouver que ces modèles coordonnés réduisent vraiment les coûts?
Oui. Nous l’avons démontré scientifiquement sur des patients atteints de diabète de type 2 avec Swica et la Haute école zurichoise des sciences appliquées.

«Les chiffres sont clairs: les patients intégrés dans un programme interprofessionnel et coordonné coûtent environ 1800 francs de moins par an que la moyenne.»

Globalement, les frais de prestations sont environ 10% plus bas que dans les cabinets traditionnels. En 2024, nos 260 000 patients bénéficiant d’un modèle alternatif d’assurance ont permis d’économiser environ 200 millions de francs sur les primes.

Medbase est réputée abordable, notamment parce que l'entreprise appartient à Migros. Mais «bon marché» n'est-il pas synonyme de «moins bon»?
En santé, personne ne veut du M-Budget. Nous sommes moins chers, mais pas moins bons. Nous respectons des directives de qualité, nous pratiquons une médecine fondée sur les preuves et guidée par la science. Mais il faut être extrêmement efficace pour rester rentable. Comme tout le monde, nous avons trop peu de temps pour chaque patient.

«C’est là que la Suisse doit rester vigilante: si les mesures politiques malmènent la médecine ambulatoire, nous risquons de créer des conditions semblables à celles de l’Allemagne.»

C'est-à-dire?
En Allemagne, on accède facilement aux médecins de famille et spécialistes, à condition d’avoir une assurance complémentaire. Ceux qui ne disposent que de l’assurance obligatoire doivent souvent attendre longtemps. En Angleterre, c’est encore pire. Le National Health Service (NHS) est certes une institution solide, avec des standards élevés, mais encore faut-il réussir à y entrer. Beaucoup n’y parviennent même pas.

Medbase compte près de 70 cabinets. Combien encore vont s'ajouter?

«Pour nous, c’est la médecine qui est centrale, pas la taille»

Vous êtes pourtant devenu le plus grand réseau de cabinets de médecine de famille de Suisse, surtout par acquisitions.
J’ai fini par comprendre qu’une certaine taille est nécessaire pour innover et optimiser. Elle aide aussi à gagner en efficacité, notamment dans la gestion des données. Il y a quatre ans, nous avons installé un système informatique unique pour toutes nos pratiques. Ce fut un immense effort et un gros investissement.

«Aujourd’hui, nous avons également une unité de télémédecine sur ce même système.»

Vous la gérez vous-même?
Oui. Avant, nous travaillions avec un prestataire externe. Mais désormais, nous l’exploitons nous-mêmes pour soutenir nos sites physiques.

«Conseils de voyage, vaccinations, petits bobos: tout cela peut se traiter rapidement par téléphone»

Si une patiente a ensuite besoin d’un examen physique, elle est orientée de façon coordonnée vers son centre médical. C’est une petite unité, avec seulement quelques médecins, encore en phase de développement. Grâce à ce système, ils ont accès aux dossiers médicaux.

Mais est-ce stimulant, pour un médecin, de travailler dans un centre d’appels?
La télémédecine peut être très variée. Autrefois, un médecin de famille voyait 60 à 70 patients par jour.

«Aujourd’hui, les médecins ne veulent plus travailler à ce rythme»

Ils restent néanmoins très sollicités. Notre unité de télémédecine leur offre la possibilité, par exemple, de faire du télétravail.

Medbase ressemble presque à un supermarché: cabinets médicaux, pharmacies, cabinets de psychologie, centres dentaires, commerce en gros et en ligne. Est-ce vraiment cohérent?
Oui. Cela fait partie intégrante des soins de base.

En 2024, Medbase a réalisé un chiffre d’affaires de 1,3 milliard de francs…
Cette année, nous atteindrons probablement 1,4 milliard.

Et le bénéfice?
Nous avons affiché pour 2024 un bénéfice opérationnel de plus de 34 millions de francs. Même après amortissement des acquisitions, le résultat reste positif.

Migros vous impose-t-elle une marge?
Non. Mais dans les soins de base, surtout en médecine de famille, les marges sont faibles. Comme toute entreprise, nous devons être bénéficiaires pour pouvoir continuer à investir.

N’avez-vous pas peur que Migros vende un jour Medbase?
La santé est l’un des quatre domaines stratégiques du groupe Migros.

Pour l’instant, oui. Mais pour combien de temps encore?
Je ne peux pas parler à la place de Migros. Il s'agit d'un groupe de distribution à 32 milliards de chiffre d’affaires. Nous n'en représentons qu’une petite part, mais nous sommes importants, car nous partageons l’engagement pour les soins de base.

«Migros nous laisse beaucoup d’autonomie. Nous avons pu choisir quelles sociétés du groupe intégrer, et lesquelles non.»

Vraiment?
Oui. La chaîne d’appareils auditifs Miseno, par exemple, ne nous convenait pas. Nous l’avons examinée, mais avons dit non. En revanche, nous avons repris les centres dentaires et récemment la plateforme de services Impuls, malgré son coût élevé. Nous avons aussi intégré les sites Wepractice, spécialisés dans la psychothérapie. Ils jouent un rôle essentiel dans un domaine de la santé de base de plus en plus crucial.

Trouvez-vous facilement des médecins?
Plus que la moyenne, je dirais. Nous proposons de bons modèles, avec des horaires attractifs, notamment pour les praticiens qui ne souhaitent pas travailler à 100%.

Et les salaires?
Nous ne versons pas les plus hauts. D’autres acteurs disposent de moyens bien supérieurs et nous débauchent des médecins avec de meilleurs salaires. C’est un vrai problème pour nous.

En 2026, le nouveau système tarifaire Tardoc doit entrer en vigueur pour les prestations ambulatoires. Est-ce quelque chose dont vous vous réjouissez?
Sur le principe, oui. Mais ce sera une tâche herculéenne pour tout le secteur. Nous faisons tourner des simulations à plein régime et formons notre personnel.

«Il faudra maîtriser le tarif et facturer correctement. C’est notre objectif.»

Adapter un tarif ne devrait pourtant pas être un si grand problème à l’ère de l’informatique, non?
La numérisation du système de santé suisse en est encore au stade préhistorique.

«Certains hôpitaux disent qu’ils ne pourront pas facturer pendant six mois. Ils risquent des problèmes de liquidités. C’est grave»

Mis à part ces obstacles techniques, Tardoc est-il une bonne chose pour la médecine de famille?
Oui, nous devrions y gagner davantage. Mais je doute que ce soit autant qu’espéré.

Vous avez aussi quatre centres de radiologie. Les radiologues sont considérés comme perdants avec Tardoc. Allez-vous fermer ces sites?
Non, mais nous nous attendons en effet à des baisses tarifaires de 15 à 20%. C’est énorme. Nos marges vont chuter, mais nous devrons faire avec. Nous ne pouvons pas être encore plus efficaces. Et nous ne pouvons pas simplement faire passer plus de patients dans les scanners: ce serait médicalement inapproprié.

«Voilà pourquoi la coordination est essentielle, main dans la main, des assureurs aux prestataires, dans l’intérêt des patients»

Adapté de l'allemand par Tanja Maeder

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