Vous avez peut-être aperçu un petit panneau pour expliquer que les viennoiseries vont augmenter de 20 centimes. La cause est la hausse du beurre depuis le 1ᵉʳ juillet. En conséquence, les prix vont prendre l'ascenseur. L'élément incriminé: le beurre de tourage.
En échangeant dans plusieurs boulangeries, les employés vont confirmer la cherté du produit laitier, un élément indispensable pour confectionner les petites viennoiseries que vous voyez en vitrine. Mais cette envolée se conjugue à de multiples autres augmentations pour le secteur. Plusieurs autres éléments font grincer des dents les artisans suisses du pain.
En 2023, ils avaient dû essuyer une montée des prix de l'énergie, les poussant à revoir leurs tarifs. Gérard Fornerod, président de l’Association romande des artisans boulangers-pâtissiers-confiseurs (ARABPC), confirme l'a tendance. «La hausse du produit du beurre est effective depuis quelques années. Mais il faut ajouter à cela une hausse de l'électricité qui impacte nos coûts. Surtout, il ne faut pas oublier que nous sommes une branche à bas coûts, alors que les coûts de production sont énormes.»
Et de rappeler que malgré la passion du métier, le travail est harassant ces temps-ci. Les boulangers suisses, selon l'avis commun, n'ont jamais autant charbonné.
L'artisan morgien assure que la souffrance est prégnante dans la branche - et plus largement. Gérard Fornerod met le doigt sur ces nombreuses augmentations qui fragilisent le métier.
Outre les facteurs susmentionnés, le prix d'une autre matière première va sûrement peser dans la balance. Le secteur de la boulangerie tousse: «Il y a bientôt les céréales qui vont augmenter fortement. Pour cela, on doit attendre le résultat des récoltes. Cela fait déjà trois années de suite que nous avons des contingents inférieurs», soupire-t-il.
Autre détail qui a son importance: les salaires vont augmenter dès le 1er janvier 2025, souligne le président de l'association romande. Si la charge salariale va être plus importante: «pour mes collègues et moi-même, cela va impliquer une augmentation des prix sur notre assortiment», le Vaudois y voit du positif: rendre l'activité plus attractive.
Dans son commerce, il nous confie avoir modifié ses tarifs en fin d’année passée, de plus de «10% comparé à l’ancien prix de vente». Pour donner un petit ordre d'idée, le croissant avait déjà pris l'ascenseur, entre 10 et 15% début 2022. Désolé de monter les prix, face à une clientèle «outrée», le président cible (encore) le Covid comme étant la source du problème aujourd'hui: «Ça remonte à trois ans, ça ne semble pas si éloigné, mais nous avons été et restons fortement impactés par la pandémie.»
Le sentiment affiché par les boulangers rencontrés démontre un souffle qui commence à se faire court. Du côté de la BCS, l'Association suisse des patrons boulangers-confiseurs confirme que les frais du personnel ont considérablement grimpé. Un communiqué datant du 28 août paru dans Panissimo informe qu'en général, les frais du personnel n’excèdent pas la moitié du chiffre d’affaires. Mais la tendance de ces dernières années démontre que cette règle est de plus en plus souvent obsolète – dans les entreprises possédant plusieurs filiales ou un service de restauration affilié notamment.
Gérard Fornerod rappelle aussi l'importance du comportement du client: «Il faudrait que chaque citoyen décide de consommer local et qu'il évite la grosse distribution. On sait que 150 000 tonnes panifiables sont ramenées de l’étranger. Mais bien sûr, c’est le consommateur qui décide.»
La crise a par ailleurs fait réagir dans la politique vaudoise. En janvier, un rapport du Conseil d'Etat souligne que la Suisse compte 1500 artisans boulangers actuellement contre 4600 dans les années 1980, tout en précisant que la production de pain industriel est en forte augmentation et, plus précisément, l’importation des produits de boulangerie.
La solution est simple: miser sur la proximité et sur l'artisanat local pour éviter de voir votre boulangerie mettre la clé sous le paillasson.