Depuis mardi déjà, les alertes orageuses circulent en boucle. Il faut dire qu’un article publié hier dans la presse helvétique, évoquant des «supercellules menaçantes» capables de provoquer des dégâts comparables à ceux observés à La Chaux-de-Fonds le 24 juillet 2023 (avec des rafales à plus de 200 km/h), a mis le feu aux poudres. Sauf que… on en est loin.
«Ce n’est pas que l’article soit faux, mais il fait peur aux gens inutilement», regrette Frédéric Glassey. Le météorologue rappelle qu’un orage n’est pas une tempête:
Oui, l’atmosphère est instable. Oui, il y a de l’humidité. Oui, une ligne orageuse va probablement traverser le pays entre 14 heures (du côté de Genève) et 20 heures (sur la Suisse orientale). «Mais pour que ça explose vraiment, il faut de la chaleur. Or, ce matin, on est plutôt autour de 17-18°C.»
Autrement dit: le potentiel est là, mais il ne suffira peut-être pas à tout faire exploser.
Contrairement à ce que certains messages laissent entendre, toutes les régions ne sont pas égales face au risque. Le potentiel le plus important se situe en Romandie, en Suisse centrale et orientale, et surtout sur le Tessin, qui sera à coup sûr confronté à des orages très intenses. «Mais pas partout en Valais. Donc non, ça ne va pas être la cata à Blatten, comme certains le laissent entendre», lâche Glassey, un brin excédé par la tournure médiatique du sujet.
Il précise aussi que s’il s’agissait d’un épisode vraiment extrême, la Confédération aurait déjà émis une alerte de niveau 4 (le maximum). Or, ce n’est pas le cas.
Selon Glassey, le problème, c’est moins la météo que le traitement qu’on en fait. «Les festivals et autres événements romands en phase de montage m’appellent en panique pour savoir quelles mesures de sécurité prendre. Mais ce genre d’alarmes générales, sans localisation précise, c’est contre-productif.»
Et il insiste: les fameuses supercellules (ces cellules orageuses rotatives, potentiellement destructrices) ne sont ni garanties ni généralisées. Elles pourraient, dans certaines configurations très précises, se former à la sortie des Alpes à la faveur d’une convergence des vents. Mais ce n’est pas un scénario certain. «C’est une équation à cinq inconnues. Il faut que tous les paramètres soient réunis. S’il y en a un qui lâche, par exemple, la chaleur, c’est foutu.»
Alors, que peut-on dire à midi, à l’heure où l’on publie ces lignes? «Entre cette interview et la publication de l'article, les prévisions vont encore évoluer», rappelle le spécialiste.
Alors oui, il faut surveiller le ciel, mais sans paniquer. Entre Genève et le Tessin, le risque d’orages violents est bien là, avec de fortes rafales, des pluies soutenues et localement de la grêle. Mais rien n’indique à cette heure qu’un remake de la tornade de La Chaux-de-Fonds est en train de s’écrire.
Le ciel est changeant, et les deux prochaines heures seront décisives. D’ici là, un conseil: garder un œil sur le thermomètre, un autre sur les radars… «et éviter de faire paniquer tout le pays avant même que les premiers éclairs ne surgissent».