Les Suisses sont en fuite. Le week-end dernier du moins, les habitants de la plaine se sont rendus en masse dans les montagnes pour échapper au pénible brouillard. Et au retour, ils se sont retrouvés bloqués sur les routes devant les villes et villages gris.
Ce n'est pas étonnant, car en plaine, le soleil s'est rarement montré ces dernières semaines. En octobre, Météo Suisse a mesuré en maint endroit un ensoleillement plus faible que jamais au cours des dix dernières années. A la station de mesure de Neuchâtel, il n'y a eu que 57 heures de soleil, soit trois fois moins qu'en 2023 et, de loin, le total le plus faible des dix dernières années. Même constat à Pully (VD). Il y a également eu relativement peu de soleil à Sion, Zurich, Berne ou La Chaux-de-Fonds.
Le brouillard peut non seulement peser sur notre psychisme, mais il réduit également la visibilité dans le trafic, ce qui entraîne une augmentation du nombre d'accidents. En outre, il a une influence sur la qualité de l'air. Mais comment se forme-t-il? Et est-il vraiment en recul en Suisse?
Le brouillard a recouvert la Suisse durant près de deux semaines. La faute aux conditions anticycloniques persistantes. En effet, les situations anticycloniques sont une condition préalable à l'apparition d'un brouillard tenace durant les mois d'automne et d'hiver. Lorsque la situation anticyclonique est stable, de l'air froid se forme pendant la nuit. L'air froid plus lourd s'écoule alors lentement à proximité du sol, des vallées alpines et du Jura vers le Plateau. De plus, l'air froid se forme également sur place lors des nuits claires sur le Plateau, car la chaleur se propage dans l'espace.
Les conditions s'inversent alors: froid en bas, chaud en haut. Les météorologues parlent de «couche d'inversion». Comme le soleil est bas et qu'il y a peu d'énergie disponible, le lac d'air froid qui s'est formé ne peut pas être entièrement dissipé pendant la journée. De ce fait, les températures sur le Plateau baissent généralement un peu plus d'un jour à l'autre.
Lorsqu'une inversion prononcée s'est formée, la stratification de la basse atmosphère est extrêmement stable, ce qui signifie que le brouillard reste. La couche d'inversion de température ne peut alors être balayée que par des vents plus forts. Ceux-ci se produisent au passage de perturbations, généralement des fronts froids. Il faut donc espérer que de tels vents arrivent pour revoir bientôt le soleil.
Si le brouillard était au début bas et directement dans les villages, la limite du brouillard est entre-temps remontée. La raison en est le courant de bise qui règne depuis le 2 novembre. Cette bise a en effet totalement changé la donne.
Si le bulletin météo fait état d'une tendance au brouillard ou d'une faible bise, la limite supérieure se situe généralement entre 900 et 1200 mètres d'altitude. En cas de bise modérée, la limite supérieure monte à 1500 mètres, et le brouillard pénètre alors de plus en plus loin dans les Préalpes et les vallées alpines. Le courant de bise mélange la masse d'air en dessous de l'inversion. Ce qui conduit à un niveau de condensation plus élevé. Une fois ce niveau atteint, l'eau commence à se condenser et des gouttelettes se forment, ce qui donne naissance au brouillard plus en altitude.
Avant le 2 novembre, la situation était différente en l'absence de bise: en effet, si un anticyclone se trouve directement au-dessus des Alpes ou si la répartition des pressions est plate, la limite supérieure se stabilise à une altitude de 800 à 900 mètres. En revanche, si des vents de sud-ouest se lèvent, la limite supérieure s'abaisse à 500 ou 700 mètres.
Souvent, dans une telle situation météorologique, l'anticyclone se désagrège et il s'ensuit ce que l'on appelle le passage d'un front. En météorologie, un front est une zone frontière étroite entre différentes masses d'air. Dans la zone du front, on observe des changements relativement brusques de la pression atmosphérique, de la température, de l'humidité et du vent. Le passage du front chasse donc le brouillard, ce qui n'a pas été le cas cette fois-ci.
De nombreuses personnes sont surprises par l'intensité et la durée du brouillard. En fait, entre 1971 et 2020, les jours de brouillard se sont raréfiés non seulement en automne, mais aussi pendant toute la période de brouillard de septembre à février. Sur le site de Zurich-Kloten, la moyenne de 1971 à 1980 était de plus de 50 jours par an. Entre 2010 et 2020, il y a eu douze jours de brouillard de moins, soit une moyenne de 38 jours.
Pour expliquer la diminution de la fréquence du brouillard, les spécialistes évoquent différents aspects: un rapport de Météo Suisse montre que les fluctuations de la fréquence du brouillard évoluent parallèlement à celles des situations météorologiques qui provoquent le brouillard.
Il s'agit d'une haute pression, d'un faible flux d'air vers l'ouest, d'une accumulation d'air froid sur le Plateau et d'une humidité suffisante. Selon le climatologue, on n'a pas encore suffisamment étudié la question pour savoir si le réchauffement de l'atmosphère avait une influence.
Mais il existe d'autres facteurs qui contribuent à la diminution du brouillard. Les spécialistes attribuent également la diminution générale du brouillard à l'amélioration de la qualité de l'air. La diminution des émissions de dioxyde de soufre, qui provient principalement de la combustion du mazout, a notamment contribué à la baisse du brouillard. Le dioxyde de soufre favorise la condensation de la vapeur d'eau et donc la formation de brouillard:
Selon cette thèse, l'extension des zones d'habitation assèche non seulement le sol, mais aussi l'air, ce qui rend les conditions plus difficiles pour le brouillard. Même si cet automne, la situation est désormais différente.
La visibilité réduite par le brouillard augmente le risque d'accident en avion et sur la route.
L'assureur Axa ne dispose pas de chiffres précis sur les accidents liés au brouillard. Toutefois, on constate que ceux-ci sont plus nombreux durant les mois concernés.
Le brouillard crée un film d'humidité sur l'asphalte, ce qui diminue l'adhérence à la chaussée. Il est donc important de garder une distance suffisante avec la voiture de devant et de conduire prudemment. Un éclairage correct est également décisif, explique Luca Genovese d'Axa. Les phares antibrouillard avant et les feux antibrouillard arrière doivent être allumés. Mais seulement s'il y a vraiment du brouillard. Sinon, ces feux doivent être éteints, car ils dérangent les conducteurs venant en sens inverse.
Il faut également tenir compte du fait que les véhicules modernes sont équipés d'un système automatique d'allumage des feux. La journée, ils roulent avec les feux de jour, pas avec les feux de croisement plus puissants. Si le capteur de l'allumage automatique des phares ne détecte pas lui-même le brouillard, il convient d'allumer manuellement les feux de croisement.